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Avec Thierry Lepaon, la CGT change de visage

Thierry Lepaon le 18 mars 2013 à Toulouse [Eric Cabanis / AFP] Thierry Lepaon le 18 mars 2013 à Toulouse [Eric Cabanis / AFP]

Le 50e Congrès de la CGT a intronisé vendredi Thierry Lepaon à la tête de la centrale et fait ses adieux à Bernard Thibault, "camarade décoiffant" qui laisse après 14 ans une CGT indépendante, combative, et radicalisée contre le gouvernement socialiste dans un contexte de crise.

"Le train est arrivé en gare, ça n'est pas un terminus mais il faut laisser les manettes et descendre de la loco, ça s'appelle la relève", a lancé l'ex-cheminot, héros des grèves de 1995, devant un millier de délégués réunis depuis lundi à Toulouse.

Quelques heures plus tôt , le Comité confédéral national (CCN, parlement) avait élu Thierry Lepaon, ex-chaudronnier de 53 ans secrétaire général, et désigné les neuf autres membres du bureau confédéral (direction resserrée).

Très ému, l'ex-secrétaire général a sorti son mouchoir plusieurs fois. Il a été ovationné de longues minutes par les militants debout. Thierry Lepaon a rendu un hommage appuyé au "camarade étonnant, j'oserais presque dire décoiffant", allusion à la célèbre coupe de cheveux de son prédécesseur.

Pendant son mot de conclusion, la légende d'un dessin projeté devant les congressistes a fait mouche: "La CGT change, oui, de coiffeur!".

Au terme de quatre mandats, Bernard Thibault laisse en héritage une CGT réformée, débarrassée de l'emprise du PCF, qui préserve son rang de premier syndicat français. "Il a profondément contribué à faire bouger la CGT et transformer son image", a souligné M. Lepaon qui entend poursuivre sur cette ligne.

Au premier rang, deux dirigeants historiques de la CGT, Georges Séguy et Louis Viannet, artisans chacun en son temps du tournant réformiste de la CGT, ont été ovationnés.

Bernard Thibault et Thierry Lepaon le 18 mars 2013 à Toulouse [Eric Cabanis / AFP/Archives]
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Bernard Thibault et Thierry Lepaon le 18 mars 2013 à Toulouse
 

La passation de pouvoir se fait "dans une période forcément difficile" : le nouveau numéro un, dans les pas de son prédécesseur, ne cache pas sa déception devant la politique de François Hollande. "La fuite vers l'austérité ne peut pas être une réponse à la crise" et "la réduction des déficits ne peut pas tenir lieu de politique".

"La situation que nous vivons provoque une colère légitime", a relevé M. Lepaon. La colère était aussi dans la salle où pendant cinq jours des délégués se sont succédé pour conspuer le projet de loi sur la sécurisation de l'emploi: "Ce gouvernement veut associer les organisations syndicales aux reculs sociaux", a lancé un congressiste, une autre dénonçant "la connivence entre le gouvernement et le patronat".

Les critiques ont été parfois violentes contre la CFDT, qualifiée de "traître" pour avoir signé l'accord "scélérat" sur l'emploi. La stratégie d'unité syndicale prônée par la direction était sur le gril, jusqu'à la clôture où dans une fronde, la salle a sommé son nouveau leader d'exiger clairement "le retrait" du projet et a refusé un 1er mai unitaire avec la CDFT.

"La CGT n'est pas contrainte à un repli identitaire", a rétorqué M. Lepaon devant la presse.

Finalement, le document bilan des dernières années et l'orientation prônée par la direction ont été adoptés à plus de 80%. "Ce ne sont pas les décibels qui fixent l'orientation mais le vote" des délégués, a lancé M. Thibault qui s'est targué de la confiance ainsi manifestée par la base.

 
 

Candidat par défaut, "Thierry Lepaon a été très prudent à ce congrès, sans doute parce qu'il n'a pas encore une légitimité très forte. Il n'a pas pu affirmer une ligne très personnelle", observe auprès de l'AFP la sociologue Sophie Béroud.

Le talon d'Achille de la centrale reste sa difficulté à recruter de nouveaux adhérents, même si les effectifs se sont redressés légèrement (692.000). Cette arlésienne a été au coeur des débats du Congrès. Comme remède, Bernard Thibault a prodigué un dernier conseil: "Ce n'est pas aux salariés de s'adapter à la CGT, c'est à la CGT de coller à la réalité du salariat et des revendications".

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