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Manga : Team Phoenix rend un hommage super-héroïque à Osamu Tezuka

A la manière de Walt Disney, Osamu Tezuka est sans doute l'un des auteurs qui a le plus influencé des générations de dessinateurs. Ce vendredi 21 janvier, les éditions Vega-Dupuis lui rendent hommage avec Team Phoenix.

Une BD chorale qui réunit les dizaines de personnages créés par celui que l'on surnomme le Dieu du Manga. Après s'être construit une solide réputation avec son style graphique très dynamique à la croisée du comics, du manga et de l'école franco-belge, c'est l'espagnol Kenny Ruiz qui réalise ici un rêve d'enfance. L'auteur de Télémaque et Magic 7 (édités chez Dupuis) livre à CNEWS ses impressions sur cette aventure qui le mène non seulement à être édité en France, mais aussi directement au Japon avec la bénédiction de Makoto Tezuka, le fils d'Osamu Tezuka (1928-1989), qui veille sur l'héritage de son père.

Et à la lecture de ce tout premier tome, on ne peut qu'applaudir ce bel hommage qui donne à voir une guerre engagée entre les défenseurs de l'humanité et les robots déçus par le genre humain. Comme savait très bien le faire Osamu Tezuka en son temps, ici rien n'est manichéen et les motivations de chaque camp sont développées. Surtout, Kenny Ruiz laisse place à l'action dans ce que l'on peut apparenter à un épisode d'Avengers réunissant les héros et héroïnes du maître japonais. Princesse Saphir, Léo, Black Jack, Gesicht ou encore Atlas se retrouvent notamment dans ce premier tome explosif.

CNEWS : Quand avez-vous découvert l’univers d’Osamu Tezuka ?

Kenny Ruiz : Je l'ai découvert lorsque j'étais vraiment petit. La télévision espagnole diffusaient plusieurs animes tirés de l'univers de Tezuka. Mais à cette époque, je ne savais pas que ces personnages faisaient partie de l'univers d'un grand auteur de mangas. La légende de Songoku [NDR pas celui de Dragon Ball], Princesse Saphir, Le Roi Léo (Kimba l'Empereur de la jungle en Espagne) et Astro Le Petit Robot... Tout cela je l'ai découvert sans savoir qu'ils avaient été créés par un seul auteur. C'est seulement quand je suis devenu adulte et auteur de BD que j'ai découvert l'univers fascinant d'Osamu Tezuka et toute sa puissance créative.

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Comment le projet Team Phoenix est-il né ? Rendre hommage à Osamu Tezuka n’est sans doute pas un exercice facile, comment l'avez-vous vécu ?

J'ai été mis en relation avec Frédéric Toutlemonde, qui édite des mangas, et Tezuka Production, qui gère les droits des œuvres d'Osamu Tezuka, afin de réfléchir à une histoire courte qui devait porter notamment sur la légende de Songoku, et puis il fallait se lancer dans un défi plus grand, celui de faire une histoire capable de réunir tous les personnages. Pour moi, le seul moyen de relever ce challenge était de s'inspirer d'Avengers et de Star Wars. On m'a dit «ok», mais j'avoue que j'étais quand même terrorisé. Car j'estimais qu'il était très difficile d'y arriver, mais c'est aussi passionnant.

A-t-il été simple d’attribuer un rôle à chacun de ces personnages ? Et pourquoi avoir choisi de mettre en avant Princesse Saphir plutôt qu’un autre ?

Ça n'a pas été simple du tout ! Il faut savoir que ce sont tous des personnages iconiques qui ont eu droit chacun à leur propre manga. Surtout, tous sont très originaux et authentiques. Mais au final, ça fonctionne très bien. Il y avait plein d'options pour développer les personnages. J'ai travaillé sur eux quand même à l'instinct, car je voulais dessiner les différents protagonistes en développant ma manière de faire, trouver des sensations et les exprimer.

J'ai choisi Princesse Saphir car c'est une héroïne que j'aime bien et que je voulais mettre au cœur de l'intrigue, et qu'elle soit partagée entre les deux vérités défendues par chaque camp. J'aime que ce soit une fille qui veut connaître la vérité. Mais la situation politique la divise, ce qui permet de développer un conflit intéressant à mon avis. J'aime également beaucoup son aspect visuel qui mélange un côté traditionnel hérité du Moyen Âge et la science fiction futuriste. Elle a un côté cool. J'aime les personnages comme Albator ou Ulysse 31, où justement il y a ce mélange entre une mode ancienne et future. Ils paraissent différents, mais apportent en fait quelque chose de neuf.

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© 2022 Kenny Ruiz/Tezuka Productions

Avez-vous un personnage préféré dans cet univers ? 

C'est compliqué car je crois que je les aime tous beaucoup. Mais j'avoue que j'aime particulière Gesicht, car j'ai beaucoup aimé ce que Naoki Urasawa en a fait dans son manga Pluto (édité en France chez Kana), mais aussi celle proposée par Katsuhiro Otomo et Rintaro dans le film Metropolis (2001). C'est un personnage intéressant. J'apprécie également beaucoup Hyakkimaru, le héros de Dororo, qui s'inscrit dans l'univers des samouraïs, que j'adore, tout comme son côté mystérieux. Mais, princesse Saphir reste aussi très intéressante, car c'est avec elle que je passe le plus de temps à dessiner puisqu'elle est au cœur de l'intrigue.

Votre dessin est extrêmement dynamique, moderne et où se mêlent les influences du comics et du manga. Pouvez-vous nous expliquer ce que vous avez recherché dans Team Phoenix ?

L'avantage de vivre en Espagne, c'est que l'on peut lire aussi bien des comics américains, que des BD européennes et des mangas japonais. Quand j'était petit, je lisais de tout. Donc, pour moi, ce mélange est naturel. Ce que j'aime avec Team Phoenix, c'est finalement de regrouper ces influences tout en étant le plus synthétique possible, car le style de Tezuka est très efficace. Il démontre qu'avec peu de choses, peu de dessins, on peut finalement en dire beaucoup. Je m'efforce donc de suivre ce conseil, c'est un exercice différent des productions que j'ai pu réaliser pour Dupuis sur des BD.

Combien de temps faut-il pour réaliser un tome de Team Phoenix ?

Pour suivre le rythme de Team Phoenix, je dois produire 40 pages par mois, donc réaliser un tome complet nécessite quatre à cinq mois de travail. En outre, il faut tenir compte des étapes de validation avec l'éditeur et les ayants-droits japonais. Parfois, sur certains chapitres je dois faire cinq à sept versions différentes. Actuellement, je suis en train de boucler le tome 2 qui contiendra 186 pages, et j'enchaînerai avec le tome 3.

Makoto Tezuka m'a expliqué que je devais transmettre un message optimiste, de paix et écologiste, comme le faisait son père.

D'ailleurs, comment se passe votre collaboration avec les ayant-droits japonais et Makoto Tezuka ? Avez-vous des règles particulières à respecter ?

Avec Frédéric Toutlemonde, il a fallu se lancer dans de nombreuses négociations en amont de ce projet. Je devais bien sûr transmettre aux ayants-droits toutes mes propositions et ensuite tenir compte de l'ensemble des retours qu'ils m'ont faits. Il y a également beaucoup de règles qui encadrent l'usage des personnages d'Osamu Tezuka. Il fallait conserver leur look et j'avais des retours pour m'indiquer comment parfaire leurs expressions, les dialogues, etc.

Mais surtout, Makoto Tezuka m'a expliqué que je devais respecter une règle importante : «transmettre un message optimiste, de paix et écologiste», comme le faisait son père. Au début, il n'avait pas apprécié l'histoire de Team Phoenix qui prend place dans une guerre. Mais je lui ai expliqué que l'idée de Team Phoenix est justement de ramener la paix et la liberté. Et là, j'ai obtenu son aval, car Makoto veut qu'il y ait un message positif et porteur d'espoir.

Et verra-t-on Astro (Atom) dans les prochains tomes ?

Bien sûr, vous allez voir Astro prochainement ! Toutefois son but ne sera pas clair et je ne sais pas s'il sera du côté de la Team Phoenix ou pas. Je ne le voyais pas comme un personnage principal, mais plutôt comme faisant partie de cet univers. Pour tout vous dire, c'est un choix de ma part, car je pense que si j'avais dessiné Astro dès le début dans cette histoire, les fans auraient pu croire qu'il s'agissait d'une nouvelle histoire portant sur lui. Je voulais donc qu'on comprenne bien qu'il s'agit de l'histoire d'une équipe et que tous les personnages ont la même importance. Je voulais que des personnages moins connus qu'Astro mais qui sont géniaux, comme Black Jack ou Kaos, aient leur importance. Mais je vous rassure Astro sera là, ce serait un non sens de ne pas le mettre dans l'unviers d'Osamu Tezuka. Les fans me tueraient sinon !

A part ceux de Tezuka, y a-t-il d'autres personnages de l'univers des mangas que vous aimeriez dessiner ?

D'abord, je précise tout de même que j'adore créer mes propres personnages. Mais, je dois confier que j'adorerais dessiner un jour quelque chose autour de Saint Seiya (Les Chevaliers du Zodiaque), car c'est mon anime favori, mais aussi celui de Frédéric Toutlemonde. Il y a beaucoup de spin-off autour de la série de Masami Kurumada et je rêve de pouvoir réaliser un jour ne serait-ce qu'un petit chapitre ou spin-off de Saint Seiya. Mais je me fais beaucoup d'illusions !

Team Phoenix, de Kenny Ruiz, éd. Vega-Dupuis, tome 1 disponible.

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