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Cambodge : arrestation du chef de l'opposition et fermeture d'un journal indépendant

Accusé de comploter pour "détruire le pays", le leader de l'opposition Kem Sokha a été arrêté par la police cambodgienne cette nuit. [STR / AFP]

Accusé de trahison, le leader de l'opposition cambodgienne, Kem Sokha, a été arrêté dimanche, a annoncé le gouvernement du Premier ministre Hun Sen, soupçonné de vouloir se débarrasser de ses opposants avant les élections de 2018.

Sa détention provisoire va faire monter d'un cran la tension dans ce pays d'Asie du Sud-Est d'autant plus que quelques heures plus tard l'un des derniers journaux indépendants du pays annonçait sa fermeture contrainte, dû au harcèlement du pouvoir. A 65 ans, Hun Sen, homme fort du Cambodge depuis 32 ans, est déterminé à rester en place. 

Et il poursuit son offensive pour briser la popularité croissante du principal parti d'opposition, le Cambodge National Rescue Party (CNRP), qui a réalisé une percée remarquée aux élections municipales de juin. Publié dans la nuit, le communiqué du gouvernement a évoqué une «conspiration secrète, entre Kem Sokha, son groupe et des étrangers, faisant du tort au Cambodge».

Le chef de l'opposition détenu

«Derrière Kem Sokha, c'est toujours la même main, celle de l'Amérique», a ajouté Hun Sen dimanche, parlant d'un complot pour «détruire le pays». Il a par ailleurs menacé de dissoudre le parti «si celui-ci tente de soutenir» son chef. La fille de Kem Sokha a indiqué en fin de journée sur Twitter que son père était détenu au secret dans une prison à la frontière vietnamienne.

Agé de 64 ans, il est le chef du principal parti d'opposition dont l'autre dirigeant, Sam Rainsy, est actuellement en exil en France. Pour ce dernier, cette arrestation est une «manoeuvre grossière pour décapiter l'opposition». L'interpellation a eu lieu quelques heures seulement après la publication sur Fresh News, site internet pro-gouvernement, d'un article accusant Kem Sokha de discuter du renversement de Hun Sen avec le soutien des Etats-Unis.

L'article était toutefois basé sur un discours prononcé en 2013 en Australie lors duquel il avait évoqué des voyages à l'étranger et notamment aux Etats-Unis pour discuter de son travail d'opposition. Dimanche, le département d'Etat américain s'est dit préoccupé cette arrestation, estimant que les accusations «semblaient politiquement motivées» et ajoutant que cela «posait de sérieuses questions quant à la capacité du gouvernement à organiser des élections crédibles».

La presse indépendante étouffée

Ex-combattant Khmer rouge et Premier ministre depuis 1985, Hun Sen est un habitué des déclarations fracassantes et des menaces. Il a récemment prévenu qu'il y aurait «la guerre civile» si son parti - le Parti du peuple cambodgien (CPP) - perdait le pouvoir aux prochaines élections.

Ces derniers mois, Hun Sen a également multiplié les attaques contre la presse et notamment le Cambodia Daily, qui s'est fait remarquer pour des enquêtes sur le népotisme du régime. Après des mois de pressions, le titre a annoncé dimanche que l'édition de lundi serait la dernière car il ne peut pas régler les arriérés d'impôts de 6,3 millions de dollars que lui a soudain réclamé le pouvoir.

«Après 24 ans, un mois et 15 jours, le gouvernement cambodgien a détruit The Cambodia Daily, qui représentait une branche spéciale et singulière de la presse libre au Cambodge», a déclaré le journal dans un communiqué, estimant que les demandes du gouvernement étaient sans fondement. D'autres médias sont menacés par la vague de répression lancée par le Premier ministre. Des mesures fiscales ont également été annoncées par le gouvernement contre Radio Free Asia et Voice of America financées par les Etats-Unis, qui affirment de leurs côtés respecter les lois locales. «C'est un jour sombre pour la liberté de la presse au Cambodge», a estimé auprès de l'AFP la rédactrice en chef Jodie DeJonge. 

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