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Le Japon s'autorise à nouveau à exporter des armes

Des soldats japonais lors d'un exercice commun avec l'armée américaine, en Californie le 9 février 2014 [Frederic J. Brown / AFP/Archives] Des soldats japonais lors d'un exercice commun avec l'armée américaine, en Californie le 9 février 2014 [Frederic J. Brown / AFP/Archives]

Le Japon a levé mardi l'interdiction de vendre des armes à l'étranger qu'il s'est imposé pendant près d'un demi-siècle, en pleine tension régionale notamment avec son voisin chinois.

Le gouvernement de droite de Shinzo Abe a approuvé une nouvelle doctrine en la matière qui remplace cet interdit datant de 1967, a annoncé le secrétaire général du gouvernement Yoshihide Suga.

Désormais le Japon pourra par exemple exporter du matériel militaire - il préfère parler de matériel de défense, un terme moins martial - à des pays qui se situent le long de voies maritimes par lesquelles transitent les indispensables et vitales importations de pétrole et de gaz du Japon.

Il pourrait ainsi être question de l’Indonésie, du Vietnam ou des Philippines, pays riverains de la mer de Chine méridionale qui s’inquiètent, comme le Japon, des ambitions maritimes grandissantes de la Chine. Tokyo pourrait ainsi leur vendre des navires d'occasion.

Selon les nouvelles règles, le Japon s'interdit toutefois les exportations d'armes qui pourraient représenter une menace pour la paix et la sécurité mondiales, et le gouvernement s'assurera au préalable contre tout risque de ré-exportation vers un pays tiers.

"En vertu de ces nouveaux principes nous avons pris des mesures pour rendre les transferts d'équipements de défense plus transparents. Ceci contribuera à la paix et la coopération en vertu du principe d'un pacifisme proactif", a précisé M. Suga, ajoutant que le Japon participera désormais "à des programmes de développement et de production de matériel de défense".

Les nouvelles règles vont permettre le développement et la production d'armes en partenariat avec les Etats-Unis (notamment pour le bombardier furtif F-35) et des pays européens, et l'exportation d'équipements militaires à des fins pacifiques et humanitaires, comme dans le cas de missions de maintien de la paix de l'ONU.

- Compatible avec la Constitution pacifiste ? -

Le Japon produit notamment des munitions, des fusils d'assaut, des chars, des navires, des chasseurs-bombardiers F2, un hydravion quadri-moteur longue portée, l'US-2, qu'il essaye de vendre par exemple en Inde.

En 1967, alors qu'on était en pleine guerre froide, le Japon avait décidé d’interdire les exportations d'armes vers les pays communistes, vers ceux qui sont sous un embargo de l’ONU sur les ventes d'armes, et enfin vers les pays impliqués dans des conflits internationaux ou susceptibles de l'être.

Le Premier ministre japonais Shinzo Abe, à Tokyo le 1er avril 2014 [ / Jiji Press/AFP]
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Le Premier ministre japonais Shinzo Abe, à Tokyo le 1er avril 2014

Ces restrictions avaient été encore renforcées en 1976, aboutissant à une interdiction totale des ventes d'armes.

Mais fin 2011 Tokyo a donné un premier petit coup de canif dans son auto-interdiction, en ouvrant la voie à la participation de firmes japonaises à des projets d'armement avec l’étranger.

Plus qu’une interdiction, cette décision représentait un interdit quasi moral que le Japon s'infligeait en tant que pays vaincu, et ce en ligne avec le pacifisme de la Constitution imposée par le vainqueur américain en 1947 et selon laquelle le Japon renonçait « à jamais » à la guerre.

C'est justement cette Constitution que M. Abe entend réformer avec en ligne de mire le fameux article 9 qui consacre ce renoncement à la guerre et empêche les forces nippones de faire autre chose que défendre le territoire national.

Le très conservateur Premier ministre Abe entend ainsi promouvoir son idée que le Japon pourrait, au nom d’un principe d’«auto-défense collective» se porter au secours d’alliés en difficultés, au premier rang desquels les Américains.

Il reste que la question du «pacifisme» officiel du Japon (via sa Constitution) tout comme celle des exportations d’armes ou d’une participation à des projets d’armements internationaux, restent très sensibles au Japon.

Selon un récent sondage réalisé par l'agence de presse Kyodo, près de 67% des Japonais seraient opposés à des exportations d’armes, contre 26% qui y seraient favorables.

Et globalement, une majorité des Japonais restent attachés à leur constitution pacifiste.

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