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«Planète Méditerranée» : Un plongeur de l’extrême remonte à la surface après 28 jours à 120 m de fond

Après quatre semaines dans les grands fonds, ce biologiste et photographe sous-marin revient avec des milliers d'images. [©Boris HORVAT / AFP]

Après 28 jours passés 120 m à ausculter la Méditerranée, entre Marseille et Monaco, Laurent Ballesta a retrouvé l’air libre, ce dimanche à la cité phocéenne, en sortant de son caisson pressurisé.

«La scène d'amour vache de deux murènes. Les cathédrales de roches de la falaise sous-marine du cap Taillat...», après quatre semaines dans les grands fonds, ce biologiste et photographe sous-marin revient avec des milliers d'images. Mais celle qu'il cherche, à peine sorti de ce caisson où il vient de vivre une lente décompression de trois jours, c'est celle de Caroline, sa compagne, et d'Elea, sa fille de deux mois.

«J'avais sous-estimé ce retour sur terre. C'est plus émouvant que prévu», lâche-t-il, les larmes aux yeux. Fini donc cet univers minuscule, tracté par un remorqueur, qui lui a permis, pendant quatre semaines, avec ses trois comparses, Antonin Guilbert, Thibault Rauby et Yannick Gentil, de lutter contre les éléments. Car à 120 m de fond, l'homme est un intrus. La pression est 13 fois supérieure qu'à la surface terrestre.

Pour une demi-heure de plongée dans cette zone crépusculaire, sas d'entrée vers les abysses, il faut cinq heures de remontée jusqu'à la surface. «Grâce à ce caisson, qui reproduit l'atmosphère à 120 m, fini ces paliers de décompression. Nous n'avions plus aucune limite de temps, sauf notre résistance», explique Laurent Ballesta, l'initiateur de «Planète Méditerranée», cette expédition partie le 1er juillet de Marseille.

Chaque jour, les plongeurs descendent donc dans les entrailles de la Grande Bleue via la «tourelle», un ascenseur qui les amène à la profondeur requise en à peine 3 minutes. Une fois la porte ouverte, le travail peut commencer.

«Nous vivons tous sur la même planète, mais il y a plusieurs mondes, et nous avons eu l'honneur d'explorer un autre monde. Barbiers perroquets, poissons lézards, morues cuivrées : à chaque plongée ou presque, nous avons pu filmer ou photographier une espèce qui n'avait jamais été observée vivante dans son milieu».

Le froid : un ennemi permanent

Missionnés par divers chercheurs, laboratoires ou universités, les quatre hommes ont effectué des prélèvements d'ADN sur une dizaine d'espèces de poissons. «Grâce à des bouturages, nous avons aussi permis de faire avancer la connaissance sur la génétique des gorgones ou du corail noir». De même, les quatre hommes ont longuement travaillé sur l'ADN environnemental, cette technique qui permet de connaître les espèces vivant à ces profondeurs en analysant l'eau dans laquelle ils évoluent : «Nous étions comme des experts sur une scène de crime», sourit Laurent Ballesta.

Analyses des récifs corraligènes, ces refuges pour la biodiversité des grandes profondeurs, afin de déterminer s'ils ne seraient pas des puits de carbone appréciables en ces temps de changement climatique. Inspection du tuyau de sortie des eaux usées de la métropole de Nice, avec prélèvements de sédiments pour évaluer l'impact des rejets humains. Des dizaines d'expériences sont menées.

Avec un ennemi permanent : le froid. A ces profondeurs, l'eau est à 13 degrés. «Malgré les sous-vêtements polaires et les combinaisons étanches, on était très vite en souffrance dans les scaphandres. A ces pressions, la température ressentie est beaucoup plus basse. Finalement c'était plus dur que l'eau à 2 degrés que j'ai connue sous la banquise dans l'Antarctique».

Le 20 juillet, le froid n'empêche pas les quatre plongeurs d'effectuer la plus longue visite jamais faite -six heures-, de l'épave du Natal, un paquebot qui a coulé en 1917 au large de Marseille. Parmi les objets encore visibles ayant appartenu à la centaine de passagers, des espèces rarissimes, jamais photographiées dans leur milieu naturel, comme ces limberts à filament ou «poissons lézards».

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