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A Brocéliande, levée de boucliers contre des poubelles au pays de Merlin

La forêt de Brocéliande [Marcel Mochet / AFP/Archives] La forêt de Brocéliande [Marcel Mochet / AFP/Archives]

Des poubelles au pays de Merlin ? Le feu vert accordé à une usine de traitement de déchets en bordure de la mythique forêt de Brocéliande, au moment même où la Bretagne s'efforce de promouvoir cette destination touristique, fait bouillir les défenseurs du site.

Désignée au XIXe siècle comme le théâtre "officiel" des légendes arthuriennes, la majestueuse forêt de Paimpont, qui étend quelque 100 km2 de chênes, de landes et de rochers à la jonction de l'Ille-et-Vilaine et du Morbihan, est depuis un lieu de pèlerinage obligé pour les amoureux de Viviane et de Lancelot.

A tel point que le comité régional du tourisme (CRT) de Bretagne a lancé en mars la destination "Brocéliande", associant également les Côtes d'Armor, comme première étape d'un plan de relance du tourisme dans la région, après un recul l'an passé.

Mais parallèlement, après plusieurs épisodes judiciaires, le préfet de Bretagne vient d'accorder son feu vert à une usine de traitement et un centre de stockage de déchets en bordure de la forêt, à Gaël (Ille-et-Vilaine), suscitant une levée de boucliers.

Porté par un syndicat mixte intercommunal regroupant 65 communes et 100.000 habitants, le projet affiche une capacité de 300.000 tonnes et une durée d'activité de 30 ans.

Pour le préfet de région, Michel Cadot, l'infrastructure sera soumise "à des prescriptions réglementaires très strictes" et "la mise en oeuvre de projets touristiques ou environnementaux sont totalement compatibles avec la présence de cette usine".

Mais pour la municipalité de Gaël (1.700 habitants), opposée au projet, contrairement à d'autres communes du syndicat, la contradiction est patente.

"(Les autres) élus, ça ne les gène pas. Ils nous reprochent de mélanger poubelles et tourisme, mais finalement, c'est bien de ça qu'il s'agit!", s'emporte Jean Guillouët, élu municipal de Gaël et pourfendeur de ce projet lancé il y a près de dix ans.

La forêt de Brocéliande [Marcel Mochet / AFP/Archives]
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La forêt de Brocéliande

Pour preuve du télescopage, M. Guillouët fait valoir qu'à deux kilomètres à vol d'oiseau du site retenu pour l'usine se trouvent les étangs de Comper, à Concoret (Morbihan), classés zone Natura 2000 et au fond desquels, selon la légende, se cacherait le palais de cristal de la fée Viviane.

Le château local abrite d'ailleurs depuis 1990 le Centre de l'imaginaire arthurien, une structure associative fondée par des universitaires et des écrivains et qui propose animations et spectacles à plusieurs dizaines de milliers de visiteurs chaque année.

Au total, une trentaine de circuits de randonnée arpentent le territoire, qui recèle une cinquantaine de tertres funéraires, allées couvertes et autres menhirs. Un lieu très prisé en particulier par une clientèle venue d'Europe du Nord, sensible à la légende arthurienne.

Outre des interférences avec les activités touristiques, le projet de décharge présente des risques environnementaux, selon ses opposants.

L'ensemble industriel doit être construit au sommet d'une colline qui fait office de "vrai château d'eau naturel", selon Jean Guillouët.

Dans ce secteur, le sous-sol est constitué d'un schiste qui donne une belle couleur rosée-rouge aux maisons de pays. "Le terrain n'est pas imperméable, ce n'est pas de l'argile. On ne peut pas trouver pire en termes de nature géologique des sols pour un tel projet", relève le conseiller municipal.

Pour preuve, alors qu'une ancienne décharge avait déjà été exploitée sur ce site, les deux rivières passant à proximité drainent toujours des lixiviats, des "jus" toxiques, affirme-t-il.

Les opposants affirment avoir relevé un taux de cancers anormalement élevé à proximité de l'ancienne décharge. La préfecture de région assure cependant qu'il n'y a "pas de conséquences sanitaires avérées".

Contactée par l'AFP, la présidente du CRT, Maria Vadillo (PS), vice-présidente du conseil régional, n'a pas souhaité s'exprimer dans ce dossier.

Quant à la mairie de Gaël, elle n'abdique pas : "On est prêts a se mettre autour d'une table pour proposer des solutions et sortir ensemble par le haut de cette situation", espère Jean Guillouët.

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