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La semaine de Philippe Labro : Une planète en danger, un peuple abandonné

La fonte des glaciers à très haute vitesse illustre de manière plus qu’inquiétante la nécessité d’agir pour le climat.[WALTER DIAZ / AFP]

Philippe Labro est écrivain, cinéaste et journaliste. Chaque vendredi, pour CNEWS, il commente ce qu'il a vu, vécu et observé pendant la semaine. Un bloc-notes subjectif et libre.

MARDI 9 AVRIL

Ils sont 215 000 dans le monde, et ils sont, en ce jour, les véritables stars de l’actualité. Plus encore que les imbroglios du Brexit, les attentes de la synthèse du grand débat national, les élections en Israël, la rue algérienne qui ne désemplit pas, les quarts de finale de la Ligue des champions, plus que tout, aujourd’hui, ce sont eux les vrais sujets de préoccupation : les glaciers. D’un seul coup, on ne parle que d’eux. C’est une étude, publiée hier dans la très sérieuse revue Nature, qui a déclenché cette médiatisation généralisée. Cette publication scientifique hebdomadaire de référence, lancée en 1869 par un Britannique, Joseph Norman Lockyer, est devenue, depuis fort longtemps déjà, une revue unanimement respectée. 

Lorsque Nature vient, cette semaine, révéler de nouvelles statistiques sur la fonte des glaciers, on éprouve une véritable frayeur : 335 milliards de tonnes de glace perdue, chaque année, entre 2006 et 2016. En un demi-siècle, 9 600 milliards ! Les glaciologues, profession désormais courtisée des médias – «Trouvez-moi un glaciologue pour le journal de 20 h, et vite !» –, soulignent l’effet le plus inquiétant de cette fonte universelle : la montée du niveau de la mer, ou plutôt, de toutes les mers, tous les océans (2,7 mm par an).

Lorsque j’écris «inquiétant», c’est une mauvaise blague. Le terme n’est pas assez puissant. C’est plus qu’une inquiétude, cette affaire, c’est le destin de notre planète, celui de nos enfants et petits-enfants. J’avais vu, lors d’un voyage en Patagonie, ces admirables masses de glace blanche striée de bleu, ces monuments que notre confrère du Monde nomme «les sentinelles du climat». Leur beauté m’avait subjugué. Surprenant, ce bleu, irréel, alors que je m’attendais à du blanc immaculé. Cette architecture, cette structure, ces paysages, cela était-il donc condamné à disparaître ? Il ne se passe plus un jour sans que la question ne se pose à ce qu’on appelle, inutilement, la «communauté internationale». Ils savent, bien sûr. Ils ont lu Nature, bien sûr. Ils se réunissent régulièrement pour faire le point, exiger des mesures, bien sûr. Mais cela suffit-il ? Bien sûr que non !

MERCREDI 10 AVRIL

«America». Le numéro 9 de la remarquable revue America vient de paraître, et il est presque entièrement consacré à l’Amérique indienne, celle qui, comme l’écrit le créateur de cette publication, François Busnel, «a été mutilée mais n’est pas encore annihilée». A peine sortie en kiosque, America doit être réimprimée. Il existe, désormais, bien ancré dans l’activité culturelle française, un appétit pour les textes longs, fouillés, inventifs. On trouve, dans ce neuvième numéro, non seulement un passionnant dossier sur les Indiens, mais aussi des chroniques que j’aime lire chaque trimestre : l’analyse d’un chef-d’œuvre (en l’occurrence, Gatsby le Magnifique de Francis Scott Fitzgerald), celle d’un film culte (cette fois-ci, Conversation secrète de Francis Ford Coppola, Palme d’or à Cannes en 1974), et une digression sur une autre œuvre culte (la série Les Soprano). Tout ceci est illustré et mis en page avec un talent fou.

L’humour politique. Le prix est revenu cette année au Premier ministre Edouard Philippe. Lorsqu’on lui demande si «tout remonte à Matignon», il répond, avec ce flegme quasi anglo-saxon qui, jusqu’ici, à l’Assemblée nationale ou ailleurs, lui a souvent servi d’armure : «Non. Seulement les emmerdes.» Je ne fais que reproduire ce mot déjà rapporté dans toute la presse, simplement parce que je crois, comme beau­coup, qu’une journée sans rire est une journée perdue.

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