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Le Sénat s'attaque à la «moralisation» de la vie publique

Les deux textes du gouvernement, un projet de loi ordinaire et un projet de loi organique, devraient faire l'objet d'un vote jeudi. [LIONEL BONAVENTURE / AFP]

Le Sénat attaque lundi l'emblématique chantier de moralisation de la vie publique, avec l'intention de tester le rapport de force avec l'exécutif, par une série de modifications des deux projets de loi.

Les deux textes du gouvernement, un projet de loi ordinaire et un projet de loi organique, devraient faire l'objet d'un vote jeudi. Ils seront ensuite transmis à l'Assemblée nationale qui les examinera dans la semaine du 24 juillet pour une adoption prévue début août. Le gouvernement qui souhaite aller très vite a demandé la procédure accélérée, c'est-à-dire une lecture par chambre.

«Ce texte arrive dans la foulée de la campagne présidentielle», a souligné le président de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique Jean-Louis Nadal dans le Figaro. «Il y a dans les mesures proposées des filiations claires avec les affaires Fillon, Thévenoud ou Bygmalion, Jeanne (micro-parti de Marine Le Pen), etc.» «Mais ce texte a été écrit dans l'urgence et ressemble à une loi d'ajustement, après celle qui avait été votée en 2013», déplore-t-il.

Le Sénat l'a d'ores et déjà enrichi

«Le Sénat l'a d'ores et déjà enrichi substantiellement», souligne Jean-Louis Nadal, tout en estimant qu'«une réflexion plus globale aurait été nécessaire» et en proposant de tirer «un bilan de l'existant pour renforcer la politique nationale de lutte contre la corruption».

Les textes sont défendus au Sénat par la ministre de la Justice Nicole Belloubet alors qu'ils avaient été préparés avant les législatives par son prédécesseur, François Bayrou, qui a dû quitter le gouvernement en raison d'une enquête ouverte sur les conditions d'emplois des assistants parlementaires européens du MoDem.

D'emblée, les sénateurs ont supprimé en commission un article voulu par François Bayrou qui permettait au gouvernement de créer par ordonnance une «banque de la démocratie». Un dispositif «dangereux alors que le gouvernement ne sait pas ce qu'il veut», a estimé le président de la commission des lois Philippe Bas (LR). En revanche, sur les autres points, les sénateurs sont souvent allés plus loin que le gouvernement.

Mesure phare du texte après le Penelopegate qui a défrayé la campagne présidentielle, l'interdiction des emplois familiaux a été adoptée sans réserve par la commission. Cette interdiction touchera aussi les cabinets des élus locaux.

«Véritable test»

La commission a aussi simplifié le contrôle des frais de mandat des parlementaires, qui seraient remboursés au réel, afin de limiter les coûts de gestion. En même temps, elle a proposé que les indemnités complémentaires de fonction des présidents ou vice-présidents des Assemblées soient soumises à l'impôt sur le revenu.

Pour remplacer la réserve parlementaire, qui a représenté 147 millions d'euros en 2017, la commission veut instituer une dotation transparente de soutien à l'investissement des communes. Le montant de l'aide de l’État ne pourra dépasser 20.000 euros par projet d'équipement et ne concernerait que les communes rurales. Les associations seraient exclues du dispositif.

La commission a par ailleurs prévu de lutter plus efficacement contre les partis politiques «fantômes» et renforcé les pouvoirs de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques. Elle a aussi admis le principe d'une peine complémentaire d'inéligibilité de 10 ans pour tout candidat ayant manqué à la probité, sauf décision motivée du juge. Elle a préféré cette solution à celle imposant un casier judiciaire vierge aux candidats en raison de risques d'inconstitutionnalité.

Enfin, elle a modifié l’intitulé des deux textes, les appelant projets de loi «pour la régulation de la vie publique». «Parler de moralisation est stupide et injurieux pour les 600.000 élus de la République qui méritent le respect», a jugé Philippe Bas. «Le débat au Sénat sera un véritable test de ce que seront les relations entre la Haute Assemblée et le bloc majoritaire - présidence de la République, Premier ministre, Assemblée nationale - pour les cinq ans à venir», a estimé Philippe Bas.

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