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Une tour parisienne bientôt démolie

Photo prise le 10 septembre 2013 montrant l'artiste français Rear One postant dans un appartement auprès de sa création [Joël Saget / AFP] Photo prise le 10 septembre 2013 montrant l'artiste français Rear One postant dans un appartement auprès de sa création [Joël Saget / AFP]

D'habitude, les murs en plein air ont leur prédilection. Invités à s'exprimer du sol au plafond dans un immeuble parisien promis à la démolition, des artistes Street Art parmi les plus renommés, excités par ce graal inespéré, se bousculent pour participer à cette expérience.

 

Spécialisée dans le graffiti, la galerie parisienne Itinerrance est à l'origine de ce défi artistique aussi fou qu'éphémère, avec le soutien du propriétaire de cet immeuble de 9 étages situé en bord de Seine, quai d'Austerlitz, dans le XIIIe arrondissement.

Désertée par ses locataires relogés et prioritaires pour un futur bâtiment flambant neuf, cette tour défraîchie des années 1960 sera entièrement détruite début novembre.

Depuis 7 mois, plus de 100 graffeurs de 16 nationalités, venus à leurs frais, ont investi les lieux pour cette carte blanche exceptionnelle, la première à cette échelle dans l'univers du Street Art.

Une création street art de l'artiste Senso photographiée le 29 juillet 2013 dans un immeuble voué à la démolition à Paris [Joël Saget / AFP/Archives]
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Une création street art de l'artiste Senso photographiée le 29 juillet 2013 dans un immeuble voué à la démolition à Paris
 

Brésiliens, Saoudiens, Tunisiens, Iraniens, Espagnols, Australiens ou Français, les artistes enthousiastes se sont partagés les 36 appartements parfois encore meublés. En tout, une gigantesque toile de 4.500 m2 formée par les murs, les sols et les plafonds, jusque dans les placards.

De l'extérieur, rien ne transparaît de cette ruche artistique en dehors d'un immense graffiti orange et noir d'inspiration orientaliste, de vingt mètres de haut sur la façade.

"Du 1er au 30 octobre, tous les jours, le public sera invité à découvrir la plus grande exposition collective de Street Art, expérience en totale cohérence avec l'essence même du mouvement. Les visites seront gratuites et il n'y aura rien à vendre", a expliqué à l'AFP Mehdi Ben Cheikh, responsable de la galerie et artisan du projet.

Avec le soutien de la mairie du XIIIe et la confiance des bailleurs sociaux, M. Ben Cheikh a créé depuis quelques années un parcours de quinze fresques sur de grands immeubles.

"Rêve absolu"

"Je passe mon temps le nez en l'air, à repérer de nouveaux murs laids à mettre en beauté!" raconte-t-il. "Quand j'ai appris que cette tour allait être détruite, l'idée de la proposer aux artistes graffeurs m'est apparue comme évidente. Le Street Art a beaucoup de choses à dire, avec une incroyable énergie à la fois créative et politique."

Une création photographiée le 29 juillet 2013 de l'artiste Agustino Iacucci dans un immeuble parisien voué à la démolition [Joël Saget / AFP/Archives]
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Une création photographiée le 29 juillet 2013 de l'artiste Agustino Iacucci dans un immeuble parisien voué à la démolition
 

Graffeur breton, Gaël est l'un des 100 artistes sélectionnés. Il a investi l'un des appartements du 5e étage: "Ce projet, c'est un rêve absolu. Je ne m'attendais pas à une telle proposition."

"Participer à ce projet international est l'occasion de rencontrer d'autres graffeurs, de montrer nos différences", a estimé Djeda, graffeur saoudien, au 9e étage avec trois autres compatriotes renommés dont Aous et Azooz. Sur le même palier, Alëxone, artiste français, peintre et illustrateur. La tour explose de couleurs à chaque étage.

Au 7e étage, El Seed, Franco-Tunisien, "calligraffeur" reconnu qui a peint le minaret de la mosquée de Gabès (Tunisie) avant de collaborer avec Vuitton, a entièrement gravé au burin et à la main le parquet d'une ancienne salle à manger.

Le Français Mosko interroge le visiteur à travers un jeu de vieux miroirs récupérés sur place. Au 4e, Gilbert, né au Togo, nourrit ses œuvres de son propre métissage. Il a recouvert les murs de graffitis à la seule craie. Au même étage, l'artiste français Katre, familier des lettrages colorés, a reproduit un appartement après un bombardement.

Dans un autre logement, le Français Cintorino a décidé de marier humour noir et gravité "pour bousculer les certitudes": une pluie de bombes s'abat sur une grande carte de la Syrie en mie de pain.

Photo prise le 10 septembre 2013 montrant le galériste Mehdi ben Cheikh posant à une fenêtre du bâtiment La Tour voué à la démolition où des artistes de street art donnent libre cours à leur inspiration [Joël Saget / AFP]
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Photo prise le 10 septembre 2013 montrant le galériste Mehdi ben Cheikh posant à une fenêtre du bâtiment La Tour voué à la démolition où des artistes de street art donnent libre cours à leur inspiration
 

Add Fuel et Belem (Portugal), Lacurci (Italie), Walker (Grande-Bretagne), Indie 184 (Etats-Unis), C125, Sowat, Julien Colombier et Baudelocque (France), Shoof (Tunisie), Vexta et Jimmy C (Australie) et Maryam (Arabie saoudite) ont également participé à cette résidence qui se prolonge avec une expérience virtuelle et digitale (www.tourparis13.fr).

Dès le début, la chaîne de télévision France Ô a immortalisé ce bouillonnant processus créatif avec un documentaire qui sera diffusé en 2014, après captation de la destruction de la tour et de ses oeuvres à jamais perdues.

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