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La SNCM sort de la grève en mode sursis

Des employés de la SNCM attendent de monter sur le ferry "Danielle Casanova" pour une assemblée générale, le 10 juillet 2014 [Boris Horvat / AFP] Des employés de la SNCM attendent de monter sur le ferry "Danielle Casanova" pour une assemblée générale, le 10 juillet 2014 [Boris Horvat / AFP]

Vouée au seul redressement judiciaire par le gouvernement le week-end dernier, la SNCM s'est finalement ménagé un espoir de survie jusqu'à la fin de l'année au terme de trois jours d'intenses négociations entre syndicats et actionnaires, débouchant sur la reprise du trafic après 17 jours de grève.

Les deux premiers des huit navires immobilisés par cette grève, entamée le 24 juin, ont ainsi repris la mer jeudi soir depuis Marseille, l'un pour Alger, l'autre pour Bastia. La totalité du service devait être rétabli vendredi.

Il était temps pour la Corse, dont les acteurs économiques n'ont eu de cesse de dénoncer "la situation dramatique" dans laquelle les plaçait la grève, qui commençait à perturber l'approvisionnement de l'île. De colère, ils avaient mis à sac mercredi le siège de la SNCM à Bastia, avant d'être reçus jeudi par le Premier ministre Manuel Valls, qui leur a promis l'étalement et la suppression de charges patronales.

Il était temps, aussi et surtout, pour la SNCM. La haute saison touristique vient de débuter. La compagnie y réalise plus de la moitié de son chiffre d'affaires et ce conflit a grevé ses comptes, déjà lourdement déficitaires de plusieurs millions d'euros.

Le ferry "Paglia Orba" de la SNCM dans le port d'Ajaccio, le 10 juillet 2014 [Pascal Pochard-Casabianca  / AFP/Archives]
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Le ferry "Paglia Orba" de la SNCM dans le port d'Ajaccio, le 10 juillet 2014

Ce sont précisément les difficultés de trésorerie, combinées à l'inextricable problème de deux amendes de 220 M EUR infligées par Bruxelles pour aides publiques illégales, que le secrétaire d'Etat aux Transports Frédéric Cuvillier avait mis en avant le 5 juillet, dans un entretien au quotidien La Provence, pour préconiser le redressement judiciaire de la compagnie, "seul moyen pour (lui) redonner un avenir".

Une position immédiatement fustigée par les syndicats, annonciatrice selon eux du "démantèlement" de l'entreprise.

C'est sous ces auspices tendus que débutaient lundi à Marseille, en préfecture, les négociations avec le médiateur du gouvernement, Gilles Bélier, tout juste nommé par M. Cuvillier.

Salué comme "honnête et loyal" par le secrétaire CGT des marins, Frédéric Alpozzo, M. Bélier est finalement parvenu à déminer la situation, après trois jours de discussions serrées, émaillées d'interruptions de séances.

- plan social -

Jeudi soir, un compromis était ainsi trouvé autour d'un texte excluant l'option redressement judiciaire jusqu'au 31 octobre, le temps de finaliser un nouveau plan pour sauver la compagnie, passant par la recherche de nouveaux actionnaires.

Cette mission, à laquelle participera M. Bélier, comporte aussi "un travail sur les mesures sociales d'accompagnement". Autant dire qu'un plan social plus lourd que celui des 500 départs volontaires (sur 2.600 salariés) acté en janvier, semble en préparation.

"Ce cadre sécurisé est court, mais il permet d'étudier toutes les possibilités de restructuration en-dehors du redressement judiciaire", observait jeudi Pierre Maupoint de Vandeul, représentant CFE-CGC, au moment où les marins votaient la suspension du mouvement.

Sauf que les salariés, satisfaits de ce cadre "sécurisé", ne se sentent guère soutenus par le gouvernement, actionnaire à 25%, dans cette quête d'un plan de relance.

La position de l'Etat a de quoi interpeller: Manuel Valls a répété mercredi, alors que les négociations battaient leur plein, qu'il soutenait l'option redressement judiciaire. D'où l'exigence de la CGT, réitérée jeudi avant et après le vote de reprise, d'être reçue avec les autres organisations syndicales à Matignon "pour une clarification indispensable".

Veolia, co-actionnaire de Transdev, elle-même actionnaire principal de la SNCM (60%), n'a pas caché non plus sa position sur ce moratoire de quatre mois. "Cela fait perdre du temps, et surtout, cela gaspille de l'argent" qui "aurait pu être utilisé pour mieux indemniser les salariés qui devront partir à la fin", a déclaré jeudi à l'AFP son PDG, Antoine Frérot.

Autant dire que les salariés se sentent plus que jamais en sursis.

Leur espoir repose désormais sur l'arrivée d'un repreneur sérieux, si possible un industriel du secteur. L'ancien président du port de Marseille, Christian Garin, associé au groupe norvégien SIEM, présente ce profil. Il a de nouveau manifesté son intérêt, comme il l'avait fait en début d'année.

Reste à lever avec les repreneurs éventuels les nombreuses hypothèques pesant sur l'avenir de la société, en particulier les amendes européennes et les garanties de passif. Il faudra bien ces quatre mois de négociations financières, capitalistiques et judiciaires pour y parvenir.

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