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Délinquance : quand le voisinage veut faire la police

Dans une cage d'escalier / illustration.[MICHEL GANGNE / AFP]

Face aux délinquants et aux dealers, certains habitants ont décidé d’agir par eux-mêmes. Des initiatives qui présentent certaines limites.

Tags menaçants, ascenseurs vandalisés, odeur de cannabis permanente… Excédés par la délinquance, et notamment les trafiquants de drogue qui «squattent» à longueur de journée leur hall d’immeuble, des habitants de plusieurs quartiers sensibles ont choisi une solution plus directe. Celle de régler le problème par eux-mêmes pour ne plus subir la loi des dealers.

Ainsi, à Sevran ou Epinay-sur-Seine (Seine-Saint-Denis), à Nanterre (Hauts-de-Seine) où bien encore à Chennevières-sur-Marne (Val-de-Marne), des habitants organisent depuis des mois des rondes de nuit et des permanences dans les halls pour faire régner l’ordre. Et dans le quartier lillois de Wazemmes, ce sont des pères de famille qui se relaient la nuit pour sécuriser les cages d’escalier.

 

Un «appel au secours»

A chaque fois, c’est le même ras-le-bol qui a poussé ces gens à agir. «On vivait dans la peur depuis cinq ans», témoigne une des habitantes concernées. «On s’est tous mobilisés et pris en charge», ajoute un autre locataire. Leurs gestes sont simples mais efficaces : occuper les halls pour gêner le commerce des dealers, ou filtrer dans le calme les personnes qui souhaitent entrer dans l’immeuble.

«Ces habitants pensent que les services de police n’agissent pas assez, et veulent montrer leur exaspération, explique Christophe Soullez, chef du département de l’Observatoire national de la délinquance et des réponses pénales (ONDRP). Mais il s’agit plus d’un appel au secours que d’une action qui a vocation à devenir pérenne.»

D’autres ont imaginé des méthodes plus «2.0» pour lutter contre la délinquance. Comme à Bordeaux, où des habitants du quartier Saint-Paul incitent les gens à prendre les dealers en photo pour les poster ensuite sur Facebook afin de les dissuader de rester.

Enfin, certains se mobilisent contre les cambriolages, notamment par le biais du site internet Voisins vigilants. Un dispositif qui s’appuie sur la surveillance des voisins et qui revendique plus de 1 000 communautés en France.

 

Risques de violences

Mais ces actions citoyennes ne sont pas soutenues par la police. «On ne peut pas inciter les gens à faire ça, affirme Christophe Ragondet, délégué du syndicat Alliance en Seine-Saint-Denis. C’est trop dangereux, il peut y avoir des blessés».

A Bezons (Val-d’Oise), des riverains qui voulaient se débarrasser des trafiquants ont été reçus avec des bombes lacrymogènes. Le policier estime que cela ne fait que déplacer le problème dans d’autres immeubles. Paradoxalement, ces actes peuvent aussi nuire aux enquêtes, note Christophe Soullez : «Parfois, la police a besoin de laisser prospérer un trafic pour faire des filatures, prendre des photos, et donc avoir des preuves.»

Un travail de l’ombre que les habitants ne voient pas forcément. Il souligne enfin le risque de voir les citoyens se substituer aux policiers. Car derrière cette dérive se cache le spectre des milices.

 

 

 

Les chiffres de l’insécurité

> 235.000 cambriolages perpétrés au cours de l’année 2012, dans les résidences principales ou secondaires des particuliers.  C’est 8 % de plus qu’en 2011.

 

> 180.000 infractions à la législation sur les produits stupéfiants (usage, revente et usage, trafic sans usage) recensées par la police et la gendarmerie en 2012, en hausse de 2 % par rapport à 2011.

 

> 146 000 destructions ou dégradations de véhicules privés comptabilisées en 2012. Un chiffre en baisse de 1,7 % par rapport à l’année 2011.

 

> 154.000 destructions ou dégradations de biens privés ou publics recensés au cours de l’année 2012. Des résultats en hausse de 1 % par rapport à l’année précédente.

 

 

Bordeaux : un appel à la délation des dealers relayé sur Facebook

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