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Rixe mortelle d'Echirolles : la cour se prononce mardi sur le huis clos

Le frère de Kevin Moussabi et le père de Sofiane Tadbirt, lynchés à mort en 2012,  à leur arrivée le 2 novembre 2015 au tribunal de Grenoble [JEFF PACHOUD / AFP] Le frère de Kevin Moussabi et le père de Sofiane Tadbirt, lynchés à mort en 2012, à leur arrivée le 2 novembre 2015 au tribunal de Grenoble [JEFF PACHOUD / AFP]

Douze accusés de 19 à 24 ans, deux jeunes lynchés en 2012 dans un déchaînement de violences, six semaines d'audience : le procès douloureux et périlleux de la rixe mortelle d'Échirolles s'est ouvert lundi devant les assises de l'Isère.

La cour dira mardi à 09H00 si l'audience se tiendra à huis clos, deux des accusés étant mineurs au moment des faits. La question a été longuement débattue lundi, hors public. "C'est une forme d'injustice le huis clos (...) Dans le football c'est une punition, une sanction", s'est exclamé à la sortie le frère de Kevin, une des victimes. "Nos enfants ont été assassinés en public, on voulait un débat public", a renchéri, en colère, le père de Sofiane, l'autre victime.

Des fleurs déposées le 28 septembre 2012 à Echirolles à l'endroit où Kevin et Sofiane ont été tués  [PHILIPPE DESMAZES / AFP/Archives]
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Des fleurs déposées le 28 septembre 2012 à Echirolles à l'endroit où Kevin et Sofiane ont été tués
 

"Les parties civiles ont voulu s'exprimer, la cour leur a refusé la parole, ce qui les a profondément blessées et choquées", a expliqué leur avocat, Me Francis Szpiner. Pour Me Ronald Gallo, avocat d'un des accusés, "la justice doit être rendue au nom du peuple français et non pas en secret". Même avis pour Me Bernard Ripert, soucieux d'"éviter que la justice fasse un mauvais coup en catimini". Au contraire, l'avocat général et les autres conseils de la défense réclament le huis clos pour "assurer la sérénité des débats".

"Pas une horde de sauvages"

Cheveux ras et vêtements sombres, les accusés, dont trois comparaissent libres, ont pris place, sous grosse escorte policière, derrière un box vitré conçu spécialement pour le procès, avant de décliner leur identité. Le calme régnait aux abords du palais de justice de Grenoble, sécurisé par une compagnie de CRS.

Aurelie Noubissi, la mère de Kevin, et Messaouda Tadbirt, la mère de Sofiane, lors d'une marche blanche le 28 septembre 2012 à Echirolles, en Isère  [Philippe Desmazes / AFP/Archives]
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Aurelie Noubissi, la mère de Kevin, et Messaouda Tadbirt, la mère de Sofiane, lors d'une marche blanche le 28 septembre 2012 à Echirolles, en Isère
 
"Ils ne sont pas une horde de sauvages qui viennent assassiner des jeunes", a affirmé Me Joëlle Vernay, avocat de deux accusés, dont un mineur au moment des faits. Pour elle, ce procès ne peut pas être satisfaisant: "Il y a des coupables qui sont dehors et des innocents dedans (...) La responsabilité pénale est individuelle, elle n'est pas collective." L'examen des faits ne débutera qu'à partir du 18 novembre, après l'examen des personnalités des accusés. Le procès est prévu jusqu'au 11 décembre.

Tout a commencé le 28 septembre 2012 par une bagarre devant un lycée d'Échirolles entre Wilfried, le frère de Kevin, et un autre garçon avec lequel il avait un contentieux au sujet d'une jeune fille. S'ensuivent des affrontements entre différents groupes des quartiers des Granges à Échirolles et de la Villeneuve à Grenoble. En début de soirée, dans une ambiance alcoolisée, une vingtaine de jeunes de la Villeneuve décident de lancer une expédition punitive pour venger "la fierté du quartier". Craignant des représailles, Kevin, rejoint par son ami Sofiane, attend dans le parc Maurice Thorez d'Échirolles, demandant aux plus jeunes de rentrer chez eux.

Arrestation d'une personne dans le cadre de l'enquête sur la mort de Kevin et Sofiane le 2 octobre 2012 à Echirolles [Philippe Desmazes / AFP/Archives]
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Arrestation d'une personne dans le cadre de l'enquête sur la mort de Kevin et Sofiane le 2 octobre 2012 à Echirolles
 

"Deux victimes, douze accusés : c'est impossible"

Marteau, manche de pioche, bouteille de vodka, pistolet à grenailles: le déchaînement de violences durera une vingtaine de minutes. Kevin, étudiant en master de 21 ans, est frappé de huit coups de couteau, dont un mortel au poumon. Sofiane, éducateur de 22 ans, est poignardé 31 fois, dont neuf fois dans le dos, et frappé au crâne avec un marteau. Il décédera le lendemain de multiples hémorragies internes.

Face à l'émotion suscitée par ce drame, François Hollande et Manuel Valls s'étaient rendus sur place trois jours plus tard. L'enquête a permis d'identifier la plupart des agresseurs mais sans déterminer avec certitude qui a porté les coups mortels. Les armes du crime n'ont jamais été retrouvées et la plupart des accusés, sauf deux, ont refusé d'enfreindre la règle du quartier selon laquelle "on ne balance pas".

La justice a retenu le principe de la "co-action": les douze sont donc accusés d'avoir tué Kevin et Sofiane. Et encourent 30 ans de réclusion. Un procédé que dénoncent leurs avocats, à l'instar de Me Ripert qui entend faire de ce procès "l'Outreau de la justice grenobloise": "Il y a deux victimes, il y a peut-être quatre couteaux qui ont servi à les tuer et il y a douze accusés de meurtre, c'est impossible."

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