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Mutilations dentaires : le dentiste marseillais Lionel Guedj condamné à huit ans de prison

Lionel Guedj, ex-dentiste marseillais, a été condamné à huit ans de prison avec mandat de dépôt immédiat, ce jeudi 8 septembre 2022. [Nicolas TUCAT / AFP]

A Marseille, le dentiste millionnaire Lionel Guedj a été condamné à huit ans de prison ce jeudi 8 septembre. Il était accusé d’avoir mutilé ses patients, s’enrichissant au passage sur la Sécurité sociale et des mutuelles. Son père Carnot, dit Jean-Claude, a aussi été condamné à cinq ans avec mandat de dépôt.

L’heure du jugement. Accusé d'avoir mutilé ses patients en s'enrichissant au passage sur la Sécurité sociale et des mutuelles, Lionel Guedj, ex-dentiste marseillais, a été condamné à huit ans de prison avec mandat de dépôt immédiat, ce jeudi 8 septembre 2022. 

Son père, Carnot Guedj, qui lui tenait le bras à l'énoncé du jugement, a lui écopé d'une peine de cinq ans, avec mandat de dépôt également. Pour la présidente du tribunal correctionnel, Céline Ballerini, les deux anciens dentistes avaient mis en place des «traitements uniformes et systématisés» qui ont «détruit» des vies, devenues «sans sourire» et «avec des douleurs intolérables». 

A l'issue des audiences, à Marseille, du 28 février au 5 avril, une peine de dix ans de prison, le maximum prévu par le code pénal, avait été requise contre le médecin de 42 ans, jugé pour violences volontaires ayant entraîné une mutilation, des faits commis entre 2006 et 2012.

«Quelle circonstance atténuante la société est-elle prête à tolérer pour adoucir la peine légalement encourue ? Aucune !», avait asséné la procureure Marion Chabot. La magistrate avait également réclamé une amende de 375.000 euros, le maximum encouru pour l'infraction d'escroquerie, l'autre chef de poursuites.

Placé sous contrôle judiciaire depuis sa mise en examen en novembre 2012, le dentiste n'a jamais fait un seul jour de détention provisoire.

Finalement radié de l'Ordre des pharmaciens en 2016, Lionel Guedj s'était installé en 2005 dans les quartiers Nord, parmi les plus pauvres de Marseille, en ouvrant son cabinet à Saint-Antoine. «Il est venu gratter la CMU» (couverture médicale universelle devenue complémentaire santé solidaire), avait asséné le parquet à l'audience, soulignant qu'en 2010 ce praticien était devenu le dentiste le mieux rémunéré de France avec 2,9 millions d'euros d'honoraires.

Selon un calcul du parquet de Marseille, ce jeune dentiste décrit comme avenant avait dévitalisé 3.900 dents saines, sans aucune justification thérapeutique, sur 327 patients, dans le seul but de leur poser des bridges très rémunérateurs. Selon la Sécurité sociale, il posait 28 fois plus de prothèses que la moyenne des dentistes français.

Son père, le cerveau du plan

Dénonçant une «politique industrielle», l'accusation avait détaillé un plan monté par Lionel Guedj et son père Carnot -dit Jean-Claude- Guedj, 71 ans.

«Jamais au grand jamais, je n'ai voulu blesser, faire mal», s'était défendu à l'époque Lionel Guedj qui, au terme d'un mois d’audience, avait fini par reconnaître des fautes de jeunesse.

«Campé dans ses certitudes, se sentant invincible, il a pratiqué ce traitement car il pensait qu'il était dans le vrai, il y croyait», avait plaidé son défenseur, Me Frédéric Monneret, en demandant au tribunal de requalifier les faits en blessures involontaires.

Le jugement était tout autant attendu par les nombreuses parties civiles, des patients originaires des quartiers populaires de Marseille, dont une centaine avaient livré au tribunal leurs vies saccagées par des douleurs dentaires épouvantables, des kystes à répétition, des bridges qui tombent, voire des pertes de dents totales, provoquant divorces et isolement social.

Certaines victimes n'étaient pourtant venues consulter Lionel Guedj que pour de simples caries.

«Sur notre groupe WhatsApp, on sent que tout le monde a peur qu'il s'en tire à bon compte», témoigne Ouassila, à la veille de ce jugement, en résumant les conséquences des interventions de Lionel Guedj dans sa bouche : «A 45 ans, j'avais perdu la moitié de mes dents. A 55 ans, je n'en ai plus aucune, je n'ai plus que des implants».

Dans un courrier collectif adressé au tribunal au dernier jour des débats, les victimes avaient témoigné leur satisfaction : «Si vous saviez combien nos larmes ont coulé, combien nos vies ont été détruites, combien nos familles ont souffert, mais tout ce mois (de procès), nous avons été écoutés et soulagés de savoir qu'on pensait à nous, plaignants, qui pendant des années ont gardé le silence».

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