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Migrants : le dilemme des entreprises d'origine hispanique en contrat avec le gouvernement Trump

Un centre de détention temporaire pour mineurs sans papiers à Tornillo, au Texas, à la frontière entre le Mexique et les Etats-Unis, le 18 juin 2018  [HERIKA MARTINEZ / AFP] Un centre de détention temporaire pour mineurs sans papiers à Tornillo, au Texas, à la frontière entre le Mexique et les Etats-Unis, le 18 juin 2018 [HERIKA MARTINEZ / AFP]

Le tollé provoqué par les images d'enfants migrants angoissés, séparés de leurs parents à la frontière entre le Mexique et les Etats-Unis, a sorti de l'ombre les entreprises d'origine hispanique travaillant, sur l'immigration notamment, comme sous-traitants pour le gouvernement américain.

MVM, entreprise américaine d'origine hispanique, d'ordinaire un obscur sous-traitant, s'est retrouvée sous les projecteurs, pointée du doigt sur les réseaux sociaux.

La compagnie qui effectue des contrats de sous-traitance pour le gouvernement américain dans les transports, la sécurité et la logistique, a soudainement supprimé de son site des annonces d'offres d'emplois.

Celles-ci révélaient que l'entreprise cherchait à embaucher des employés pour travailler dans des refuges abritant des enfants séparés de leurs parents par la politique d'immigration de «tolérance zéro» du gouvernement Trump. L'épisode a mis en lumière le dilemme auquel sont confrontés les fournisseurs du gouvernement américain, vilipendé par beaucoup pour la dureté de sa politique d'immigration.

Les entreprises d'origine hispanique aux Etats-Unis considèrent d'ordinaire la manne de cinq-cent milliards de dollars de contrats de marchés publics annuels comme une aubaine.

Des chaussures et peluches d'enfants laissés devant l'entrée du centre de détention temporaire pour mineurs, le 21 juin 2018 à Tornillo, au Texas,, à la frontière entre les Etats-Unis et le Mexique    [Brendan Smialowski / AFP]
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Des chaussures et peluches d'enfants laissés devant l'entrée du centre de détention temporaire pour mineurs, le 21 juin 2018 à Tornillo, au Texas,, à la frontière entre les Etats-Unis et le Mexique

Mais les Hispaniques qui, début 2017, avaient proposé leurs services pour construire le mur anti-immigration de Donald Trump à la frontière avec le Mexique, ont reçu un accueil particulièrement froid au sein de la communauté.

Le débat s'est intensifié récemment devant les images de bambins en pleurs, emmenés loin de leurs parents détenus. Nombre d'entre eux se retrouvent dans des refuges tenus par des organismes à but non lucratif aux termes de contrats valant des centaines de millions de dollars.

Mercredi, dans un revirement, le président Trump a annoncé la fin de la séparation des familles.

Une politique qui crée le malaise 

Avant le revirement de la Maison Blanche, la Chambre de commerce hispanique des Etats-Unis (USHCC) a condamné la politique de «tolérance zéro» affirmant que «la séparation des familles viole la notion même de la décence humaine ainsi que les idéaux fondamentaux de notre nation».

«Nous ne décourageons pas nos membres de chercher des occasions de conclure des marchés fédéraux pour des raisons politiques», a déclaré Mary Gardner, une responsable de l'USHCC.

 papiers à la frontière, le 22 juin 2018  [Eric BARADAT / AFP]
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papiers à la frontière, le 22 juin 2018

«Nous nous efforçons toutefois de tenir nos membres informés sur des questions telles que les injustices commises à la frontière entre les Etats-Unis et le Mexique», poursuit-elle. «C'est pour cela qu'il n'est pas surprenant de voir certains de nos membres choisir de ne pas travailler pour des agences gouvernementales comme ICE», qui s'occupe de l'immigration.

Michel Zajur, dirigeant de la Chambre de commerce hispanique de Virginie, admet que son groupement a été pris au dépourvu par le débat sur les séparations familiales.

«Nous voulons que nos entrepreneurs remportent des contrats fédéraux», dit-il, «mais lorsqu'il s'agit de la question éthique de séparer des enfants de leurs parents (...), je pense que beaucoup de gens ne veulent pas participer à cela».

Travailler pour ICE 

Créée en 1979 par Dario Marquez et deux autres anciens agents des services secrets, MVM compte 2.500 employés et a conclu des contrats avec plus d'une vingtaine d'agences fédérales allant du Pentagone à l'institut de musées Smithsonian.

La société a remporté un contrat pouvant aller jusqu'à 200 millions de dollars auprès des autorités d'immigration et de douanes ICE de 2017 à 2022 pour fournir des services de traduction et d'interprétation.

Joe Arabit, un des responsables de MVM, a précisé à l'AFP que ses travaux avec les enfants immigrés non-accompagnés relevaient d'un précédent contrat noué avec ICE en 2014 et portant sur le transport d'enfants et de familles sans-papiers vers des installations américaines. «Nous ne gérons pas aujourd'hui de refuge ou toute autre structure pour mineurs», a-t-il indiqué dans un email.

«Tolérance zéro»

MVM, la semaine dernière, avait annoncé sur son site l'ouverture d'un poste de travail pour un superviseur «faisant partie d'une équipe hautement compétente pour gérer un refuge et les opérations qui y sont associées pour la garde temporaire et le transport d'enfants non-accompagnés». Ce poste faisait partie d'une liste d'emplois à pourvoir dans l'anticipation d'un contrat à Homestead en Floride. Mais la société a effacé ces offres en début de semaine.

«Sur les injonctions de la direction de la compagnie, nous avons enlevé ces annonces qui étaient liées aux opérations de préparation dans le cadre de la politique de "tolérance zéro"», a déclaré M. Arabit ajoutant que, pour l'instant, l'entreprise ne postulait pas sur de nouveaux contrats gouvernementaux liés à l'immigration.

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