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La semaine de Philippe Labro : les humains vus de près, la terre saisie d’en haut

Philippe Labro, écrivain, cinéaste et journaliste.[THOMAS VOLAIRE]

Philippe Labro est écrivain, cinéaste et journaliste. Chaque vendredi, pour Direct Matin, il commente ce qu'il a vu, vécu et observé pendant la semaine. Un bloc-notes subjectif et libre.

 

SEMAINE DU 23 MARS

Retenez bien ce titre, vous allez bientôt en entendre parler : Human. Ainsi s’appelle le nouveau film de Yann Arthus-Bertrand, que j’ai eu la chance de voir récemment dans un laboratoire de cinéma à Boulogne, car il n’est pas encore «mixé», ni tout à fait terminé.

Si j’ai décidé d’en parler dès maintenant (on peut imaginer qu’il sera projeté au prochain Festival de Cannes – on sait qu’il aura droit à une première mondiale en septembre 2015 à l’occasion de la 70e assemblée générale de l’ONU à New York) –, c’est que ce film ne ressemble à rien de ce que l’on voit habituellement. Une des plus belles représentations de ce que nous sommes, nous, hommes et femmes, à travers la planète.

Yann Arthus-Bertrand est le spécialiste de vues aériennes. Ses ouvrages (La Terre vue du ciel) ont fait de lui le plus célèbre illustrateur de cette réalité qu’est notre Terre. Il ne se contente pas de sa réussite et veut aller plus loin : montrer la Terre, très bien, mais pourquoi ne pas montrer l’humanité qui la peuple ? Il entreprend alors un projet d’une ambition inouïe : livrer un portrait multiple des habitants de ce monde.

Pendant trois ans, il va – avec des équipes – effectuer 110 tournages dans 75 pays, pour recueillir 2 000 interviews dans 63 langues. L’idée, simple et efficace, aura consisté à filmer, sur fond noir, quel que soit l’endroit où a eu lieu le questionnement. On voit défiler, éclairés de façon si pointue et talentueuse que chaque détail des visages (yeux, sourires, larmes, rides, peaux crevassées par le vent ou l’aridité du climat, joues et fronts burinés par la vie, ou encore lisses et innocents) prend une dimension impressionnante. On voit des vieux, des jeunes, des hommes, des femmes, des paysans, des immigrés, des prisonniers, des invalides, des heureux et des malheureux, des humains de toutes les couleurs.

De l’Uruguay au Japon, de l’Afrique à la Russie, on est confronté à des gens qui se livrent de manière franche, crue, révélatrice. Ils parlent de tout, les épreuves de la vie, les morts d’êtres chers, le miracle d’une naissance, la joie de se consacrer à une tâche modeste (cette paysanne qui dit que le «bonheur c’est des haricots et du maïs»), la terrible confession d’un rebelle qui admet qu’il aime tuer, les divorces, les épreuves, la drogue, la sexualité, les leçons d’un échec ou les plaisirs d’un amour révélé malgré les interdits, l’adolescence difficile, la vieillesse assagie, c’est un extraordinaire panorama de ce qui fait la vie des hommes et des femmes. On voit défiler la diversité immense du monde, et, cependant on en revient toujours à la valeur de base : la famille – et, au-delà, un seul mot : l’amour.

Là où Human puise sa beauté et son originalité, c’est que, habilement montées entre les visages, Yann Arthus-Bertrand nous fait voler, grâce à ses caméras fluides, au-dessus de paysages surprenants – des vues aériennes de lieux jamais filmés. C’est un entrelacs prodigieux d’humains et de nature, une sorte de symphonie d’images et de visages. Retenez ce titre : attendez-vous à un choc esthétique et émotionnel. Une leçon sur ce que les hommes et les femmes vivent, et comment ils et elles ont besoin d’aide, d’entraide. C’est une véritable démonstration de ce qui fait qu’hommes, femmes et enfants vivent dans leurs différences, et, simultanément, leurs ressemblances. Human ? Une prouesse. 

 

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