Philippe Labro est écrivain, cinéaste et journaliste. Chaque vendredi, pour Direct Matin, il commente ce qu'il a vu, vécu et observé pendant la semaine. Un bloc-notes subjectif et libre.
VENDREDI 13 MAI
Il y a bien trois semaines que, congés obligent, nous ne nous sommes pas rencontrés dans cette page. Heureux, donc, de vous y retrouver. Et puisque ces semaines ont été riches en actualité, essayons de faire le tri et de trouver, si possible, un fil conducteur. Mais peut-être n’y a-t-il pas de fil rouge, peut-être l’information doit-elle être prise comme le font les «twittos» : quelques signes, une formule, et basta ! Ce n’est pas tout à fait ma vision du journalisme. Essayons de trier.
Barack Obama
Il a encore une fois – la dernière – épaté, enchanté, amusé les participants au fameux dîner des correspondants de la Maison Blanche, en offrant, en guise de cadeau d’adieu, un «one-man show» que peuvent envier les plus grands comédiens d’Hollywood. Il y avait tout dans sa posture, ses sourires, le langage de son corps et les textes concoctés par des professionnels du gag, mais revus et améliorés par le président lui-même. Tout, vous dis-je : désinvolture, élégance, grâce, ironie… Ce président, que l’on regrettera bien vite, en a presque trop fait – mais le contraste avec celui (ou celle) qui lui succédera en était d’autant plus flagrant.
Donald Trump
En effet, tout assuré qu’il soit d’être désigné lors de la convention des républicains, en juillet, à Cleveland, Trump aura continué à distiller ses mensonges, sa désinformation, ses volte-face. Qu’il dise tout et son contraire ne le dérange pas, et ne trouble en rien ses supporters. Ainsi, tant que son adversaire, le sénateur texan Ted Cruz, restait dans la course, il n’a cessé de l’arroser d’injures, allant jusqu’à ridiculiser son épouse. Mais voici que Cruz abandonne. Alors, sans attendre un délai respectable, dès le lendemain matin, Trump attribue à Cruz toutes les vertus… Puisqu’aujourd’hui on est en droit de ne plus exclure la perspective qu’il accède à la Maison Blanche, on est aussi en droit de s’interroger sur la capacité de cet homme à suivre une ligne de conduite qui rassure. Paul Krugman, le très sérieux éditorialiste du New York Times, prix Nobel d’économie, vient d’écrire : «Trump ne sait rien.»
Michel Platini
Ostracisé, exfiltré, exilé du monde du foot pour quatre ans, sinon pour le reste de sa vie, Platini a-t-il été trop naïf ou trop malin – ou les deux à la fois ? C’est maintenant qu’il va compter ses vrais amis. On éprouve un sentiment de déception, de tristesse parfois, et en même temps critique à l’idée que l’un des cinq meilleurs joueurs de foot de l’histoire subisse une telle chute. De l’étonnement aussi. N’a-t-il pas vu ce qui allait arriver ? Il savait anticiper sur le terrain. J’ai le souvenir d’une conversation au cours de laquelle il m’expliquait comment il envoyait le ballon là où il prévoyait que se trouverait un partenaire. «Le football, me disait-il, en 1991, contrairement à ce que croit une majorité de gens, est une activité très complexe. Il faut voir avant. Savoir que le gars qui est là-bas, à 30 mètres, sait que je sais et que je sais qu’il sait !» De ce long entretien, et de multiples rencontres, je conserve l’image d’un homme souriant, futé, capable de synthétiser, tout dévoué à une seule et unique chose : le foot. Je déplore ce gâchis.
Kristen Stewart
En France, on l’avait découverte dans Sils Maria, qui lui valut un césar – la première fois qu’une Américaine, une étrangère, obtenait un césar de la meilleure actrice dans un second rôle. Elle est dans le nouveau Woody Allen qui vient d’ouvrir Cannes. Elle est belle, intelligente, radieuse, réfléchie, et son visage sera l’un des emblèmes de ce 69e Festival, que je souhaite, à mes amis Thierry Frémaux et Pierre Lescure, aussi réussi que le précédent… et le prochain.