En direct
A suivre

Un couple d'origine guinéenne jugé en assises pour excision

Le blason de la justice et sa balance[AFP/Archives]

Un couple d'origine guinéenne comparaît à partir de mardi devant les assises de la Nièvre pour l'excision de ses quatre filles, une coutume ancestrale pratiquée dans près d'une trentaine de pays d'Afrique mais interdite en France en tant qu'elle se traduit par une mutilation.

Les deux parents, arrivés en France à la fin des années 1980, sont poursuivis pour "complicité de violence volontaire ayant entraîné une mutilation sur une mineure de moins de 15 ans par un ascendant". Ils encourent une peine de 15 ans de réclusion criminelle.

Une première information judiciaire avait été ouverte en 2005 pour les deux filles aînées, aujourd'hui majeures, et une seconde en 2009 concernant les cadettes, actuellement âgées de 11 et 13 ans. Les deux dossiers ont été joints depuis.

En septembre 2005, à l'occasion d'une opération de l'appendicite de l'aînée, alors âgée de 14 ans, le personnel de l'hôpital de Nevers s'aperçoit qu'elle a été excisée et le signale aux autorités. Lors de l'examen des quatre soeurs par un médecin, il apparaît que les deux aînées ont été victimes d'une excision, ce qui n'est pas encore le cas des deux cadettes.

Entendu par les enquêteurs, le père déclare d'abord ne pas savoir qui a excisé ses filles, avant de mentionner une femme qui aurait pratiqué l'excision au domicile familial en son absence et celle de son épouse. Il dit également ignorer que l'excision est interdite en France et que celle-ci a été pratiquée sans son accord. De leur côté, les filles déclarent ne "se souvenir de rien" et "ne jamais avoir quitté la France". Les deux parents sont placés sous contrôle judiciaire en 2005.

Le 8 janvier 2009, le service pédiatrie de l'hôpital de Nevers signale que la plus jeune des filles, alors âgée de 7 ans, vient d'être admise pour "d'importants saignements d'origine vaginale". L'enfant, victime d'une "tentative d'excision", selon les examens médicaux, refuse d'indiquer ce qui s'est passé. A cette occasion, il ressort que l'autre soeur cadette a également été excisée entre 2005 et 2009.

Une nouvelle fois, les parents affirment "tout ignorer de cette excision".

L'expertise psychologique des deux filles cadettes conclura à une soumission "totale à l'autorité familiale", "l'excision étant un sujet tabou dans la famille".

Avant d'être victime d'un accident vasculaire cérébral en 2003, qui le laisse "gravement invalide", le père, 54 ans, exerçait la profession de marabout, son épouse, 44 ans et sans profession, s'occupant du foyer. Leur avocat, Me Guillaume Valat estime que "plutôt que de contester les faits, il s'agit d'expliquer le pourquoi et le contexte culturel", a-t-il déclaré à l'AFP.

"Cette affaire est une première dans la mesure où les parents ont été avertis en 2005 avant de recommencer", selon Me Linda Weil-Curiel, avocate de la Commission pour l'abolition des mutilations sexuelles (Cams), qui s'est constituée partie civile. Selon elle, "une quarantaine" d'affaires de ce type ont été jugées en France.

L'excision une coutume ancestrale en Afrique continue d'être pratiquée malgré d'importantes campagnes de sensibilisation et des lois de plus en plus répressives. Cette mutilation traditionnelle des filles consiste en une ablation totale ou partielle du clitoris, des petites et parfois des grandes lèvres à l'entrée du vagin. Le nombre de femmes excisées en France n'est pas connu. Selon une estimation de l'Institut national des études démographiques (Ined) donnée en octobre 2007, il y avait en France en 2004 environ 50.000 femmes adultes excisées, des migrantes ou femmes nées en France de parents originaires d'Afrique. Cette même étude chiffrait leur nombre à 140 millions dans le monde.

Le procès doit durer jusqu'à vendredi.

À suivre aussi

Ailleurs sur le web

Dernières actualités