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La charcuterie française tente de s'imposer en Chine

Des saucissons exposés sur l'étal d'un supermarché à Pékin, en 2013 [Wang Zhao / AFP] Des saucissons exposés sur l'étal d'un supermarché à Pékin, en 2013 [Wang Zhao / AFP]

La charcuterie française a enfin obtenu le précieux sésame lui donnant accès au gigantesque marché chinois. Le début d'une "longue marche" pour les professionnels qui vont devoir redoubler d'inventivité pour s'imposer.

Brocéliande qui fait du jambon cuit en Bretagne, Haraguy (groupe Delpeyrat) et son jambon de Bayonne et le saucisson sec de Salaisons du Rouergue du sud-ouest (groupe Sacor) ont reçu l'agrément mercredi lors de la visite du président chinois à Paris. Sept autres entreprises devraient aussi être autorisées dans les prochains mois.

Pour Xavier Terlet, spécialiste de l'innovation en agroalimentaire, le marché chinois est certes un eldorado mais pour le conquérir, il va falloir "changer de mentalité".

"En charcuterie, on est encore sur des produits traditionnels (...) et si on veut vendre des rillettes en pot aux Chinois, c'est pas la peine d'y aller. Pour réussir il va falloir innover".

D'autant que les Espagnols et les Italiens sont déjà sur le marché depuis plusieurs années. Et ils savent faire pour séduire les étrangers avec des formats pratiques comme les tapas, la mise en avant de l'origine et le marketing, énumère Xavier Terlet, qui dirige le cabinet XTC, détecteur de toutes les nouveautés alimentaires.

Une chaîne de fabrique de saucisses en France, en 2013 [Eric Cabanis / AFP/Archives]
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Une chaîne de fabrique de saucisses en France, en 2013
 

Mais cette fois-ci, c'est la France qui va prendre une longueur d'avance, rétorque le président de la fédération des charcutiers (Fict), Robert Volut, car elle a obtenu un agrément sur le sec comme le frais (andouillettes, rillettes, etc.), tandis que ses concurrents d'Europe du Sud ont un agrément limité aux salaisons sèches.

Et en Chine, c'est très important d'arriver sur le marché tôt et en premier comme les vins de Bordeaux en leur temps, complète Karine Parsy, directrice en Chine de Sopexa, spécialiste du marketing à l'export pour les produits alimentaires français.

Mais tous, à commencer par le président des charcutiers admettent que l'arrivée sur le marché chinois sera une "longue marche".

D'autant plus pour un secteur, composé essentiellement de petites et moyennes entreprises, qui peine déjà à dégager des marges correctes en France et n'a pas l'habitude d'exporter.

En 2013, les charcutiers ont dégagé 7 milliards de chiffres d'affaires, mais seulement 7% ont été réalisés à l'export et très peu hors Union européenne.

 

- Pâté sans pain -

 

Pour réussir, il va donc falloir faire connaître les produits aux professionnels locaux en écumant les salons, les faire goûter aux journalistes et au public. Et ensuite sélectionner ceux qui peuvent fonctionner en tenant compte aussi des spécificités régionales.

La rosette de Lyon en tous cas est déjà au goût du président chinois Xi Jinping qui l'a goûtée, avec un peu de Beaufort et un petit Beaujolais mardi soir à Lyon.

"A Pékin, la population est plus tournée vers le sucré. Dans le sud, c'est le pimenté qui plaît", illustre Karine Parsy.

Car si le porc est la viande la plus consommée en Chine, la charcuterie n'est pas dans les usages. Les professionnels, appuyés par des spécialistes de l'export, devront donc s'inviter dans les habitudes alimentaires locales comme l'ont fait les producteurs de fromages avant eux.

Ils ont ainsi poussé les associations de fromages avec des fruits ou des noix, plutôt que du pain peu consommé là-bas.

Les charcutiers vont faire de même, avec un site d'informations en chinois sur lequel ils proposeront des idées de recettes, et tenteront de rassurer sur la sécurité sanitaire, élément phare dans un pays traumatisé par les scandales alimentaires ou le problème des cadavres de porcs flottant dans les rivières.

Pour l'heure les charcutiers se gardent bien d'avancer un chiffre d'affaires potentiel. Ils se bornent à dire qu'ils viseront les classes moyennes et supérieures chinoises avec des produits gourmets, soit près de 200 millions de personnes, trois fois la population française tout de même !

Il faudra donc attendre quelques années pour savoir qui des rillettes du Mans, de la saucisse de Montbéliard ou du jambon de Bayonne a conquis les palais chinois comme ont déjà réussi à le faire de façon spectaculaire les Bordeaux, le Cognac, les laits pour bébé ou même les pommes et kiwis (fruit en fait d'origine chinoise) français.

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