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Nucléaire iranien : les lignes ne semblent guère bouger après le coup d'éclat israélien

Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu montre ce qu'il présente comme des "preuves" sur un plan nucléaire secret de l'Iran, le 30 avril 2018 à Tel-Aviv [Jack GUEZ  / AFP] Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu montre ce qu'il présente comme des «preuves» sur un plan nucléaire secret de l'Iran, le 30 avril 2018 à Tel-Aviv. [Jack GUEZ / AFP]

Israël a commencé à partager la masse d'informations que ses espions ont selon lui sorties de Téhéran sur le nucléaire iranien, mais le doute prévaut quant à un changement de position des grandes puissances sur l'accord conclu en 2015.

Les lignes opposées des Américains et des Européens semblent avoir peu bougé après le show télévisé délivré lundi soir par le Premier ministre Benjamin Netanyahou à l'approche de l'échéance du 12 mai, cruciale pour l'avenir de cet accord historique censé garantir le caractère civil du nucléaire iranien.

«Ce qui se passe aujourd'hui et ce qui s'est passé récemment et ce que nous avons appris montre vraiment que j'ai raison à 100%», a dit le président américain Donald Trump, principal allié d'Israël, qui a promis par le passé de «déchirer» cet accord et donné aux Européens jusqu'au 12 mai pour trouver un nouveau texte qui remédierait aux «terribles lacunes» de celui de 2015.

La déclaration de M. Netanyahou renforce «la pertinence» de l'accord, a au contraire estimé la France.

Israël, ennemi juré de l'Iran, se voit comme une cible désignée si ce pays se dotait de l'arme nucléaire. La destruction de l'Etat hébreu fait partie de la rhétorique de la République islamique d'Iran.

L'accord de 2015, conclu entre l'Iran et les grandes puissances -Etats-Unis, Russie, Chine, France, Grande-Bretagne, Allemagne - prévoit une levée progressive et conditionnelle des sanctions internationales en échange de la garantie que Téhéran ne se dotera pas de l'arme atomique.

Chargée de veiller au respect de ses engagements par l'Iran, l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) a constamment certifié le respect iranien de l'accord.

D'ailleurs, pour la cheffe de la diplomatie de l'Union européenne Federica Mogherini, les documents aux mains des Israéliens devront être analysés, en premier lieu par l'AIEA. Et de souligner que «M. Netanyahu n'a pas remis en question le respect» de l'accord par Téhéran.

Quant à l'Iran, qui a toujours démenti chercher à se doter de l'armé nucléaire, M. Netanyahu est pour lui «un menteur invétéré».

Le «show de sa vie»

Lundi soir, le Premier ministre israélien a dévoilé ce qu'il a présenté comme une prise exceptionnelle réalisée par les espions israéliens à Téhéran même, et les «preuves concluantes» de l'existence d'un plan secret de l'Iran pour se doter de l'arme nucléaire.

L'accord sur le nucléaire iranien [P.Pizarro/S.Huet/T.Saint-Cricq / AFP]
L'accord sur le nucléaire iranien [P.Pizarro/S.Huet/T.Saint-Cricq / AFP]

Devant des classeurs et des CD contenant selon lui une centaine de milliers de documents, M. Netanyahou, familier de telles prestations, s'est livré à ce que le journal israélien Maariv a décrit comme le «show de sa vie».

Ces photos, vidéos et autres graphiques montrent que l'Iran, malgré ses dénégations constantes, a bien développé de 1999 à 2003 un projet secret appelé Amad pour produire la bombe atomique, a-t-il dit.

L'Iran a mis Amad de côté sous la pression internationale, mais a continué jusqu'à aujourd'hui, dans le cadre d'une organisation modifiée mais avec le même personnel, à préserver son savoir-faire et à développer ses capacités nucléaires militaires, selon lui.

M. Netanyahou n'a pas fourni d'élément concret attestant que l'Iran avait activement travaillé à la bombe après 2015. Mais il a secrètement gardé au frais le projet Amad pour le ressortir «au moment de son choix».

M. Netanyahou s'est essentiellement employé à convaincre qu'on ne pouvait pas faire confiance à l'Iran puisque ce pays avait manqué à son engagement international de faire la lumière sur ses activités passées, et que «l'accord nucléaire repose sur les mensonges».

Présent, passé

«C'est un accord terrible, qui n'aurait jamais dû être conclu», a dit M. Netanyahou, en se disant confiant que M. Trump ferait le «bon choix».

M. Netanyahu, dont le pays est considéré comme la première puissance militaire du Proche-Orient et la seule détentrice de l'arme nucléaire, a partagé par avance ses informations avec les Etats-Unis, et comptait faire de même avec l'AIEA. Il s'est entretenu lundi avec les dirigeants français, russe et allemand et devait le faire avec les Britanniques et les Chinois.

Le secrétaire d'Etat américain Mike Pompeo a assuré que les documents étaient «authentiques». Cependant la Maison Blanche elle-même a, involontairement apparemment, alimenté le doute sur leur impact.

Après avoir écrit que «l'Iran a un solide programme d'armes nucléaires clandestin», elle a corrigé son communiqué pour le mettre au passé.

Différentes voix se sont élevées pour dire que le projet Amad lui-même n'était pas une nouveauté.

L'accord, avec ses obligations et ses mécanismes de vérification confiée à l'AIEA, a été conclu «précisément parce que la confiance n'existait pas entre les parties», a fait valoir Mme Mogherini.

Le quotidien israélien Yediot Aharonot, souvent critique de M. Netanyahou, estime que la démonstration de celui-ci montre seulement que les scientifiques iraniens ne sont pas devenus des «enfants de choeur» après 2015.

Les documents produits sont un «plat de pâtes réchauffées servant l'image du Premier ministre» en garant de la sécurité de son pays, écrit le journal à un moment de tensions avivées avec l'Iran en Syrie voisine.

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