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Chantal Henry, psychiatre : «Pendant le confinement, il faut à tout prix maintenir le lien social»

Chantal Henry, professeure de psychiatrie à l'université de Paris et psychiatre au centre hospitalier de Sainte-Anne.

Stress, déprime... Comme au mois de mars, le confinement décrété à partir de ce jeudi soir va mettre à rude épreuve la santé mentale des Français. Chantal Henry, professeure de psychiatrie à l'université de Paris, nous éclaire sur les conséquences de telles mesures et nous livre quelques clés pour les affronter.

Ce soir, les Français seront reconfinés. Maintenant qu'ils savent à quoi s'attendre, les conséquences mentales peuvent-elles être pires qu'en mars ? 

Je ne pense pas. Le pays est mieux préparé, car beaucoup de leçons ont été tirées du premier confinement. Par exemple, les lignes d'écoute mises en place au printemps sont toujours disponibles. 

En plus de ça, le reconfinement est plus souple que ce que nous avons vécu en mars. Je pense surtout aux enfants qui pourront continuer d'aller à l'école. C'était essentiel : en mars, il était très difficile de faire comprendre aux enfants que leurs parents restaient à la maison, mais pour travailler. C'était une situation catastrophique. Là, les parents pourront télétravailler sereinement. 

Globalement, à quels troubles psychiques peut-on s'attendre ? 

Nous allons surtout retrouver le problème des addictions. Des études américaines ont montré une forte augmentation de la consommation de drogues et de tabac depuis le début de la crise sanitaire. Il faudra vraiment faire attention à cela.

Nous pourrions aussi être confrontés à de plus en plus de deuils pathologiques. Ce phénomène survient lorsque la personne ne peut pas faire son deuil correctement : par exemple, elle ne peut pas aller à l'hôpital voir son proche, ou a des difficultés à organiser l'enterrement. Le deuil n'est donc pas résolu, et peut conduire à une dépression dans les six mois.

Mais le principal trouble qui surviendra avec le reconfinement, ce sont les symptômes anxio-dépressifs. Ils touchent les personnes qui sont confrontées à un sentiment d'insécurité, qui se retrouvent isolées, et finissent par ressentir une certaine tristesse. Ces symptômes ne débouchent pas forcément sur une dépression et ne nécessitent pas de prise en charge, mais ils doivent être surveillés.

L'enchaînement très rapide de mesures restrictives est-il la cause de ces symptômes anxio-dépressifs ? 

Toute situation d'incertitude est anxiogène, mais elle l'est encore plus quand il y a un manque de pédagogie. On ne peut pas décréter des restrictions sans les expliquer. Il faut être très pédagogue. Si la population ne comprend pas une mesure, elle ne va pas l'appliquer. 

Le gouvernement est-il assez pédagogue ? 

Oui. Je trouve que le gouvernement a une approche plutôt pédagogique. Ce sont les défilés de médecins sur les plateaux télés qui sont très anxiogènes. Ils disent tout et leur contraire, la population ne sait plus qui écouter. 

Le gouvernement s'appuie sur un conseil alors qu'en plateau, chacun y va de son analyse : pour moi, c'est surtout ça le problème.

Un conseil pour éviter l'anxiété et la déprime ? 

L'important est de maintenir à tout prix le lien social. Il ne faut pas hésiter à utiliser les nouvelles technologies pour cela. Et, si vous faites quand même face à des symptômes anxio-dépressifs, il faut les surveiller. S'ils s'installent dans le temps et que la dérégulation de vos humeurs est trop sévère, peut-être avez-vous besoin d'une prise en charge. En cas de doutes, tournez-vous en premier lieu vers votre médecin généraliste. 

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