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«Revoir Paris», «Novembre», «Vous n’aurez pas ma haine» : quand le cinéma parle des attentats du 13-Novembre

Trois films forts et nécessaires pour ne pas oublier. [© Pathé Distribution/David Koskas/TOBIS Film GmbH]

Le drame bouleversant «Revoir Paris» d'Alice Winocour, le thriller haletant «Novembre» de Cédric Jimenez avec Jean Dujardin, ou encore «Vous n'aurez pas ma haine» adapté du livre d'Antoine Leiris... Le cinéma s'intéresse en cette fin d'année aux attentats du 13 novembre 2015. Que ce soit du point de vue des survivants, des proches ou de la police, le traumatisme étant universel.

13 novembre 2015 : le choc, la peur, la sidération. Paris et Saint-Denis sont la cible d’attentats terroristes, faisant 130 morts et des centaines de blessés. Sept ans après le drame, et alors que le procès de Salah Abdeslam et de ses coaccusés s’est achevé il y a quelques semaines après dix mois d’audience, le 7e art essaie, à travers les images et les mots, de raconter l’indicible. Chacun a sa manière.

Dans «Revoir Paris», sélectionné cette année à la Quinzaine des Réalisateurs au 75e Festival de Cannes et sorti le 7 septembre, Alice Winocour braque sa caméra sur les survivants, et plus particulièrement sur Mia, incarnée par la troublante et lumineuse Virginie Efira. Le soir de l’attaque, la jeune femme, motarde, s’était réfugiée dans une brasserie parisienne en attendant que l’orage passe, tandis que Thomas (Benoît Magimel) fêtait son anniversaire, entouré de ses collègues. En une fraction de seconde, Mia se retrouve à plat ventre au milieu des corps, alors que les assaillants, dont on ne voit que les pieds, sont à l’affût du moindre geste, le doigt sur leur mitraillette. Les mois passent, et le trauma est là. Cette rescapée ne se souvient plus de rien. Alors elle tente de reconstituer le puzzle de cette soirée tragique en revenant sur les lieux avec un groupe de parole. C’est là que Mia va croiser le regard de Thomas qui, lui, n’a rien oublié, et va l’aider dans sa quête de reconstruction, dans sa soif de (re)vivre.

«Mon frère était au Bataclan, confie la cinéaste qui a imaginé un attentat fictif pour servir son histoire. Pendant qu’il était caché, je suis restée en lien sms avec lui une partie de la nuit. (…) Le film s’est construit à partir des souvenirs de cet événement traumatique, puis à partir du récit de mon frère dans les jours suivant l’attaque. J’ai expérimenté sur moi-même comment la mémoire déconstruisait, et bien souvent reconstruisait les événements».

La volonté de filmer les attentats «hors champ»

Présenté lui aussi hors compétition à Cannes, «Novembre» de Cédric Jimenez («Bac Nord»), dévoilé le 5 octobre et qui a dépassé le million d'entrées, aborde de son côté ce sujet sensible du point de vue des forces de l’ordre. Car le scénariste Olivier Demangel a souhaité, comme il l’expliquait sur la Croisette à l’AFP, «raconter l'onde de choc» après la tragédie, «ce moment où les services publics se mobilisent pour que la société tienne bon». Porté par Jean Dujardin, Anaïs Demoustier et Sandrine Kiberlain, ce thriller reconstitue la traque de cinq jours menée par les équipes de la sous-direction antiterroriste de la police judiciaire pour identifier et neutraliser les deux terroristes islamistes en cavale, Abdelhamid Abaaoud et son complice Chakib Akrouh.

Comme dans «Revoir Paris», l’objectif de ce long-métrage n’est pas de montrer ces attentats, mais au contraire de les filmer «hors champ». Le danger est là, la tension est palpable, mais jamais les fusillades ne sont visibles à l’écran. «J’aurais trouvé cela obscène. Ce qui m’a plu c’est que c’était le contre point de vue. On ne mettait pas en scène les attentats, ni les victimes», explique Cédric Jimenez dans les notes de production. 

Revenir sur ces faits sans jamais tomber dans le sensationnalisme. Filmer avec pudeur ces êtres en détresse. Si la réalisatrice Alice Winocour met en scène les séquelles psychologiques et physiques des rescapés, qui culpabilisent souvent d’être encore vivants, le drame «Vous n’aurez pas ma haine», en salles le 2 novembre, s’attarde davantage sur la souffrance des proches, ceux qui ont perdu ce soir du 13 novembre 2015 un frère, une mère, un copain ou une femme, comme ce fut le cas pour Antoine Leiris. L’histoire de ce journaliste, incarné par Pierre Deladonchamps, a donné lieu à un livre dont ont été adaptés une pièce de théâtre, puis ce film signé par l'Allemand Kilian Riedhof, qui adopte «le point de vue d'un ami empathique», et refusa de «donner aux agresseurs plus d'espace que nécessaire».

Alors qu’il donnait le bain à son petit Melvil de 17 mois, Antoine Lieris a vu sa femme Hélène (Camélia Jordana) partir au concert des Eagles of Death Metal au Bataclan, sans se douter qu’il ne la reverrait plus. Là, dans l'encadrure de la porte, elle lui disait adieu sans le savoir. Trois jours après les attentats, cet homme dévasté mais digne a publié une lettre ouverte sur Facebook, intitulée «Vous n’aurez pas ma haine». Le texte sera partagé des milliers de fois en seulement quelques heures, et repris par le quotidien Le Monde. Mais si le monde entier le hisse à cette époque au rang de «héros», Antoine Leiris tente, lui, de faire son deuil tant bien que mal et de survivre pour son fils. Car comme il l’a écrit aux terroristes qui lui ont volé «l’amour de sa vie» : «Tous les jours et toute sa vie ce petit garçon vous fera l’affront d’être heureux et libre». Sans colère, ni haine. Pour laisser entrer le bonheur de nouveau dans sa vie.  

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