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Brexit, santé, avenir de Boris Johnson... Les enjeux des élections au Royaume-Uni

Parmi les enjeux majeurs des élections de jeudi figure bien évidemment le Brexit, mais aussi le système de santé public, la carrière de Boris Johnson ou encore l'avenir du Labour. Parmi les enjeux majeurs des élections de jeudi figurent bien évidemment le Brexit, mais aussi le système de santé public, la carrière de Boris Johnson ou encore l'avenir du Labour. [Tolga AKMEN / AFP ]

Ce jeudi 12 décembre, les Britanniques seront appelés aux urnes pour des élections générales anticipées cruciales. Alors que le Royaume-Uni s'apprête à sortir de l'Union européenne, l'issue de ce scrutin pourrait conditionner le visage du pays pour les décennies à venir. Mais le divorce avec l'UE est loin d'être le seul enjeu de ces élections, qui vont également être décisives pour le futur du système de santé ou encore pour l'avenir politique de Boris Johnson.

Brexit or not brexit ?

Le Brexit reste l'enjeu numéro un de ces élections. Des résultats de ce scrutin anticipé - demandé par Boris Johnson justement pour sortir de l'impasse dans ce dossier - dépend l'avenir du divorce, prévu le 31 janvier. Trois scénarios semblent se dessiner. Si les Conservateurs du Premier ministre Boris Johnson obtiennent la majorité absolue au Parlement - ils sont largement en tête des sondages avec 43 % des intentions de vote, soit 10 points de plus que les Travaillistes - «BoJo» aura alors les mains libres pour faire adopter par la Chambre des communes son accord de Brexit conclu avec l'UE, et le Royaume-Uni pourrait sortir de l'Union, en douceur, fin janvier.

Au contraire, si ce sont les Travaillistes de Jeremy Corbyn qui remportent la majorité absolue, le Brexit repartirait quasiment de zéro. En effet, le leader de la formation de gauche veut renégocier un accord de sortie «raisonnable» avec l'UE, avant de le soumettre à un référendum, qui proposerait deux alternatives : une sortie avec accord ou un maintien dans l'Union. Il est aussi possible que ces élections ne donnent pas un résultat tout noir ou tout blanc, c'est-à-dire qu'aucun des deux grands partis traditionnels n'ait de majorité absolue au Parlement. Une issue qui promet de nouveaux blocages parlementaires au sujet du Brexit, et donc peut-être une nouvelle demande de report, qui serait le quatrième.

un système de santé public à relancer

Avec le Brexit, le système public de santé (le NHS) aura été l'autre sujet majeur de la campagne. Pas une surprise, sachant que, selon plusieurs sondages, il s'agit de la seconde préoccupation des Britanniques, après le retrait de l'UE. Ces derniers sont très attachés à ce service public, équivalent de la Sécurité sociale en France. Mais ce système est actuellement en souffrance, en raison notamment de problèmes de vetusté des établissements de soin, de manque de personnel ou de faiblesse des salaires. Symbole de cette crise, une photo d'un petit garçon de 4 ans allongé par terre dans un couloir d'hôpital en attendant des soins en urgence, qui a fait la Une du Daily Mirror lundi, mais dont la véracité a plus tard été mise en doute.

Un cliché qui a mis dans l'embarras le Premier ministre Boris Johnson. Alors qu'un journaliste a voulu lui montrer ladite photo sur son téléphone lundi pour le faire réagir, le dirigeant conservateur a d'abord refusé, puis a mis le smartphone du reporter dans sa poche. Plus tard, il a finalement accepté de la regarder, a rendu son portable au journaliste et s'est excusé auprès de la famille du garçonnet. Une occasion dont a profité le Labour pour attaquer les Tories concernant les effets sur le NHS de la politique d'austérité menée depuis leur arrivée au pouvoir il y a neuf ans, et pour promouvoir leur propre programme. Les Travaillistes promettent en effet d'investir 26 milliards de livres (31 milliards d'euros) supplémentaires dans le système de santé d'ici à 2023-2024. Une mesure à laquelle les Conservateurs ont répondu en s'engageant eux aussi à augmenter les fonds alloués au NHS, de 34 milliards de livres (40 milliards d'euros) sur cinq ans.

L'avenir politique de Boris Johnson en jeu

En dehors des considérations programmatiques, ces élections ont également un enjeu capital pour Boris Johnson. Le Premier ministre joue en effet quasiment son avenir politique. Et pourtant, c'est lui qui a poussé pour convoquer un scrutin anticipé, de façon à se constituer une majorité absolue - qu'il n'avait pas - pour faire passer son accord de Brexit. Mais il n'est pas à l'abri d'un scénario à la Theresa May, sa prédécesseure.

En juin 2017, celle-ci avait convoqué des élections anticipées pour accroître sa majorité absolue au Parlement et ainsi asseoir sa légitimité avant le début des négociations avec l'UE sur le Brexit. Largement en tête des sondages, son parti avait, à la surprise générale, perdu sa majorité absolue, obligeant la Première ministre à s'allier avec le petit parti unioniste nord-irlandais DUP. Cet événement avait marqué le début des ennuis pour la dirigeante, qui a finalement démissionné en mai dernier, incapable de mettre en œuvre le Brexit.

En cas de défaite jeudi, ou même de victoire sans majorité absolue, Boris Johnson pourrait connaître le même sort, et voir son mandat être écourté. En effet, de tels scénarios compliqueraient voire rendraient impossible son objectif, martelé depuis son accession au pouvoir en juillet, de faire le Brexit «coûte que coûte». De plus, même s'il est adoré au sein de l'électorat conservateur, il n'en est pas autant du côté des députés de son parti, qui pourraient au bout d'un moment en avoir assez de ses frasques et de son rapport à la vérité, accusé d'être problématique.

Antisémitisme, ligne politique... Le Labour à la croisée des chemins

Dans un monde parallèle, le Parti travailliste, principale formation d'opposition outre-Manche, serait le grand favori de ces élections, profitant de l'incapacité des Conservateurs au pouvoir à faire sortir le Royaume-Uni de l'UE, trois ans et demi après le référendum. Mais au lieu de cela, le Labour stagne dans les sondages, à 33 % des intentions de vote, loin derrière les Tories. La probabilité de voir les Travaillistes remporter la majorité absolue des sièges est donc proche de zéro. La faute à qui ? On serait tenté de répondre Jeremy Corbyn, leader du parti depuis 2015.

En effet, depuis son élection surprise il y a quatre ans, les Travaillistes sont régulièrement taxés d'antisémitisme, et Jeremy Corbyn est accusé de n'avoir rien fait pour empêcher ce «poison» de se diffuser dans sa formation, selon les mots du grand rabbin du Royaume-Uni Ephraim Mirvis, auteur d'une tribune au vitriol fin novembre dans le Times. Ce qui vaut à Jeremy Corbyn la plus faible cote de popularité d’un chef de l’opposition depuis que ce type de sondages est effectué outre-Manche, en 1977.

Sa position neutre sur le Brexit - il refuse de dire s'il est partisan d'une sortie avec accord ou d'un maintien dans l'UE - suscite également l'incompréhension. Sans compter que ses positions très à gauche - il fait notamment campagne sur sa promesse de vaste programme de nationalisations, comprenant les télécoms, le rail, l'eau, l'électricité ou la Poste - font peur à une partie de l'électorat modéré. Ainsi, en cas de revers aux élections de jeudi, le Labour va vraisemblablement devoir faire son examen de conscience. Au risque sinon de se faire concurrencer par les Libéraux-démocrates, les Verts, ou encore le Parti du Brexit, et de finir comme le Parti socialiste français, formation historique désormais quasiment inexistante sur la scène politique hexagonale.

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