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D'anciens mineurs lorrains dénoncent les lenteurs de la justice

L'entrée de la mine de charbon Forbach le 26 novembre 1997 [Franck Fife / AFP/Archives] L'entrée de la mine de charbon Forbach le 26 novembre 1997 [Franck Fife / AFP/Archives]

Craignant de ne pas tous être indemnisés de leur vivant, 70 anciens mineurs de Moselle ont manifesté mercredi à Forbach pour dénoncer la lenteur de la justice qu'ils ont saisie pour avoir été exposés à de nombreux agents toxiques.

Depuis novembre dernier, par petits groupes successifs, près de 800 anciens mineurs des houillères de Lorraine ont déposé aux Prud'hommes de Forbach des demandes d'indemnisation au titre d'un "préjudice d'anxiété": celui de vivre dans la crainte de contracter des maladies graves, après avoir été exposés pendant des années à des produits toxiques, dont l'amiante.

Leur démarche est novatrice dans la mesure où ils demandent réparation par rapport à une dizaine de substances cancérogènes, alors que jusqu'à présent en France le préjudice d'anxiété a été exclusivement reconnu uniquement pour des victimes de l'amiante.

Le dernier groupe de demandeurs a été audiencé le 19 juin. La conciliation ayant été systématiquement refusée par Daniel Cadoux, l'ancien patron de Charbonnages de France devenu le liquidateur de la société, des audiences de jugement sont prévues par groupes de 60 à compter du 23 octobre.

Cependant le conseil des Prud'hommes a décidé de ne se prononcer qu'après la dernière audience de jugement, prévue en juin 2015, a regretté François Dosso, délégué CFDT mineurs.

Par conséquent "une décision ne devrait pas intervenir avant l'automne 2015, et en tenant compte des recours probables du liquidateur, le dossier risque de traîner jusqu'en 2019", a-t-il ajouté.

"A ce jour, six demandeurs sont déjà décédés, une quinzaine ont contracté un cancer. Est-ce qu'on pourra être indemnisés de notre vivant?", s'est-il indigné.

"Le manque de moyens des Prud'hommes de Forbach n'explique pas tout (...), il y a une volonté de retarder" la procédure, selon lui.

A l'issue de leur brève manifestation, où certains sont venus avec masques blancs et casques à lampe frontale, les anciens mineurs ont remis une motion à la sous-préfecture de Forbach, appelant notamment la Garde des Sceaux, Christiane Taubira, à dégager "tous les moyens nécessaires" pour "permettre à la justice d'être rendue dans des délais raisonnables".

Les anciens mineurs ont également réclamé l'accélération du traitement de leurs plaintes au pénal, initiées dès 2005 contre leur ancien employeur, ainsi que la pérennisation du régime minier de sécurité sociale jusqu'au dernier affilié vivant.

"Il n'y a rien qui avance, alors qu'on a été contaminés comme des fous", a soupiré Mohamed Elmadyouni, 56 ans dont 28 au fond de la mine, interrogé par l'AFP. Plusieurs de ses anciens camarades n'ont pas pu venir à la manifestation, peinant à marcher en raison de difficultés respiratoires, a-t-il confié.

"A chaque fois que je rencontre d'anciens collègues, j'apprends qu'untel a un cancer, qu'untel a été enterré. Je me dis que la prochaine fois ce sera moi" a témoigné Jean-Luc Feld, un autre retraité des houillères âgé de 58 ans qui "n'ose même plus voir le médecin".

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