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La semaine de Philippe Labro : de sombres mois d’été, une rentrée d’éclaircies

Philippe Labro.[THOMAS VOLAIRE]

Philippe Labro est écrivain, cinéaste et journaliste. Chaque vendredi, pour Direct Matin, il commente ce qu'il a vu, vécu et observé pendant la semaine. Un bloc-notes subjectif et libre.

 

VENDREDI 29 AOÛT

Derniers jours d’un été qui fut chargé. C’est la «rentrée». C’est un plaisir de retrouver les lectrices et lecteurs de ce journal. Ce terme «rentrée» possède un charme particulier. Il évoque notre enfance – avec son cortège de clichés : le nouveau cartable et les crayons d’autrefois – aujourd’hui, sans doute, la première tablette ?

Sur les arbres des boulevards, les premières feuilles jaunâtres tournent au bistre, couleur d’automne, les magazines et journaux sacrifient à cet autre cliché : le «quoi de neuf ?», avec la déferlante de nouveaux romans, les informations prématurées (et qui, donc, seront fausses) sur les favoris pour les prix littéraires de novembre, les promesses de manifestations artistiques, architecturales, musicales, les nouvelles grilles télé et radio, les films à venir… Bref, cette ambiance de renouveau, même si, bien souvent, trop souvent, le «renouveau» signifie la perpétuation de valeurs établies.

Et puis, il y a eu, il y aura, l’actualité politique en France, qui connaît un soubresaut supplémentaire (Montebourg et Hamon dehors, et Filippetti aussi – Valls forme un autre gouvernement, dont la vraie surprise consiste en l’arrivée d’un ancien banquier, Emmanuel Macron, 36 ans) – soubresaut que l’on pouvait attendre. Arnaud Montebourg ? Qu’avait-il d’«héroïque» dans sa posture qui eût consisté à accumuler un peu plus de dettes ? 

Enfin, il faut revenir sur l’été de toutes les guerres. L’été meurtrier. A quel événement doit-on accorder le plus d’importance ? A l’épidémie d’Ebola, affectant trois pays d’Afrique, sinon quatre ? Mesure-t-on, dans une Europe à l’abri, ce que signifie pour les individus la multiplication des fermetures terrestres et aériennes ?

Ensuite, il y eut le conflit d’Israël-Gaza, ou faut-il écrire Gaza-Israël ? Peut-on éprouver une manière de soulagement à l’annonce d’un cessez-le-feu permanent ? L’appellation elle-même («illimité») suscite une sorte de scepticisme, mais acceptons-en l’augure.

Il y a eu, par ailleurs, les impulsions «irrationnelles» mais, en vérité, parfaitement délibérées, de Poutine vis-à-vis de l’Ukraine ce crime de guerre du 17 juillet, avec le missile russe qui abat un avion de la Malaysia Airlines, ce qui devient bien plus qu’une crise.

Enfin, et peut-être surtout, la prolifération de cet Etat islamique, proclamé «califat» à Mossoul et dont les exactions à l’égard de tous ceux qui ne respectent pas la charia à la lettre font frissonner le monde. Cameron, Obama, Hollande, Fabius, Ban Ki-moon ont tous dit : «Organisation terrestre la plus dangereuse du monde.» Un dessin d’un journal américain résumait l’autre jour le sentiment général : sur une pancarte marquée Moyen-Orient, des jihadistes barrent le mot Orient et le remplacent par Age. Moyen Age…

Pour rejeter un instant les images des crimes des hommes d’Abou Bakr al-Baghdadi, je pense aux championnats d’Europe d’athlétisme de Zurich et au merveilleux retour en trombe d’une inconnue, Floria Guei, grâce à qui le 4x400 féminin français, dans le relais ultime, rattrape un retard irrattrapable et gagne la médaille d’or, le 17 août dernier. Sur le visage de la jeune athlète, on lisait comme l’étonnement de son propre exploit. Comme si, arrivée, ayant dépassé d’une si courte tête les concurrentes sur la ligne, la jeune femme n’y croyait pas encore. Il fallut que ce soit ses camarades qui viennent l’embrasser pour lui confirmer : «Mais si, tu l’as fait, c’est bien toi qui nous as sauvées.» Moment magique – précaire, certes –, émouvant, comme un éclat de lumière au cours d’un si sombre été.

 

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