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La garde à vue de Carlos Ghosn prolongée de 10 jours au Japon

Le conseil d'administration de Renault s'est retrouvé mardi soir pour mettre en place une gouvernance intérimaire, alors que le PDG, Carlos Ghosn est au coeur d'une enquête au Japon sur des soupçons de malversation. Mercredi, on a appris mercredi que sa garde à vue serait prolongée de dix jours au Japon.

Le numéro deux de l'entreprise, Thierry Bolloré, avait finalement été choisi mardi soir pour assurer l'intérim. Âgé de 55 ans, celui que Ghosn avait choisi comme bras droit en février dernier aura les «mêmes pouvoirs» que le PDG, «à titre provisoire». 

Lâché de toutes parts

Le conseil d'administration de Nissan se prononcera, lui, sur le limogeage de son président jeudi matin. Mitsubishi Motors (MMC) entend également le «démettre rapidement». Lâché de toutes parts, Carlos Ghosn, considéré à 64 ans comme un des plus puissants capitaines d'industrie au monde, est toujours détenu à Tokyo, où il a été arrêté lundi en descendant de son jet privé.

Le centre de détention où se trouve Carlos Ghosn, à Tokyo, le 20 novembre 2018 [Toshifumi KITAMURA / AFP]
Le centre de détention où se trouve Carlos Ghosn, à Tokyo, le 20 novembre 2018

Le parquet japonais reproche au Franco-libano-brésilien d'avoir «conspiré pour minimiser sa rétribution à cinq reprises entre juin 2011 et juin 2015», en ne déclarant que 4,9 milliards de yens (environ 37 millions d'euros) contre près de 10 milliards de yens sur la période. Dans une conférence de presse d'une brutalité hors du commun, le président exécutif de Nissan, Hiroto Saikawa, a également mentionné lundi «de nombreuses autres malversations, telles que l'utilisation de biens de l'entreprise à des fins personnelles», qui auraient été découvertes après plusieurs mois d'enquête interne.

M. Ghosn aurait en outre, selon la chaîne publique NHK, empoché des sommes déclarées au nom d'autres administrateurs.

Le siège de Mitsubishi Motors à Tokyo, le 20 novembre 2018 [Behrouz MEHRI / AFP]
Le siège de Mitsubishi Motors à Tokyo, le 20 novembre 2018

La rémunération de ce patron aussi puissant que secret a déjà donné lieu à bien des polémiques, tandis que son train de vie a également pu susciter des commentaires, à l'image par exemple de sa réception de mariage en grande pompe au château de Versailles en 2016. Carlos Ghosn touchait quelque 15 millions d'euros par an au titre de ses diverses fonctions, un montant particulièrement élevé pour un industriel européen ou japonais, bien que très éloigné des faramineux salaires versés par exemple dans la finance aux États-Unis.

Fragile équilibre 

Au-delà du sort personnel de M. Ghosn, c'est toute l'alliance Renault-Nissan-Mitsubishi Motors, dont il orchestrait le fragile équilibre, qui tangue à la suite de ce coup de tonnerre.

Comparaison des principaux résultats économiques de Renault et Nissan (chiffres 2017) [Aude GENET / AFP]
Comparaison des principaux résultats économiques de Renault et Nissan (chiffres 2017)

Il n'y a qu'à entendre les mots très durs de M. Saikawa, contre celui qui fut son mentor et une figure très respectée au Japon : «c'est un problème que tant d'autorité ait été accordée à une seule personne», a-t-il lâché, dénonçant «le côté obscur de l'ère Ghosn».

L'affaire survient au moment où le PDG de l'ensemble aux 10,6 millions de véhicules travaillait, selon le Financial Times, à une fusion entre Renault et Nissan, une opération que le constructeur japonais rejetait et cherchait à bloquer de crainte qu'elle ne grave dans le marbre son statut de «second ordre» dans la structure, toujours selon le quotidien. M. Ghosn voulait rendre les liens «irréversibles» entre Renault et Nissan, a commenté dans une note Kentaro Harada, analyste chez SMBC Nikko Securities.

«Nous ne pouvons pas exclure la possibilité que l'alliance se retrouve affaiblie». «Cela va-t-il changer l'équilibre du pouvoir (entre les parties française et japonaise), c'est la principale question», souligne-t-il.

L'agence de notation Standard and Poor's a d'ailleurs annoncé mardi qu'elle envisageait de baisser la note de la dette à long terme de Nissan, en raison en particulier des doutes autour de ce mariage à trois. De son côté, Renault tentait de se montrer rassurant, affirmant mardi soir vouloir continuer à faire progresser son alliance avec ses partenaires. De même, les gouvernements français et japonais ont réaffirmé mardi dans un communiqué commun leur «important soutien» à l'alliance entre les constructeurs Renault et Nissan.

Les déboires judiciaires de M. Ghosn ont néanmoins suscité l'inquiétude d'employés rencontrés par l'AFP à l'usine de Flins (Yvelines), dont la moitié de la production est constituée de Nissan, témoin de l'étroite imbrication des deux entreprises. A Paris, le titre Renault a terminé mardi sur un recul de 1,19%, après avoir déjà dévissé de plus de 8% lundi. Les actions des constructeurs japonais ont souffert mardi à Tokyo, terminant en baisse de 5,45% pour Nissan et de 6,84% pour MMC.

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