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Procès Bettencourt : l'heure des réquisitions

Liliane Bettencourt et Patrice de Maistre.[AFP Archives]

Un prévenu entre la vie et la mort, d'autres poursuivis alors que le parquet avait requis pour eux un non-lieu : l'affaire Bettencourt reste un dossier hors norme, jusqu'aux réquisitions qui seront prononcées vendredi contre les dix hommes jugés à Bordeaux dans le volet abus de faiblesse.

 

"Ce n'est pas tous les jours qu'une partie civile, un procureur de la République, un juge d'instruction ne partagent pas le même avis", a relevé jeudi lors de sa plaidoirie, Me Benoît Ducos-Ader, l'avocat de Liliane Bettencourt, la richissime héritière du groupe L'Oréal, âgée aujourd'hui de 92 ans et grande absente du procès.

 

Les dix prévenus devant le tribunal correctionnel

Le parquet avait requis le 28 juin 2013 des non-lieux pour cinq des dix prévenus, que les trois juges d'instruction bordelais, dont Jean-Michel Gentil, ont finalement décidé de renvoyer devant le tribunal correctionnel : l'ex-ministre UMP Eric Woerth poursuivi pour recel, l'avocat Pascal Wilhelm (abus de faiblesse et complicité), l'entrepreneur audiovisuel Stéphane Courbit (abus de faiblesse), un des notaires de la milliardaire, Patrice Bonduelle (complicité d'abus de faiblesse), et son ex-infirmier Alain Thurin (abus de faiblesse et complicité).

Ce dernier, dont le nom est apparu sur un testament de la milliardaire pour une donation de 10 millions d'euros, est plongé dans un coma profond depuis une tentative de suicide le 25 janvier, la veille du procès. L'homme, qui n'avait pas d'avocat, n'a pas été entendu et n'a donc pas pu se défendre. "Nous n'avions pas l'intention de nous constituer contre ce malheureux M. Thurin", a indiqué Me Ducos-Ader.

 

Risque d’une contradiction de décisions

Poursuivis comme complices du présumé abus de faiblesse commis par l'ex-infirmier, Pascal Wilhelm et Patrice Bonduelle ont demandé pour leur part à être jugés à Bordeaux pour l'intégralité des faits qui leur sont reprochés. Une position qui n'est pas partagée par le procureur de la République, Gérard Aldigé, qui a souligné le "risque majeur d'une contradiction de décisions".

Que se passerait-il en effet si Alain Thurin "bénéficie d'une relaxe" dans un procès ultérieur et si le tribunal correctionnel de Bordeaux retient "la culpabilité" des deux hommes, a fait valoir le procureur. Le président Denis Roucou a finalement indiqué qu'il trancherait dans sa décision.

   

Accord transactionnel

Autre prévenu dans une situation singulière, le patron de Lov Group Industries, Stéphane Courbit, poursuivi avec Pascal Wilhelm, alors mandataire de la milliardaire, pour avoir incité Liliane Bettencourt à investir 143 millions d'euros dans sa société. Renvoyé pour abus de faiblesse, il avait initialement été mis en examen pour escroquerie et recel d'abus de faiblesse, des faits que le tribunal n'a pas exclus de juger.

Parallèlement, dans un accord transactionnel conclu à la veille du procès, l'homme d'affaires s'est engagé à restituer les fonds investis. En contrepartie, la famille Bettencourt a retiré sa constitution de partie civile contre lui.

 

Eric Woerth l’"oublié du non-lieu"

Et quid du député de l'Oise, Eric Woerth, cet "oublié du non-lieu", selon les termes de son avocat, Me Jean-Yves Le Borgne ? "Quelqu'un sur lequel nous posons un point d'interrogation", a reconnu Me Ducos-Ader. Poursuivi pour recel d'une somme que lui aurait remise en 2007 l'ex-gestionnaire de fortune de Liliane Bettencourt, Patrice de Maistre, l'ex-ministre a démenti "avoir reçu de l'argent liquide" malgré des "coïncidences troublantes" relevées par le président.

Le procureur devrait avoir, en revanche, moins de difficultés à requérir contre les principaux prévenus de ce procès fleuve de cinq semaines : l'ex-confident de la milliardaire, François-Marie Banier, soupçonné d'avoir obtenu des libéralités, dons et legs portant sur plus de 400 millions d'euros. Le photographe est poursuivi pour abus de faiblesse et blanchiment, des faits passibles au maximum de cinq ans de prison et 375.000 euros d'amende, tout comme son compagnon Martin d'Orgeval.

 

De Maistre avoue avoir des comptes en Suisse

Patrice de Maistre, le financier personnel de Mme Bettencourt, également poursuivi pour abus de faiblesse et blanchiment, dit avoir été entraîné "malgré lui" dans les "déchirures" familiale des Bettencourt. Il a nié tout abus de faiblesse à l'encontre de sa patronne, reconnaissant toutefois l'infraction de blanchiment de fraude fiscale depuis des comptes en Suisse, pour éviter à Liliane Bettencourt, a-t-il soutenu, la révélation d'un scandale.

Il y a aussi le notaire, Jean-Michel Normand, 80 ans, poursuivi pour abus de faiblesse, et l'autre absent de ce procès, le gestionnaire de l'île seychelloise d'Arros, Carlos Vejerano, poursuivi pour abus de faiblesse et abus de confiance.

Les plaidoiries de la défense commenceront à partir lundi et devraient se poursuivre jusqu'à mercredi.

 

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