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En Suède, la puce à la main

Un homme insère un implant électronique sous la peau d'un autre à l'aide d'une seringue, à Stockholm, le 18 janvier 2018 [Jonathan NACKSTRAND / AFP] Un homme insère un implant électronique sous la peau d'un autre à l'aide d'une seringue, à Stockholm, le 18 janvier 2018 [Jonathan NACKSTRAND / AFP]

Un implant électronique inséré sous la peau pour remplacer clés, cartes de visite et billets de train : en Suède, c'est une réalité pour quelques milliers de téméraires, avides de nouveautés et indifférents aux potentiels dangers d'une intrusion technologique de ce type dans le corps humain.

Si la pratique reste confidentielle, elle ne fait guère débat dans un pays féru de nouvelles technologies qui craint peut-être moins qu'ailleurs la violation des données et où les assurés sociaux acceptent depuis longtemps le partage de leurs informations personnelles entre administrations publiques.

Accessoire inoffensif qui simplifie la vie quotidienne pour ses défenseurs, la puce est actuellement un objet entièrement passif, assurent ses promoteurs : elle n'émet de données que lorsqu'on pose la main sur un lecteur de carte NFC (Near Field Communication).

Ulrika Celsing, 28 ans, fait partie des 3.000 adeptes en Suède, un pays de 10 millions d'habitants. Pour elle, finie la sempiternelle quête de ses clés dans son sac à main : pour entrer au bureau, elle fait simplement glisser sa main sur un petit boitier, tape son code et la porte s'ouvre.

Depuis un an, elle est équipée d'une puce sous-cutanée qui remplace sa carte d'accès et lui permet aussi d'entrer dans son club de gym ou de prendre le train.

Sorte de porte-monnaie électronique, la puce peut aussi prendre en charge les billets de train de la société ferroviaire nationale SJ. Disponible depuis un an, ce service a convaincu quelque 130 utilisateurs : le voyageur réserve son billet en ligne et l'enregistre sur sa puce.

Se faciliter la vie

Quand son entreprise a organisé une manifestation où les employés pouvaient se faire implanter ce petit objet dans la main, Ulrika a «suivi le mouvement».

«C'était cool d'essayer quelque chose de nouveau. Et, dans le futur, voir comment on peut l'utiliser pour faciliter sa vie», dit-elle.

Il existe 3.000 adeptes de cette nouvelle technologie, en Suède [Jonathan NACKSTRAND / AFP]
Il existe 3.000 adeptes de cette nouvelle technologie, en Suède[Jonathan NACKSTRAND / AFP]

Hormis une vague douleur quand la seringue a inséré la puce dans sa main gauche, Ulrika n'a rien senti et utilise son implant presque quotidiennement, sans peur du piratage ou d'éventuelle surveillance.

«La technologie n'en est pas encore arrivée au point où on peut pirater ta puce», assure-t-elle. Mais «à l'avenir, peut-être faudra-t-il y réfléchir. Je peux toujours l'enlever...»

Pour Ben Libberton, microbiologiste, les dangers sont pourtant d'ores et déjà réels. L'implantation de la puce peut causer des «infections et (...) des réactions du système immunitaire», explique-t-il.

Et «le risque le plus important concerne les données: en ce moment, les données collectées et partagées par les implants sont peu nombreuses mais cela va probablement augmenter», assure le chercheur.

«Si un implant un jour peut détecter un problème médical chez son porteur, qui va être mis au courant et quand? Est-ce que les compagnies d'assurances vont obtenir des informations sur notre santé ?», s'interroge-t-il.

Selon lui, «plus les données contenues dans un seul lieu - comme ça serait le cas avec un implant - sont nombreuses, plus le risque que ce soit utilisé contre nous est important».

Une crainte que Jowan Österlund, spécialiste de piercings et champion autoproclamé de l'implantation de puces, balaie. Au contraire, si on porte sur soi toutes ses données personnelles, cela nous permet de mieux contrôler leur utilisation, affirme-t-il, estimant qu'un usager est libre ou non d'utiliser sa puce.

Malgré les interrogations en suspens, l'expérience attire. «En Suède, les gens n'ont pas peur de la technologie et je dirais qu'il y a moins de résistance aux nouvelles technologies ici que dans la plupart des pays», affirme Ben Libberton, le microbiologiste.

Un homme réagit alors qu'un autre insère un implant sous sa peau, à Stockholm, le 18 janvier 2018 [Jonathan NACKSTRAND / AFP]
Un homme réagit alors qu'un autre insère un implant sous sa peau, à Stockholm, le 18 janvier 2018[Jonathan NACKSTRAND / AFP]

Lors d'une «implant party» organisée par Jowan Österlund à Stockholm, Anders Brännfors, 59 ans et cheveux poivre et sel, détonne un peu parmi la majorité des curieux trentenaires tendance hipster.

Ravi d'être devenu une version 2.0 de lui-même, il n'a pourtant encore jamais utilisé sa puce plusieurs semaines après sa pose.

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