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Violences en Haïti : le gouvernement fait marche arrière sur la hausse des produits pétroliers

Le président haïtien Jovenel Moïse a appelé samedi soir les manifestants à quitter les rues, paralysées par des vagues de violences depuis vendredi après-midi, car il avait «corrigé ce qu'il y avait à corriger», à savoir suspendre la décision d'augmenter les prix des produits pétroliers.

«Dès que vous parlez, j'écoute. Parce que vous avez commencé à m'envoyer ce message depuis hier soir, je l'ai reçu et j'ai corrigé ce qu'il y avait à corriger», a déclaré Jovenel Moïse dans son message à la nation retransmis sur la chaîne de télévision d'État.

«Vous qui me regardez ce soir, je vous demande à tous: rentrez chez vous. La police et la justice vont prendre le contrôle pour nettoyer les rues», a-t-il ajouté. 

«Etat responsable»

 Lors de son discours d'une vingtaine de minutes, le chef de l'État haïtien, accompagné de son épouse, n'a pas fait d'importantes annonces face à l'ampleur des destructions mais a adressé un mot de soutien aux victimes. 

«Je leur dis que je ne dirige pas un Etat irresponsable: cet Etat sera toujours là face aux responsables de ces actes parce que nous, Haïtiens, avons des gens pour nous diriger», a affirmé Jovenel Moïse.

Depuis vendredi après-midi, la capitale est totalement paralysée par les violences: nombre de commerces ont été pillés et incendiés. Beaucoup de véhicules ont été brûlés par les groupes de contestataires dressant des barricades à une large majorité de carrefours, empêchant quantité de personnes de rentrer chez elles. 

Vendredi soir, un policier assigné à la sécurité d'un dirigeant d'un parti politique d'opposition a été tué dans une altercation avec un groupe de manifestants au coeur de la capitale haïtienne. Il a été lynché alors qu'il cherchait à forcer le passage, et son corps a ensuite été brûlé sur la chaussée.

Samedi après-midi, un jeune homme a été tué par balles à proximité d'un supermarché pris d'assaut par la foule, a pu constater un journaliste de l'AFP.

Sans une telle vague destructrice, des mouvements similaires de colère ont été enregistrés au Cap-Haïtien, la deuxième ville du pays, ainsi que dans les communes des Cayes et de Jacmel et de Petit-Goave.

Samedi après-midi, le Premier ministre haïtien Jack Guy Lafontant avait finalement annoncé via twitter «la suspension de la mesure d'ajustement des prix des produits pétroliers jusqu'à nouvel ordre». Peu avant cette annonce, le président de la chambre des députés Gary Bodeau avait lancé un ultimatum de deux heures au gouvernement pour revenir sur la hausse des prix, sans quoi le gouvernement serait "considéré comme démissionnaire». 

Avant même la prise de cette mesure controversée, le Premier ministre, nommé en mai 2017, était déjà très critiqué pour son inaction. Une séance pour statuer sur son avenir à la tête du gouvernement avait été entamée la semaine dernière, à la chambre des députés, dont la majorité est acquise au président Jovenel Moïse. Plusieurs parlementaires ont appelé à une reprise de cette séance lundi matin.

Le recul, après moins de 24 heures, du gouvernement sur la révision des tarifs des produits pétroliers pourrait mettre un terme à son mandat et de facto entrainer la chute du gouvernement. 

Outre les perspectives politiques incertaines, la situation reste tendue dans la capitale et l'absence de décisions concrètes dans l'allocution présidentielle risque de ne pas satisfaire les revendications des manifestants, dont beaucoup exigent son départ du pouvoir. 

Des hausses insupportables

 Plusieurs compagnies aériennes comme American Airlines et Air France ont annulé leurs vols samedi et la mesure va majoritairement continuer à s'appliquer dimanche matin. 

En début d'après-midi vendredi, les ministères de l'Économie, des Finances, du Commerce et de l'Industrie avaient annoncé une augmentation des prix de l'essence de 38%, celui du diesel de 47% et celui du kérosène de 51%, à compter du samedi 7 juillet à minuit.

Le nouveau cadre de référence entre le Fonds monétaire international (FMI) et Haïti, signé en février, impliquait la cessation de la subvention publique des produits pétroliers, source conséquente du déficit budgétaire de l'État. 

Cette importante hausse est perçue comme insupportable par la majorité de la population qui fait face à une pauvreté extrême, un chômage de masse et une inflation supérieure à 13% pour la troisième année consécutive.

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