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Michel Fize : «des jeunes fument 10 à 20 joints par jour »

[JEAN-PHILIPPE KSIAZEK / AFP]

Sommeil, alimentation, drogues, amis, activités.... L’état de forme des adolescents a été passé au crible par une étude internationale. Certains points s’améliorent, d’autres inquiètent toujours. Michel Fize, auteur de «L'Adolescence pour les Nuls » (First Editions), fait le point.

Premier enseignement de l’étude, la meilleure alimentation des adolescents, notamment en ce qui concerne les fruits et légumes…
C’est la bonne nouvelle. On peut penser que les nombreuses campagnes lancées depuis plusieurs années par les autorités ont été relayées par les familles. « 5 Fruits et légumes par jour », il faudrait être un véritable ermite pour ne pas les avoir entendues. Les familles se sont donc adaptées dans leur alimentation. Second facteur, qui rejoint la question de l’obésité, faible en France : la guerre lancée contre les distributeurs de sucreries dans les établissements scolaires. Je note également, la difficulté aujourd’hui de pouvoir acheter des chewing-gums sucrés. C’est une combinaison de facteurs, mais les premiers responsables de cette réussite sont les parents.

La quasi-totalité des collégiens interrogés revendiquent avoir au moins trois véritables amis dans leur entourage. Les réseaux sociaux expliquent-ils cette bonne santé « sociale » ?
Là, c’est davantage une surprise. On aurait plutôt tendance à penser que les réseaux sociaux figent les adolescents, produisent l’effet inverse, celui de l’enfermement. J’ai en tête le cas d’un père qui m’avait expliqué que son fils de 14 ans, depuis qu’il s’était mis sur les réseaux sociaux, n’avait plus un seul ami. Mais sur le net, il n’y a pas de face-à-face, les enfants timides peuvent donc être plus hardis apprendre à développer leurs relations. C’est une sorte d’apprentissage, de répétition pour être plus à l’aise par la suite. Mais attention au sens que l’on donne au mot « ami ». S’agit-il de relations apaisés, conviviales, quand on sait que les adolescents sont aujourd’hui très dures les uns avec les autres ?

Les jeunes français ne sont par ailleurs pas les plus penchés sur la bouteille en Europe…
Quelles conclusions en tirer ? Le fait que l’on boive beaucoup dans d’autres pays d’Europe ne veut pas dire que l’on ne boit pas en France. Il n’y a pas la consommation quotidienne qu’il peut y avoir ailleurs, comme par exemple en Grande-Bretagne, les jeunes Français ont davantage une consommation de fin de semaine. Ils s’enivrent le week-end et regroupent leurs consommations, ce dont on ne doit pas se réjouir.

Au premier rang des problèmes que rencontrent les collégiens français, le manque d’activité physique régulière. Ils ne bougent pas assez.  Comment y remédier ?
L’activité des jeunes insuffisante. Aujourd’hui, on voit que le développement du corps n’intéresse bien que les seniors, et je trouve cela dommage. Espérons maintenant que les réflexions enclenchées sur la question des rythmes scolaires permettront de donner un vrai coup d’accélérateur au développement des activités physiques pour les jeunes Français.

Autre problème récurrent, celui du sommeil, dont les adolescents manquent de plus en plus. Quelles raisons les poussent à se coucher de plus en plus tard ?
Première raison, connue, l’usage intensif de l’internet. La navigation sur les réseaux sociaux se fait souvent en fin de journée, le soir, voire en nocturne. Les jeunes sont même nombreux à avoir leur portable jamais désactivé. Ajoutons à cela les problèmes de stress dus à la pression de la réussite. Il ne faut pas interdire tous ces outils, mais en parler. Ce doit être un contrat de confiance entre les parents et leurs enfants, pour savoir comment ils peuvent être utilisés sans contrarier les performances scolaires. Sinon, on se retrouve au sein d’un cercle vicieux : l’élève se couche tard, est fatigué en classe, perd de sa concentration. Ses notes en pâtissent, ce qui provoque chez lui du stress, et perturbe ainsi son sommeil. Et ainsi de suite. 

La question de la drogue est inquiétante, avec en France l’une des plus fortes consommations parmi les collégiens européens. Pourquoi un tel attrait ?
Cette donnée est une confirmation. On a coutume de dire en France « Tout le monde fume, a fumé ou fumera » une fois dans sa vie un joint. Un produit qui a été élevé au rang de produit ordinaire, comme la cigarette voici 40 ans. On a donc une dédiabolisation du cannabis, et la consommation quotidienne est importante. On se retrouve avec des jeunes qui fument de 10 à 20 joints dans la journée, et qui sait quelles seront les séquelles de tout ça à l’âge adulte ? L’accès est facile, le cannabis est vendu n’importe où, il y en a pour toutes les bourses. Et les gens ont encore le sentiment que ce n’est pas dangereux.

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