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En Bourgogne, on vendange en respectant la tradition

Sur les hauteurs de Pernand-Vergelesses (Côte-d'Or), les vendangeurs du domaine Pavelot coupent des grappes qui se changeront bientôt en Corton-Charlemagne, prestigieux grand cru blanc. Ils les déposent dans des paniers en osier, comme autrefois. Et c'est bien plus qu'une simple tradition.

"On a un rapport à la matière, on entend que ça crisse, c'est pas de la caisse en plastique!", lance Sébastien Nicolas, l'un des porteurs. Ces paniers faits de deux corbeilles, de part et d'autre de l'anse, pèsent tout de même 35 à 40 kilos pleins.

"C'est vraiment une technique: une fois qu'on a réussi à avoir la bonne position, on est bien", affirme cet ébéniste lorrain de 44 ans à la barbe poivre et sel. Il revient "quasiment tous les ans, depuis quelques années" vendanger dans une maison dont il apprécie le "côté artisanal".

Dans les vignes, les vendangeurs chantent en remontant les pentes escarpées de la colline de Corton. Les porteurs plaisantent tout en essaimant les paniers vides dans les rangs. Puis il faut s'y mettre à deux pour charger les paniers pleins à l'épaule.

Porteurs de paniers au travail le 5 septembre 2018 pour les vendanges à Pernand-Vergelesses, en Bourgogne [PHILIPPE DESMAZES / AFP]
 
Porteurs de paniers au travail le 5 septembre 2018 pour les vendanges à Pernand-Vergelesses, en Bourgogne

Tous saluent Régis Pavelot, 76 ans, l'ancien patron du domaine, aujourd'hui géré par l'un de ses fils, Luc, et sa fille Lise. Lorsqu'il vient assister aux vendanges, son regard aiguisé remarque la plus petite grappe oubliée. "Ça fait pratiquement 66 ans que je crapahute dans les vignes. J'ai toujours connu le panier", raconte-t-il. "A un moment, la caisse plastique est arrivée, les paniers ont été rangés dans les greniers. Quelques domaines ont persisté et, progressivement, ça s'est éteint."

Le domaine familial de 9 hectares, qui produit des vins rouges et blancs bio, est l'un des derniers à les utiliser. Certaines "grosses maisons" en emploieraient aussi quelques-uns, surtout pour le folklore.

Raisin mieux ventilé

Au delà de ce "côté folklorique", le patriarche a d'autres arguments: "l'évacuation des ruissellements d'eau sous la pluie, le fait qu'il n'y ait pas d'écrasement du raisin quand on superpose les paniers: des choses qui vont à mon avis dans le sens de la qualité". Grâce à cette technique, "on ne rentre pas trop de terre" et "le raisin est ventilé à travers l'osier", ajoute son fils Luc, qui met aussi en avant l'aspect esthétique d'un outil façonné en Bourgogne "dès le XIXe siècle".

Récolte 2018 de raisin pour le futur cru de Corton-Charlemagne, le 5 septembre 2018 [PHILIPPE DESMAZES / AFP]
Récolte 2018 de raisin pour le futur cru de Corton-Charlemagne, le 5 septembre 2018

Le dessin d'un porteur de panier s'affiche d'ailleurs sur toutes les bouteilles de la maison. "Dès le début ça a été l'image du domaine", souligne le viticulteur de 49 ans, héritier d'une famille qui cultive la vigne dans le village depuis environ quatre siècles. A intervalles réguliers, les camions apportent à la cuverie leur chargement de paniers débordant de raisin. Comme en 2017, "on a vraiment un très beau millésime, blanc comme rouge", se félicite Luc Pavelot. Des récoltes abondantes qui viennent rattraper "des années plutôt catastrophiques" en raison d'aléas climatiques.

Les portes de réception du pressoir ou encore les tables de tri ont dû être adaptées à la taille des paniers, plus large que la normale. "On travaille ainsi depuis longtemps. Les spécialistes de matériel vinicole nous écoutent" pour réaliser ces aménagements, indique le vigneron. Si les paniers étaient autrefois confectionnés par un caviste de Beaune, il a fallu trouver de nouveaux fournisseurs. Dans le Jura, d'abord, chez un vannier qui a récemment pris sa retraite, aujourd'hui remplacé par un artisan de Haute-Marne.

 

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