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Dans l'atelier de Patrick Roger, chocolatier et sculpteur

Le chocolatier Patrick Roger dans son atelier à Paris le 24 juillet 2012[AFP]

Ses orangs-outangs et ses hippopotames en chocolat grandeur nature, auraient leur place au musée du quai Branly: figure rebelle de la chocolaterie contemporaine, Patrick Roger a fait du chocolat son mode d'expression au service des espèces en voie de disparition.

"Les grands singes nous parlent. Si on ne comprend pas qu'il faut les aider, c'est foutu !", lâche ce grand échalas de 44 ans, en effleurant la paume de "Juliette", femelle orang-outang en chocolat qu'il a sculptée et qui trône au frais, auprès d'autres congénères cacaotés, dans son atelier de Sceaux, au sud de Paris.

"Mais les maux de la terre n'intéressent pas grand monde", ajoute-t-il, écarquillant ses yeux clairs, emplis d'une curiosité inquiète qui maintient en tension son visage poupon, encadré d'une barbe indisciplinée.

En cette chaude journée d'été, il surveille le bourdonnement des abeilles au-dessus des ruches installées dans son jardin et sur le toit de la chocolaterie dont il arpente, résolu, l'espace aménagé sur mesure, en sabots blancs et tenue de Meilleur ouvrier de France.

"Il n'y aura pas beaucoup de miel cette année mais il y aura autre chose forcément car la nature est très forte si on la laisse vivre", commente-t-il en rabattant une mèche de cheveux, échappée de sa queue de cheval. "Sans ce jardin, sans la nature, il n'y a pas de création possible pour moi", ajoute-t-il.

Des reproductions en bronze d'oeuvres plus abstraites de ce sculpteur hors pair, toutes en strates verticales, surgissent au milieu des herbes folles et des fleurs. S'émerveillant de cette vie qui bruisse, il constate "le manque d'eau", et parle des "16 hippopotames qu'il a fait jaillir d'un bloc de chocolat de 4 tonnes, 7,80 mètres de long et 2,40 de large" dans l'ancienne imprimerie, transformée en chocolaterie ultra-design et en atelier.

Matière

Désolidarisés de leur "mare" originelle en chocolat, ils sont exposés dans ses boutiques à Paris.

A Sceaux, épaulé par une dizaine de personnes, Patrick Roger fabrique six millions de chocolats-bonbons par an. Il sculpte, en parallèle, ses "désirs les plus fous" avec des machines "bricolées", des couteaux, spatules, et ses mains.

Il a grandi dans le Perche, au contact des arbres, qu'il vénère, de ses parents, puis d'un maître d'apprentissage pâtissier "ultra-exigeant": ils lui ont transmis, dit-il, "le goût et une force de travail".

Faux dilettante, placé en apprentissage en troisième, Patrick Roger confesse sans coquetterie son "côté pointilleux". Auprès de lui, son assistant, Stefano Casadio, formé chez le chef Pierre Gagnaire, avoue avoir "attrapé le virus du perfectionnisme".

C'est pour s'acheter sa première moto, une passion qui ne l'a pas quitté, que Patrick Roger fabrique à 16 ans son premier chocolat sur la table de la cuisine familiale et en 1997, la chance lui sourit: il achète à crédit "grâce à une banquière et un notaire qui croient en (lui)", un magasin à Sceaux.

La visite d'une fonderie d'art lui donne alors l'envie de sculpter avec du chocolat. Ses voyages, en Colombie, au Venezuela ou en Afrique l'inspirent.

Dans les étages de sa chocolaterie, il a dédié un espace-musée à celles de ses oeuvres reproduites en bronze.

"Ce qui m'intéresse le plus c'est la matière et l'humain", explique-t-il. "C'est une matière instable, ce n'est pas moi qui vient à elle, c'est elle qui vient à moi", ajoute-t-il, en révélant une oeuvre en cours de réalisation: un arbre exotique de plusieurs mètres.

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