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Le chômage, fléau d'une génération grecque sacrifiée

De jeunes chômeurs attendent devant une agence pour l'emploi à Athènes, le 22 mai 2012[AFP]

Un café dans une main, une cigarette dans l'autre, Costas, Athénien de 24 ans dont un au chômage se dirige vers une agence pour l'emploi, où, dit-il, "jamais" il ne trouvera de travail.

En Grèce, plus de la moitié des jeunes de 15 à 24 ans non scolarisés sont au chômage, un record dans l'Union européenne, et près du tiers chez les 25-34 ans, sur un taux global de 21,9% en mars. Une génération sacrifiée, pour qui l'Organisme pour l'emploi OAED est un passage obligé.

Dans cette agence du centre d'Athènes, les 20-30 ans succèdent aux quadragénaires, plus matinaux, devant le seul guichet ouvert. Dans une mécanique bien huilée, un employé appose sans mot dire un auto-collant sur leur carte rose, certifiant qu'ils sont demandeurs d'emploi.

Si elle ne rime pas avec allocations --réservées aux salariés ou à ceux ayant travaillé un certain nombre d'heures avant de perdre leur emploi-- cette carte peut ouvrir à des formations.

Costas, technicien en froid, suivra ainsi des cours d'informatique, utiles pour "son éducation" et surtout assortis d'un chèque de 500 euros.

Le deuxième étage de l'agence accueille en principe des employeurs venus consulter des CV, et des candidats à l'affût d'offres ou de conseils. Mais l'étage est vide.

"Les entreprises ne recherchent plus de salariés, c'est le cas dans le bâtiment. Et dans le tourisme ou chez les artisans, ils ont leurs propres réseaux", confie un employé de l'OAED sous le sceau de l'anonymat.

Du côté des jeunes, la résignation domine.

L'OAED, "n'est qu'une vitrine, ça ne nous aide en rien. Ils n'ont pas de méthodes efficaces ni suffisamment de temps à nous consacrer", estime Nikole, diplômée en biologie de 27 ans, sans emploi depuis deux ans et qui cherche à faire sa thèse à l'étranger.

Sur la façade, quelques propositions d'emploi, principalement des contrats d'aides à domicile de 5 mois.

Rien donc pour Maria, ex-étudiante en lettres de 22 ans. "Nous n'avons aucun avenir ici. Je cherche partout mais ne trouve rien", lâche cette petite brune.

"Les rares offres ne sont jamais adaptées. J'ai étudié les langues étrangères, je ne suis pas compétente pour ces emplois", regrette quant à elle Katerina, 26 ans, qui dit vivoter de quelques cours particuliers et de contrats sporadiques de secrétaire.

Un plan d'action pour promouvoir l'emploi des jeunes, à travers des formations et l'entreprenariat, devrait être appliqué avant fin 2012, selon les plans de la Commission européenne.

Il prévoit notamment une prise en charge partielle par l'OAED des cotisations sociales patronales, ou le financement sur fonds européens d'embauches temporaires au niveau local dans l'économie sociale ou la culture. Il s'agit aussi de favoriser des stages et l'apprentissage, détaille-t-on au ministère du Travail.

Au total, une enveloppe de plus de 2 milliards d'euros a été prévue, alors que le pays est frappé par la récession depuis 2008.

Ces programmes "peuvent donner des possibilités de rentrer sur le marché du travail" et "contribuent à contrôler l'explosion du chômage". Mais ils "ne créent pas de nouveaux emplois", analyse Savas Robolis, directeur scientifique de l'Institut d'études de la centrale syndicale GSEE.

La solution selon lui: "des investissements publics et privés" dans le tissu économique et les entreprises, pour l'heure pénalisées par l'assèchement du crédit.

La baisse du salaire minimum --508 euros brut, 460 pour les moins de 25 ans-- n'a pas non plus "réussi à absorber le chômage des jeunes", dont nombre partent à l'étranger, dit M. Robolis, évoquant 23.000 diplômés partis en Allemagne en 2011, illustration de l'émigration sélective en cours.

Signe de leur exaspération, les jeunes ont beaucoup contribué à la percée de la gauche radicale du Syriza, propulsé deuxième parti lors des législatives inconclusives du 6 mai, et désormais susceptible de sortir en tête du scrutin du 17 juin.

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