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Tout savoir sur le projet de taxe GAFA, qui arrive au Sénat

Cette taxe GAFA devrait rapporter à la France 400 millions d'euros cette année, puis environ 650 millions à l’horizon 2022. Cette taxe GAFA devrait rapporter à la France 400 millions d'euros cette année, puis environ 650 millions à l’horizon 2022. [Lionel BONAVENTURE / AFP]

Après avoir été adopté en première lecture par l'Assemblée nationale début avril, le projet de taxe GAFA (acronyme pour Google, Amazon, Facebook et Apple) sera examiné par le Sénat mardi 21 et mercredi 22 mai.

Quel est le problème avec l'imposition des GAFA aujourd'hui ?

Selon la Commission européenne, le taux d'imposition moyen des géants du numérique n'est que de 9 %, contre 23 % pour les entreprises européennes en général. Ces sociétés profitent en effet du système fiscal européen et mondial actuel pour faire de l'optimisation.

Selon les règles en vigueur aujourd'hui, une firme doit payer des impôts sur ses bénéfices dans le pays où elle est présente physiquement. Les entreprises du numérique, notamment les GAFA, ont ainsi localisé leurs filiales européennes dans les pays où les taux d'imposition sont les plus faibles, comme l'Irlande ou le Luxembourg. Elles ont dans le même temps limité leur présence physique dans les autres Etats, mais en y restant présentes, jouant sur le caractère immatériel de leurs activités.

Ainsi, Google France a par exemple déclaré en 2017 un chiffre d'affaires de 325 millions d'euros, sur lesquels elle a déboursé 14 millions d'euros d'impôts sur les sociétés. Pourtant, selon les estimations du Syndicat des régies internet (SRI), le chiffre d'affaires de Google en France est estimé à environ 2 milliards d'euros en prenant en compte seulement les recettes publicitaires.

En quoi consiste la taxe GAFA que veut instaurer la France ?

L'idée de la taxe GAFA à la française est d'imposer les géants du numérique sur le chiffre d'affaires effectivement réalisé en France. Concrètement, la France compte prélever 3 % des revenus générés par ces sociétés dans l'Hexagone grâce aux publicités en ligne, à la vente de données personnelles à des fins publicitaires et à la mise en relation des internautes par les plates-formes.

Seules les entreprises dont le chiffre d'affaires sur leurs activités numériques s'élève à au moins 750 millions d'euros dans le monde et plus de 25 millions d'euros en France seront concernées par cette taxe. Ainsi, selon le ministre de l'Economie Bruno Le Maire, elle devrait s'appliquer à une trentaine de groupes, parmi lesquels Meetic, Amazon, Airbnb, Instagram ou encore la française Criteo. Prélevée rétroactivement dès le 1er janvier, elle devrait rapporter 400 millions d'euros cette année, puis 450 millions en 2020, et atteindre environ 650 millions à l’horizon 2022.

Une mesure jugée insuffisante par l'organisation altermondialiste Attac, qui a calculé que 64 % en moyenne du chiffre d'affaires des GAFAM (Google, Amazon, Facebook, Apple, Microsoft) en France ne sera pas couvert par cette taxe.

Pourquoi est-elle critiquée par les Etats-Unis ?

Dans un communiqué publié le 4 avril dernier, le chef de la diplomatie américaine, Mike Pompeo, a «exhorté la France à ne pas adopter une taxe sur les services numériques qui aurait un impact négatif sur les géants américains de la technologie et sur les citoyens français qui utilisent leurs services».

Par ailleurs, Washington juge cette taxe, qui cible prioritairement les mastodontes américains, «extrêmement discriminatoire à l'égard des multinationales basées aux États-Unis». Un argument déjà utilisé en mars dernier par le Trésor américain, qui avait annoncé à ce moment-là que les Etats-Unis envisageaient de saisir l'Organisation mondiale du commerce (OMC) contre les taxes GAFA que la France et d'autres pays européens voulaient créer.

Pas de quoi faire vaciller la volonté de Bruno Le Maire, qui a répliqué le 5 avril que la France était «décidée à mettre en oeuvre une taxe sur les plus grandes entreprises du numérique». «Tous les Etats prennent librement et souverainement leurs décisions en matière fiscale», a-t-il ajouté.

Existe-t-il des projets similaires dans d'autres pays ?

A l'origine, Paris voulait que cette taxe GAFA soit mise en place à l'échelle de l'Union européenne. Mais face à l'opposition de l'Irlande, la Suède, le Danemark et la Finlande, ce projet semble dans l'impasse. C'est pour cette raison que la France a décidé d'instaurer une taxe nationale, mais elle n'est pas la seule.

L'Autriche fait également figure de pionnière, aux côtés de l'Hexagone. Le gouvernement autrichien a en effet détaillé le 3 avril son projet de taxation des géants du numérique, qui va plus loin que celui de la France, puisqu'il prévoit de les taxer à hauteur de 5 % sur les revenus publicitaires réalisés dans le pays. Des mesures similaires sont également dans les tuyaux au Royaume-Uni, en Espagne ou encore en Italie.

En attendant une taxe mondiale sur les GAFA. Fin janvier, l'OCDE, qui regroupe 36 des pays les plus développés de la planète, a obtenu l'engagement de 127 Etats à travailler sur un projet de taxation des multinationales, notamment dans le secteur du numérique. L'organisation espère trouver un «consensus d’ici à 2020».

Une ambition réitérée par Bruno Le Maire devant les députés le mois dernier. Le locataire de Bercy a en effet promis de ne pas relâcher ses efforts «jusqu'à ce que l'OCDE se mette d'accord», jugeant cela «possible dès 2020». La France retirera alors «naturellement sa taxe nationale», a-t-il déclaré.

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