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Ambiance "pesante" dans les écoles après les attentats

Des enfants partent à l'école le 16 novembre 2015 à Paris  [KENZO TRIBOUILLARD / AFP/Archives] Des enfants partent à l'école le 16 novembre 2015 à Paris [KENZO TRIBOUILLARD / AFP/Archives]

Une ambiance "lourde", "pesante", "parfois électrique". Dans les écoles, le renforcement des mesures de sécurité après les attentats et les menaces explicites de Daesh alourdissent le quotidien des enseignants, qui veulent cependant continuer "comme avant".

"Le climat s'est tendu, avec notamment les directives de sécurité qui n'arrêtent pas de pleuvoir", dit un professeur de sciences économiques et sociales d'un lycée du Val-d'Oise. "Ce sont des mesures auxquelles on n'avait pas l'habitude dans les écoles françaises, il va falloir s'y habituer."

De fait, la ministre de l'Éducation nationale Najat Vallaud-Belkacem doit annoncer jeudi une nouvelle salve de préconisations, axées vraisemblablement sur des formations aux premiers secours pour les enseignants.

Elles s'ajouteront à celles prononcées après le 13 novembre: interdiction de s'attrouper et, pour l'Ile-de-France, se garer devant un établissement scolaire, renforcement des patrouilles, remise à jour des plans particuliers de mise en sécurité (PPMS) propres à chaque école), etc.

La ministre de l'Education nationale Vallaud-Belkacem le 14 décembre 2015 à Paris [DOMINIQUE FAGET / AFP]
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La ministre de l'Education nationale Vallaud-Belkacem le 14 décembre 2015 à Paris

 

Certaines mesures sont obligatoires, d'autres laissées à la discrétion des responsables. Des directeurs ont décidé ainsi de supprimer les chorales et spectacles de Noël pour éviter l'entrée de nombreuses personnes étrangères à l'établissement.

Dans un lycée de l'Est parisien, la rencontre parents-professeurs de fin de trimestre a été annulée, tout comme la cérémonie de remise des diplômes du bac, prévue mi-décembre, dans un autre lycée, en banlieue nord.

Et la tension s'est accrue après les menaces de l'EI envers les enseignants, accusés d'être "en guerre ouverte contre la famille musulmane". Dans le numéro de fin novembre de sa revue francophone, le groupe jihadiste actif en Irak et en Syrie appelle à les "combattre" et les "tuer".

"M'sieur, il est parti en Syrie!"

Christian Chevalier, secrétaire général du syndicat SE-Unsa, dit avoir reçu quelques messages angoissés de ses adhérents. "Mais on sait qu'il n'existe pas de martingale, sauf à bunkériser les écoles, ce qui est impossible."

Des élèves dans une classe de CM1 de l'école La Courbe à Aytré, dans le sud-ouest le 1er septembre 2015 [XAVIER LEOTY / AFP/Archives]
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Des élèves dans une classe de CM1 de l'école La Courbe à Aytré, dans le sud-ouest le 1er septembre 2015

"Aucune mesure ne permet de faire face à des situations aussi extrêmes" qu'un attentat perpétré par un groupe déterminé, "sauf à entourer les établissements d'un rempart de sacs de sable", renchérit Philippe Tournier, secrétaire général du principal syndicat des chefs d'établissement (SNPDEN).

Les mesures existantes sont "très contraignantes" et "+consomment+ un personnel invraisemblable", souligne-t-il, "il va falloir se poser la question d'un personnel de sécurité". Comme beaucoup d'autres, ce qu'il craint avant tout, ce sont "les actes isolés de personnes déséquilibrées".

C'est à ce schéma que correspondait l'agression rapportée lundi par un instituteur d'une école maternelle de banlieue parisienne. Il prétendait avoir été attaqué au cutter par un homme masqué, qui avait invoqué l'EI. Le maître avait en fait tout inventé.

Plus que de nouvelles mesures, Frédéric Sève, du Sgen-CFDT, prône "une culture collective de la sécurité": "plutôt que l'évitement illusoire, il faut formaliser les réponses à apporter, en définissant le rôle de chaque adulte au sein d'une école. Cela rassure car chacun sait comment il devra agir."

Une femme et un enfant se recueillent un moment en mémoire des victimes de la rue de Charonne, le 16 novembre 2015 à Paris [KENZO TRIBOUILLARD / AFP/Archives]
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Une femme et un enfant se recueillent un moment en mémoire des victimes de la rue de Charonne, le 16 novembre 2015 à Paris

Au sein des établissements, des incidents provoquent quelques poussées d'angoisse. Dans un lycée de Seine-Saint-Denis, "des profs soupçonnent des départs" pour le jihad "chaque fois qu'un gamin manque plus d'une journée", raconte le conseiller principal d'éducation (CPE). "Et les mômes, qui ont très bien compris, en rajoutent. Quand les profs font l'appel et qu'un élève est absent, ils se font un plaisir de lancer: +M'sieur, il est parti en Syrie!+."

Dans un lycée du Val-d'Oise, un élève exclu par le conseil de discipline a menacé la CPE d'un "attentat". Les menaces ou violences commises par les élèves ont toujours existé, mais maintenant, elles peuvent s'assortir d'une référence à l'actualité dramatique, note un professeur de cet établissement.

Dans ce contexte tendu, "le plus important est de garder son calme", souligne Sébastien Sihr, du SNUipp, premier syndicat des enseignants du primaire. "La seule réponse est de vivre et de faire l'école comme avant". "Face à l'EI, qui veut entretenir la peur, la réponse est de travailler, comme d'habitude", approuve Frédéric Sève.

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