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Au Lesotho, l'eau ne fait pas forcément le bonheur

Un homme, accompagné d'un enfant, observe les engins qui travaillent à la construction du barrage de Metolong, au Lesotho, le 24 mai 2012.[AFP]

L'eau est l'une des principales richesses du Lesotho, qui permet notamment d'étancher la soif sans cesse croissante de l'Afrique du Sud voisine, même si la multiplication des barrages est loin de faire le bonheur de ses populations rurales.

Le dernier barrage en date, celui de Metolong, est financé par des capitaux occidentaux et arabes, et construit par une entreprise chinoise.

"Je n'ai aucune idée de quand, ni où, nous allons être déménagés", s'interroge Mamoliehi Tsapane, une paysanne qui pile du sorgho à deux pas du chantier.

"Ca ne me dérange pas de déménager parce que nous sommes près du barrage. Je crois que ma vie serait en danger. Mais en même temps, j'ai ce terrain ici, et je doute que je serai vraiment dédommagée."

"Il vaut mieux qu'ils ne bougent pas, c'est mieux ici", juge Michael Lenka, un ouvrier sur le chantier. Lui se réjouit de la construction du barrage, qui lui a permis de trouver un emploi.

Des milliers de personnes ont été déplacées par la construction des deux barrages existants de Katse et Mohale, destinés à alimenter en eau la région de Johannesburg.

Suivront ceux de Metolong et Polihali, et sans doute deux autres. Des chantiers qui devraient permettre de faire passer le taux de croissance de 4 à 6% en 2013.

Le Lesotho a en outre signé l'an dernier un méga-contrat hydro-électrique et éolien de 15 milliards de dollars avec des firmes chinoises dont le nom n'a pas été rendu public.

La majeure partie de l'eau et de l'électricité produites par tous ces projets sera absorbée par l'Afrique du Sud, qui entoure totalement le Lesotho, et qui semble insatiable.

Champs engloutis

Le petit royaume montagneux, qui n'a d'autres ressources que quelques diamants et une modeste industrie textile, a grand besoin d'argent et d'emplois.

Mme Tsapane, par exemple, loue des chambres à des ouvriers du chantier. Elle en profitera jusqu'à la montée des eaux.

Ensuite, elle sera sans doute forcée d'abandonner sa maison et ses cultures.

"Je suis inquiète pour mes champs... Si seulement je savais où l'on me relogera", se plaint-elle.

La plupart de ceux qui ont dû quitter leurs foyers disent qu'ils ont perdu au change. Ils ont certes reçu des maisons neuves, la plupart du temps à proximité d'écoles, de cliniques et de lignes électriques. Mais ce changement de culture ne va pas de soi.

"Ma vie était meilleure avant", témoigne Mampai Lesgapa, dont les champs ont été engloutis par le barrage de Mohale en 2002.

"Maintenant, les choses sont pires. Je dois acheter des choses tous les jours, et je n'ai pas d'argent!"

A 62 ans, elle a certes une jolie maison, mais ne peut se permettre de brancher l'électricité que deux ou trois fois par mois. Elle survit en fabriquant des balais, mais doit en acheter la paille, qu'elle produisait autrefois. Et elle doit louer un lopin, dont elle cède la moitié de la production au propriétaire.

Les familles déplacées reçoivent un dédommagement de 2.000 maloti (190 euros) par an pendant cinquante ans, ou 24.000 maloti (2.300 euros) d'un coup pour solde de tout compte.

Avec cette somme, certains choisissent de fonder une petite entreprise. De taxis par exemple.

"Mais si la voiture tombe en panne, on ne peut pas la réparer", soupire Lebohang Kolotsane, un élu local.

"Il n'est pas toujours aisé de faire plaisir à 100% des gens. Les gens ont été dédommagés", assure Lucy Sekoboto, qui représente la Commission des affaires de l'eau du Lesotho, soulignant que les indemnités étaient maintenant versées à l'avance, pour permettre aux populations concernées de se préparer.

"S'ils ont des difficultés, ils commencent à blâmer le projet. (...) C'est naturel."

La critique a été d'autant plus facile que les précédents chantiers avaient connu des affaires de corruption.

Reste qu'alors que les autres barrages alimentent ou alimenteront l'Afrique du Sud, Metolong est différent: il a pour principal objectif de fournir eau et électricité aux habitants du Lesotho.

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