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Procès Heaulme : «Monsieur, dites-nous pourquoi»

Francis Heaulme au tribunal de Metz, le 10 octobre 1994 [Jean-Philippe KSIAZEK / AFP/Archives] Francis Heaulme au tribunal de Metz, le 10 octobre 1994 [Jean-Philippe KSIAZEK / AFP/Archives]

Déjà neuf condamnations pour meurtre et pas vraiment d'explications. Alors, mardi matin, le président de la Cour d'assises de la Moselle qui juge Francis Heaulme pour un double infanticide lui a posé encore et encore une question : «Monsieur Heaulme, dites nous pourquoi».

- «Pourquoi vous tuez tous ces gens ? Il y a des enfants, des adolescents...

- Je ne sais pas.

- Il y a des femmes, des hommes, des personnes âgées. Vous ne les connaissez pas. Elles ne vous ont rien fait. Elles ont eu la malchance de croiser votre route.

- Je ne peux pas vous dire, je sais pas.

- Qu'est ce qui vous prend ?

- Montigny, c'est pas moi», se défend alors Francis Heaulme, qui comparaît depuis le 25 avril pour le meurtre de deux enfants en septembre 1986 à Montigny-lès-Metz. Le magistrat repart à la charge.

- «Je ne parle pas de Montigny. Monsieur Heaulme pourquoi ? (...) Quel est le mobile ? Pourquoi ?

- On se moque de moi...»

Mains posées sur le bois, la silhouette cassée, penché, Francis Heaulme, le pantalon un peu lâche, beige, sous un pull bleu, écoute le monologue sanglant du président.

Croquis d'audience lors du procès de Francis Heaulme, le 25 avril 2017 à Metz [Benoit PEYRUCQ / AFP]
Croquis d'audience lors du procès de Francis Heaulme, le 25 avril 2017 à Metz. [Benoit PEYRUCQ / AFP]

Annick Maurice, Lyonelle Gineste, Joris Viville ... toutes les victimes du «routard du crime», les circonstances de leurs morts, l'état de leurs cadavres font irruption dans la salle, aux côtés de Cyril Beining et Alexandre Beckrich, les deux victimes de ce procès. Revenant sur la mort d'Annick Maurice, 26 ans, le président continue.

- « Pourquoi vous avez pris la vie de cette jeune fille qui allait travailler. Pourquoi ? Et pourquoi l'étrangler, et encore la frapper Monsieur Heaulme, pourquoi ?»

Silence.

- «Elle vous a regardé de travers?»

Silence. Après la description en détail de la mort de deux vieilles dames, lacérées de coups de couteaux, le président s'adresse à nouveau à Heaulme.

- «Il y a des circonstances ou vous "voyez rouge"», une phrase qui revient dans plusieurs des dépositions de l'accusé, «et après vous ne voyez plus rien ?»

- «Je ne répondrai plus aux questions, prévient Heaulme. C'est pour m'enfoncer un peu plus, comme Monsieur Abgrall», le gendarme qui l'a confondu en 1992, et qui doit venir témoigner mardi après-midi. «Y a pas neuf meurtres, poursuit Heaulme. Quand les inspecteurs me questionnaient, ils trouvaient pas le coupable, il leur fallait un coupable, alors je leur racontais n'importe quoi pour qu'ils me laissent tranquille».

- «Monsieur Heaulme je veux comprendre...», avance le président.

- «Problèmes d'alcool».

Silencieux, l'accusé de 58 ans, impassible depuis le début du procès, écoute la suite de l'inventaire à la Prévert recouvert d'hémoglobine.

- «Dans toutes ces affaires, la scène de crime est désorganisée. Dans toutes ces affaires, on voit que les victimes présentent des blessures multiples, et qu'il y a un acharnement excessif qui n'a pas de sens. Un acharnement qui va au delà de donner la mort...

- Montigny c'est pas moi...

- Dans chacune de ces affaires, les endroits sont isolés, on voit un déshabillage partiel ou total des victimes. Après chacune des affaires, vous êtes admis dans un service d'urgence (...) Francis Heaulme, vous ne voulez pas éclairer la cour ?»

Silence. La défense se lève, tente de souligner des inexactitudes. Le président intervient. «Si vous n'avez pas de questions à Francis Heaulme...» L'audience est suspendue.

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