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La scène musicale birmane est en ébullition

Tenues délirantes et voix de diva, beaucoup l'appellent la Lady Gaga birmane. Mais cette trentenaire est une des rares stars d'une scène musicale étouffée par des décennies d'isolement, qui continue de survivre avec de pâles copies en série de tubes étrangers.[AFP]

Tenues délirantes et voix de diva, beaucoup l'appellent la Lady Gaga birmane. Mais cette trentenaire est une des rares stars d'une scène musicale étouffée par des décennies d'isolement, qui continue de survivre avec de pâles copies en série de tubes étrangers.

Phyu Phyu Kyaw Thein, qui reprend en birman des titres comme "You Give Love A Bad Name" du groupe américain Bon Jovi, est connue pour ses masques à plumes et ses robes à paillettes.

Mais la chanteuse rejette la comparaison avec la pop-star américaine, rappelant qu'elle choquait déjà ses fans avec ses costumes extravagants bien avant que Lady Gaga ne soit connue. "Désolée, mais c'est la vérité", insiste-t-elle en riant.

Et sa garde-robe est malgré tout bien plus sage, évitant les décolletés plongeants et les jupes trop courtes, dans le respect des valeurs traditionnelles de son pays.

Copie ou pas, elle est "ravie d'avoir changé la vie de millions de personnes". "J'ai pu les rendre heureux", se réjouit cette médecin de formation, qui décrit la vie sous l'ancienne junte comme "un enfermement dans une grotte sombre et froide".

Toute la scène pop birmane est à son image, asphyxiée par le piratage et par une censure implacable qui contrôlait tout, des paroles jusqu'aux costumes. Et dominée par les reprises, de Céline Dion à Rod Stewart, avec des paroles souvent sans lien avec l'original.

Mais les réformes entamées après la dissolution de la junte il y a un an laissent entrevoir un nouveau souffle. Les fans de musique peuvent désormais accéder à YouTube, même s'ils continuent surtout à acheter CD et DVD pirates dans les rues.

Les autorités ont promis une révision des lois sur les droits d'auteur pour les aligner sur les normes internationales. Ce qui pourrait obliger les artistes birmans à devoir obtenir la permission des compositeurs avant d'adapter leurs titres.

Sang neuf

Même si elle devrait changer radicalement son répertoire, Phyu Phyu Kyaw Thein y voit un moyen de protéger ses propres albums, constamment piratés, et de soutenir "les créations originales et les artistes au sang neuf".

Car le piratage généralisé fait qu'"il n'y a pas de producteurs prêts à soutenir des groupes", souligne Douglas Long, en charge de la rubrique culture de l'hebdomadaire anglophone Myanmar Times, plaidant pour "un système qui permette aux groupes de créer plus facilement une scène alternative".

Les "Me N Ma Girls", cinq filles qui écrivent leurs propres chansons en birman et en anglais, essaient de se forger une identité, même si gestuelles et gimmicks semblent venir tout droit des scènes anglo-saxonnes.

"S'il y a des problèmes de droits d'auteur, elles ne pourront jamais sortir du pays", note leur manager australienne Nikki May, qui souligne que la prise de conscience de cette question est toute nouvelle dans le pays.

Le groupe profite en tout cas de l'allègement de la censure. Leur dernier titre appelle la diaspora birmane à rentrer au pays. Et elles ont été les premières autorisées à porter des perruques de couleur dans leurs vidéos-clips.

Mais le chemin est encore long. Le simple fait de pouvoir se produire sur scène est difficile dans un pays où les femmes qui jouent dans les bars sont assimilées aux travailleuses du sexe. Les garçons ne sont pas forcément mieux servis, les lieux de concerts sont de toutes façons très limités.

"Il y a beaucoup de nouveaux groupes qui attendent de pouvoir jouer", regrette Darko C, chanteur de Side Effect, qui puise son inspiration dans la légende du grunge Nirvana.

Son groupe a récemment fait les gros titres lorsqu'un site internet américain, craignant de violer les sanctions économiques, a refusé de lui envoyer près de 3.000 dollars récoltés en ligne pour produire son premier album.

Side Effect, dont le batteur s'entraîne chez lui sur des piles de livres à défaut d'avoir une batterie, est rarement payé pour un concert. Darko C assure malgré tout qu'ils continueront à jouer "avec le coeur".

Avant de lancer un défi aux stars des reprises. "Vous avez une super voix, mais nous n'êtes ni Shakira, ni Lady Gaga, ni Jon Bon Jovi, ni Green Day. Qui êtes-vous ? Montrez-moi ce que vous valez!".

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