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Peinture: le Centre Pompidou déplie Simon Hantaï et la couleur fuse

Une oeuvre de Simon Hantaï exposée le 21 mai 2013 au Centre Pompidou qui lui consacre une vaste rétrospective [Joel Saget / AFP] Une oeuvre de Simon Hantaï exposée le 21 mai 2013 au Centre Pompidou qui lui consacre une vaste rétrospective [Joel Saget / AFP]

Cinq ans après la disparition du peintre Simon Hantaï, le Centre Pompidou consacre une grande rétrospective à cet artiste français d'origine hongroise, qui pliait et froissait les toiles pour en faire jaillir la couleur.

L'exposition qui se tient jusqu'au 2 septembre est la première de grande ampleur depuis plus de 35 ans consacrée à cette figure de l'abstraction en France.

Après avoir représenté la France à la Biennale de Venise en 1982, "le peintre n'a plus voulu exposer et s'est volontairement mis en retrait du monde de l'art", rappelle Alfred Pacquement, directeur du musée national d'Art moderne et commissaire de l'exposition. L'artiste n'est plus apparu que ponctuellement lorsqu'il a fait des donations de certaines de ses oeuvres au musée d'Art moderne de la Ville de Paris et au Centre Pompidou.

L'exposition, éblouissante, déploie plus de 130 peintures, la plupart de très grand format. Elles sont présentées de façon chronologique, de 1949 jusqu'aux années 1990.

Une oeuvre de Simon Hantaï de la série des Tabulas, exposée le 21 mai 2013, au Centre Pompidou [Joel Saget / AFP]
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Une oeuvre de Simon Hantaï de la série des Tabulas, exposée le 21 mai 2013, au Centre Pompidou

Né dans un village hongrois en 1922, dans une famille de paysans catholiques souabes, le jeune homme étudie à l'école des Beaux-Arts de Budapest. Il y rencontre en 1945 Zsuzsa, une jeune étudiante juive qui deviendra sa femme.

Ayant reçu une bourse (jamais versée) pour la France, Hantaï et son épouse quittent la Hongrie en 1948. Le couple visite l'Italie puis arrive à Paris, sans un sou.

Un jour de 1952, Hantaï dépose une petite oeuvre devant la porte d'André Breton. Le poète décide de l'exposer. Le peintre entre dans le groupe des surréalistes qu'il quittera trois ans plus tard.

Ayant découvert Jackson Pollock, Hantaï se tourne vers l'abstraction gestuelle. Il peint rapidement, racle la peinture avec un morceau de réveille-matin: cela donne "Sexe-Prime" (1955).

En "aveugle"

Intellectuel, le peintre consacre l'année 1959 à deux toiles monumentales, qu'il travaille simultanément. Le matin, il réalise "Ecriture rose", couvrant la toile de textes religieux et philosophiques, superposant les encres, le rose finissant par émerger sans jamais avoir été utilisé comme couleur. L'après-midi, il passe à "A Galla Placidia", en référence au mausolée de Ravenne.

Deux oeuvres -"Ecriture rose" (g) and "A Galla Placidia" (d)- de Simon Hantaï exposées le 21 mai 2013 au Centre Pompidou à Paris [Joel Saget / AFP]
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Deux oeuvres -"Ecriture rose" (g) and "A Galla Placidia" (d)- de Simon Hantaï exposées le 21 mai 2013 au Centre Pompidou à Paris

Dans les années 1960, l'artiste change de "méthode" et se tourne vers le pliage. La toile est froissée, pliée, roulée, puis recouverte de peinture souvent monochrome.

"Hantaï disait peindre comme un aveugle, sans voir ce qu'allait donner le résultat final", souligne M. Pacquement. La toile était ensuite déployée, tendue et l'oeuvre se découvrait.

L'écrivain Dominique Fourcade, co-commissaire de l'exposition, qui, comme M. Pacquement, a bien connu l'artiste, se souvient avec émotion de la façon dont l'artiste concevait ses "Tabulas", grands tableaux des années 1970. Réalisés avec une technique de noeuds placés à intervalles réguliers, ils se présentent comme un quadrillage de rectangles monochromes.

"Les toiles étaient si grandes qu'Hantaï ne pouvait pas les défaire tout seul. Il attendait le retour de ses enfants, ou à défaut des visiteurs. Chacun tirait. C'était comme une détonation, une explosion de lumière et de couleur".

L'innovation a ses revers: en 1982, les "Tabulas Lilas", pliages en blanc sur blanc, peints sur de la toile à drap non préparée parviennent à produire une lumière lilas diffuse et mystérieuse. Ils sont présentés au mur et au sol dans la galerie Jean Fournier à Paris. "C'était divin", se souvient M. Fourcade. Las, en un mois et demi, la lumière du jour avait fait jaunir de façon irréversible les toiles. Il n'en reste qu'une en bon état, que la famille Hantaï a accepté de prêter sous des conditions d'éclairage protectrices.

A 60 ans, Hantaï se retire et cesse peu à peu de peindre. L'exposition s'achève sur un humble petit "Pliage à usage domestique" (1990), fait de salissures sur un chiffon...

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