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La semaine de Philippe Labro : la folie des hommes, la sagesse d'une reine

Sam Mendes, le réalisateur de «1917».[TOLGA AKMEN / AFP]

Philippe Labro est écrivain, cinéaste et journaliste. Chaque vendredi, pour CNEWS, il commente ce qu'il a vu, vécu et observé pendant la semaine. Un bloc-notes subjectif et libre.

MERCREDI 15 JANVIER

C’est le jour de 1917. On ne parle que de ce film, qui sort aujourd’hui en salles, précédé d’un marketing médiatique de haut calibre, bien orchestré et maîtrisé – si vous n’en avez pas entendu parler, c’est que vous ne lisez aucun journal, n’écoutez aucune radio, ne regardez aucune chaîne de télé.

Il est vrai que vous avez plus difficile à faire : gérer votre vie quotidienne, surtout si vous êtes francilien – en raison de la grève des transports, des manifestations, du suffoquant désordre de la circulation automobile, des équipées sauvages de «trottinetteurs» dépourvus de tout sens civique et de cyclistes, eux aussi, légèrement adverses du feu rouge ou du sens interdit. On assiste, depuis plus de quarante jours, à une obligation de transformer, modifier, subir, sans se résigner, faire face, se débrouiller. Je ne cesse d’admirer ce qu’on appelle aujourd’hui la résilience des femmes et des hommes qui, bon gré mal gré, tentent chaque jour de se rendre à leur travail. Toutes et tous vivent un hiver sans sourire, une saison sans brillance. Ce n’est pas le désespoir, non, c’est plutôt la lassitude, compensée par du courage et de la persévérance.

Revenons à 1917. Il s’agit d’un film qui, au fond, repose sur le schéma éternel des grands westerns de John Ford : une mission donnée pour aller quelque part, faire quelque chose, afin de sauver quelqu’un. En l’occurrence, deux fantassins britanniques doivent traverser le territoire ennemi, en pleine guerre de 14-18, afin de transmettre un message qui évitera à un bataillon ami d’être victime d’un piège organisé par les forces allemandes. Nous allons suivre (ou précéder, selon la position des caméras) ces deux personnages aux visages enfantins dans leur parcours jalonné de surprises, de violences, d’accidents, d’erreurs, de mini-miracles, de moments de frayeur et parfois de rédemption et de beauté. On va beaucoup vous parler de la technique, qui a permis au réalisateur Sam Mendes, au grand talent et au grand palmarès, de donner la sensation que cette odyssée est filmée en un seul plan. Bon, très bien, d’accord, c’est une prouesse éblouissante de savoir-faire et d’utilisation des moyens les plus sophistiqués, mais l’essentiel n’est pas là. Ce qui demeure, ce qui vous impressionne, vous émeut, vous angoisse et vous tient cloué à votre siège c’est tout autre chose. Premièrement, un scénario structuré. Deuxièmement, une distribution des rôles sans faille. Il faut retenir les noms des deux acteurs incarnant le binôme de fantassins, plus humains et plus crédibles que jamais : George MacKay et Dean-Charles Chapman. Troisièmement, la beauté de la photographie, le choix des paysages, cette désolation sans limites, ces tranchées et ces étendues vides, d’où l’on sait que peut surgir la mort, la description de la boucherie que fut cette guerre, la brume et le soleil, le feu, la soudaine apparition de la tendresse et de l’harmonie. Bref, une sorte de chef-d’œuvre.

JEUDI 16 JANVIER

La reine Elizabeth II a tranché. Elle accorde son indulgence au couple Harry et Meghan. Elle accepte leur choix. Derrière cette histoire vraie, digne de la série The Crown, on devine la sagesse d’une reine qui veut préserver l’institution et a saisi qu’elle ne pouvait souffrir d’une nouvelle crise à la Diana. Mais il y a aussi un autre élément, et cela transpire : la presse britannique et une partie de l’establishment ont, sans doute, fait preuve d’une sorte de racisme à l’égard de la jeune métisse américaine. Et ça, c’était inacceptable. La vieille et sage Elizabeth l’a compris. Ce n’est pas aussi superficiel que cela, cette affaire, même si cela fait du «buzz» dans la presse people. Ça ne change pas la face du monde, certes, mais c’est instructif. La leçon est bonne : il faut savoir négocier, écouter, comprendre, et ensuite, décider. Suivez mon regard.

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