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Pakistan : la justice destitue le Premier ministre

Le Premier ministre pakistanais Yousuf Raza Gilani à son arrivée à la Cour suprême à Islamabad, le 26 avril 2012[AFP/Archives]

La Cour suprême du Pakistan a ordonné mardi la destitution du Premier ministre Yousuf Raza Gilani, condamné pour avoir refusé de rouvrir des poursuites pour corruption contre le président Asif Ali Zardari, un verdict qui affaiblit ce dernier et pourrait entraîner des élections anticipées.

Juste après cette annonce, M. Zardari a convoqué une réunion d'urgence de son parti, le Parti du peuple pakistanais (PPP), pour "examiner la situation", a déclaré à l'AFP un responsable gouvernemental sous couvert de l'anonymat, en précisant que M. Gilani y participait.

Le chef de l'Etat a également convoqué les responsables des autres partis membres de la coalition gouvernementale menée par le PPP à le rencontrer dans la soirée, selon la même source.

Reste à savoir si l'annonce de la Cour suprême va entraîner un départ immédiat de M. Gilani.

Ce dernier a déclaré à plusieurs reprises que seul le parlement, et non la justice, pouvait ordonner sa destitution.

Gilani résiste

Mais des responsables PPP ont évoqué la possibilité qu'il soit remplacé rapidement par un autre cadre du parti pour éviter une grave crise avec la justice et une paralysie du pouvoir.

Ce verdict affaiblit le président Zardari, au pouvoir depuis 2008 et la fin du régime militaire, et pourrait selon certains observateurs entraîner des élections législatives anticipées avant le début de 2013, date prévue du prochain scrutin.

Il renforce en tout cas l'incertitude politique et la fragilité d'un gouvernement déjà aux prises avec une violente rébellion islamiste, menée par les talibans alliés à Al-Qaïda, et une grave crise économique, dans un pays où près d'un quart des quelque 180 millions d'habitants vivent sous le seuil de pauvreté.

"Yousuf Raza Gilani est destitué de son rang de parlementaire" à partir du 26 avril, date de sa condamnation, a annoncé dans l'après-midi le président de la Cour Suprême, le juge Iftikhar Muhammad Chaudhry, en lisant l'arrêt de la cour.

"Il cesse également après la même date d'être Premier ministre du Pakistan, et ce poste doit être considéré comme vacant", a-t-il ajouté.

"La Commission électorale devra notifier officiellement cette destitution" et "le président devra prendre les mesures nécessaires pour assurer la continuité du processus démocratique", notamment l'élection d'un nouveau Premier ministre, a-t-il ajouté.

Une première historique

M. Gilani est le premier Premier ministre en exercice à avoir été ainsi condamné dans l'histoire du Pakistan, né en 1947 de la partition de l'empire britannique des Indes.

Aux termes de la Constitution pakistanaise, une personne reconnue coupable d'avoir porté atteinte à l'honneur de la justice peut être empêchée de siéger au Parlement, condition sine qua non pour être Premier ministre.

La Cour suprême réclame la réouverture de poursuites contre le président Zardari pour des détournements présumés de fonds publics de l'ordre de 12 millions de dollars en compagnie de son épouse Benazir Bhutto alors qu'elle était Premier ministre (1988-90 et 1993-96) et lui un de ses ministres.

En 2003, un tribunal suisse les avait reconnus coupables de blanchiment en première instance, mais le couple avait fait appel.

Après la mort de sa femme, tuée dans un attentat en décembre 2007, M. Zardari est devenu président l'année suivante. En 2010, le procureur de Genève avait estimé qu'il ne pourrait rouvrir le dossier tant qu'il serait chef de l'Etat en raison de son immunité.

Malgré les demandes répétées de la Cour suprême, M. Gilani a jusqu'ici refusé de demander la réouverture des poursuites aux Suisses, arguant lui aussi de cette immunité. Devant ces refus, la Cour l'a inculpé d'outrage fin février, puis condamné symboliquement en avril.

Les soubresauts politiques du Pakistan sont suivis de près par les puissance occidentales, à commencer par les Etats-Unis, parce qu'il est la seule puissance militaire nucléaire du monde musulman, et l'un des sanctuaires de puissants réseaux islamistes, dont Al-Qaïda.

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