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Erika : décision le 25 septembre sur l'annulation

Olivier Metzner (C), avocat de la société italienne Rina, et le propriétéaire de l'Erika, Giuseppe Savarese (2eD), le 30 mars 2010 au tribunal de Paris[AFP/Archives]

La Cour de cassation a examiné jeudi les condamnations, dont celle de Total, prononcées suite à la marée noire provoquée par le naufrage de l'Erika en 1999, afin de déterminer si elle les valide ou les annule, comme le recommande l'avocat général. Elle rendra sa décision le 25 septembre prochain.

"Votre pouvoir d'interprétation est riche", a lancé aux magistrats de la Cour Me Patrice Spinosi, avocat de collectivités parties civiles dont la Bretagne, soulignant que "les textes en cause manquent considérablement de clarté".

"Votre décision liera les générations futures", a-t-il ajouté, souhaitant "que le droit ne tourne pas le dos à la justice".

L'audience, ouverte à 8H30 devant la chambre criminelle de la Cour, a duré environ quatre heures.

La haute juridiction doit se prononcer sur la régularité juridique de l'arrêt rendu en 2010 par la cour d'appel de Paris, et non sur le fond de l'affaire.

Dans un avis rendu public début avril, l'avocat général Didier Boccon-Gibod a recommandé une "cassation sans renvoi", c'est-à-dire une de l'intégralité de la procédure. Elle est pour lui "la seule issue juriquement possible". Lors de l'audience, il déclare : "pour que les fautes soient sanctionnées, il faut un texte applicable et c'est là que le bât blesse". Il nuance ses propos en ajoutant qu'il "ne tend nullement à laisser croire que le naufrage de l'Erika est un événement acceptable". 

Il assure devant les magistrats de la Cour, "votre décision ne sera en aucun cas un encouragement aux pollueurs indélicats".

Il considère que la justice française n'était pas compétente pour juger ce naufrage d'un navire battant pavillon maltais, survenu en dehors des eaux territoriales, en Zone Economique Exclusive (ZEE).

Même si Malte ne s'est pas manifestée, la loi française de 1983, sur laquelle sont fondées les poursuites, ne pouvait selon lui pas s'appliquer car elle n'était pas conforme aux conventions internationales.

L'avocat général a par ailleurs remis spécifiquement en cause l'indemnisation du 400 km de côtes souillés. Sa position a soulevé l'indignation des élus des collectivités touchées par la pollution.

Jacques Auxiette, président de la région Pays de la Loire, a espéré devant la presse que les arguments "à la fois juridiques et peut-être aussi de bon sens" des parties civiles seraient entendus.

"Douze ans après, on s'apercevrait aujourd'hui que les tribunaux français seraient incompétents pour juger les conséquences d'un naufrage lui bien réel sur les côtes françaises!", s'est-il étonné.

Le naufrage de l'Erika, le 12 décembre 1999 au large de la Bretagne, avait souillé 400 kilomètres de côtes françaises, de la pointe du Finistère à la Charente-Maritime, et mazouté quelque 150.000 oiseaux.

Le 30 mars 2010, les condamnations de l'affréteur du bateau Total, de la société de classification Rina, de l'armateur Giuseppe Savarese et du gestionnaire Antonio Pollara avaient été confirmées en appel. Tous s'étaient pourvus en cassation.

Me Emmanuel Piwnica, avocat de MM. Savarese et Pollara, a assuré que "les parties civiles n'ont pas le monopole de la compassion". "De part et d'autre de cette barre, chacun ici a conscience des conséquences que peut avoir un accident maritime", a-t-il dit.

Mais "nous croyons être en mesure de démontrer que la loi française n'est pas conforme aux conventions internationales" de Montego Bay et Marpol signées par la France, a-t-il poursuivi.

Me Thomas Lyon-Caen, avocat de Total, a rappelé que le groupe pétrolier avait versé 171 millions d'euros d'indemnisations aux parties civiles après le jugement de première instance, et que Rina avait payé 30 millions d'euros après l'appel.

"L'enjeu de cette audience n'est pas l'indemnisation", a-t-il souligné.

Côté parties civiles, Me Didier Le Prado, avocat de la Vendée, a objecté qu'une cassation serait "sacrifier la protection de nos côtes à une logique mercantile". Ce serait selon lui "envoyer un funeste signal au monde du transport maritime".

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