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Suspendu lundi, le procès de l'ex-prêtre Preynat démarre à Lyon

L'ex-prêtre Bernard Preynat, accusé d'agressions sexuelles sur des mineurs, quitte le tribunal de Lyon, le 13 janvier 2020 [PHILIPPE DESMAZES / AFP] Âgé de 74 ans aujourd'hui, l'ex-curé réduit à l'état laïc au terme de son procès canonique l'été dernier, encourt jusqu'à 10 ans d'emprisonnement. [PHILIPPE DESMAZES / AFP]

Perturbé lundi par une grève des avocats, le procès de l'ex-prêtre Bernard Preynat, dont les agissements pédophiles passés sous silence par l’Église ont déclenché l'affaire Barbarin, démarre enfin ce mardi 14 janvier plus de 30 ans après les faits.

«Ce qui est important, c’est que le procès ait quand même lieu», estime l'une des parties civiles, Pierre-Emmanuel Germain-Thill, après cette suspension de 24 heures accordée aux avocats grévistes par les juges du tribunal correctionnel.

Les victimes ont confié qu'elles auraient difficilement supporté que le tribunal accède au renvoi total demandé par le bâtonnier de Lyon. Cela aurait impliqué un report de plusieurs mois. Elles ont déjà attendu des dizaines d'années pour que soient jugés des faits commis entre 1971 et 1991, alors qu'elles étaient âgées de 7 à 15 ans.

Bernard Preynat, alors vicaire-aumônier scout de Sainte-Foy-Les-Lyon (Rhône), faisait à l'époque l'admiration des parents du diocèse, qui lui confiaient leurs enfants dans sa paroisse ou lors de camps à l'étranger.

Ce n'est qu'en 2015 que plusieurs anciens scouts brisent l'omerta de l’Église en accusant Preynat devant la justice d'attouchements, baisers sur la bouche et caresses réciproques contraintes, notamment sur le sexe.

Âgé de 74 ans aujourd'hui, l'ex-curé réduit à l'état laïc au terme de son procès canonique l'été dernier, encourt jusqu'à 10 ans d'emprisonnement. Reconnaissant la plupart des faits, il a eu le temps d'afficher sa contrition lundi face au tribunal avant l'annonce de la suspension des débats.

Se présentant d'emblée comme «coupable» de la douleur des parties civiles, le prévenu, veste noire et barbe grise, a émis le souhait que «ce procès ait lieu le plus vite possible car cela fait déjà cinq ans que cette procédure a commencé».

L'enquête a révélé que ce titulaire d'un CAP de cuisinier ordonné en 1971 avait perpétré ses premières agressions contre des enfants dès l'âge de 17 ans, alors qu'il était moniteur de colonie de vacances, en 1962.

De son côté, l'intéressé soutient qu'il a suivi une thérapie à l’hôpital du Vinatier, près de Lyon, en 1967 et 1968, et totalement cessé ses abus au début des années 1990. Des signalements postérieurs ont été enregistrés mais l'enquête n'en a retenu aucun.

L'avocat Serge Deygas, président du barreau de Lyon, s'adresse à la presse après le renvoi du procès de l'ex-prêtre Bernard Preynat, à Lyon le 13 janvier 2020 [PHILIPPE DESMAZES / AFP]
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L'avocat Serge Deygas, président du barreau de Lyon, s'adresse à la presse après le renvoi du procès de l'ex-prêtre Bernard Preynat, à Lyon le 13 janvier 2020

 

Ayant déjà livré ses aveux aux enquêteurs, Preynat sera sans aucun doute condamné, mais on ignore à quelle peine. Son défenseur Frédéric Doyez a indiqué qu'il s'efforcerait «d'établir les faits au procès» en dépit de leur ancienneté.

Pour défendre son client, on s'attend à ce qu'il relance le débat juridique sur la prescription autour des délits - et non des crimes - reprochés à Preynat, qu'il rappelle que l'histoire délictuelle de l'ex-curé remonte à sa propre adolescence, selon son expertise psychiatrique, et qu'il mette en avant le fait que Preynat affirme avoir retrouvé le droit chemin depuis de nombreuses années.

«Ce sont des faits qui auraient pu être jugés il y a 30 ans, on va savoir pourquoi on n'a pas frappé à la porte d'un tribunal au lieu de frapper à la porte d'un évêché. On va savoir pourquoi l'absence de réponse pénale a pu satisfaire à cette époque-là», a déclaré à l'AFP Me Doyez, pointant sans le dire la responsabilité de certains parents, tout en regrettant que le procès Preynat n'ait pas eu lieu en même temps que celui du cardinal Barbarin.

Sous l'impulsion de l'association de victimes «La Parole Libérée», Philippe Barbarin, Primat des Gaules depuis 2002, a été traduit puis condamné en mars 2019 à six mois de prison avec sursis pour ne pas avoir informé la justice et maintenu le prêtre en poste dans le diocèse jusqu'en 2015, alors que Bernard Preynat était passé aux aveux devant ses supérieurs dès 1991.

Désormais en retrait du diocèse - sa démission a été refusée par le pape - le cardinal Barbarin attend en coulisses la décision de la cour d'appel sur son dossier. Elle sera dévoilée le 30 janvier.

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