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Dans les banlieues sensibles, le jihad séduit une "ultra-minorité"

Le jihad, s'inquiètent des experts, peut exercer une séduction sur des musulmans issus de banlieues sensibles, comme Mohamed Merah qui se proclame "moudjahid" et lié à Al-Qaïda, même si ces jeunes sont "ultra-minoritaires", en plein "déclin du jihadisme".[AFP/Archives]

Le jihad, s'inquiètent des experts, peut exercer une séduction sur des musulmans issus de banlieues sensibles, comme Mohamed Merah qui se proclame "moudjahid" et lié à Al-Qaïda, même si ces jeunes sont "ultra-minoritaires", en plein "déclin du jihadisme".

Originaire du quartier sensible des Izards, Mohamed Merah, un Toulousain de 23 ans d'origine algérienne, a basculé de la délinquance à l'islamisme radical après avoir rejoint un groupe d'idéologie salafiste et voyagé en Afghanistan et au Pakistan. Il est suspecté d'avoir assassiné sept personnes à Toulouse et Montauban en huit jours.

Ce type de voyages en Afghanistan "était assez fréquent dans les années 1990" dans l'euphorie de la victoire des moudjahidine afghans sur l'ex-URSS, décrypte Samir Amghar, docteur en sociologie à l'EHESS, auteur du livre Le salafisme d'aujourd'hui (Ed. Michalon, 2011)

"Un certain nombre de personnes se rendaient en Afghanistan et au Pakistan pour se former, mais depuis quelques années, on assiste à un déclin du +jihadisme+, en raison de la pression très efficace des services de sécurité français et européens", poursuit-il. "Selon les renseignements généraux, les salafistes sont entre 12.000 et 15.000 en France, mais les salafistes jihadistes sont ultra-minoritaires", précise-t-il.

Son collègue Gilles Kepel, politologue et spécialiste de l'islam, trouve toutefois "inquiétant, quand les salafistes imposent leurs règles, par exemple le port du voile intégral, aux autres musulmans". "Quand il y a une rupture avec les valeurs de la République française, ça fait un terrain très fertile pour l'islam radical", souligne-t-il. La cible de ces fondamentalistes? "Des personnes marginalisées", assure le chercheur. "Ils veulent leur rendre leur identité, leur pureté en leur disant que ce qu'il faut, c'est mettre en oeuvre une conception radicale de la religion", explique Gilles Kepel.

Ils s'adressent "d'une manière générale aux personnes des quartiers populaires mais pas forcément aux classes populaires. Il y a aussi une forte proportion qui appartient aux classes moyennes et supérieures, des gens qui ont fait des études, qui sont diplômés", complète M. Amghar.

"Dans les années 1990, des imams radicaux, des prédicateurs pouvaient recruter dans les mosquées. A partir du 11-Septembre, du fait de la surveillance des services de renseignements dans les mosquées, c'est devenu très difficile. Le recrutement passe désormais par des relations interpersonnelles, ou via internet", analyse M. Amghar. "Quand j'ai découvert que deux jeunes de Vénissieux (Rhône) se trouvaient à la prison de Guantanamo en janvier 2002, je suis tombé de ma chaise. Je me suis interrogé: +qui bourre le crâne de nos enfants?+", témoigne l'ancien maire PCF de cette banlieue, André Gérin, auteur du livre Les ghettos de la république encore et toujours, (Ed. Le Publieur).

Dans ce livre, l'élu s'inquiète du "prosélytisme extrêmement actif des intégristes musulmans qui bénéficient, dans les cités d'un terrain de prédilection pour +organiser+ la ghettoïsation".

"Quand j'ai soulevé la question du voile intégral, pour moi c'était la partie émergée de l'iceberg", explique le député du Rhône, qui a présidé une mission parlementaire sur le port du voile intégral.

Quant à Mohamed Merah, "il va falloir voir comment il a été initié, comment il s'est nourri du jihadisme, identifier ses réseaux. Il y a un travail de fourmi à faire", prévient Bernard Godard, co-auteur du livre Les musulmans en France (Broché, 2007). "Il y a encore des endroits ou les gens sont tentés par le salafisme. La question qui subsiste est +quelle réponse à apporter à ces gens?+"

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