Dans son édition parue dimanche 5 avril, Le Parisien a décidé d'interroger quatres experts d'horizons différents pour imaginer le «monde d'après», celui qui succédera à la crise majeure que nous vivons en raison de l'épidémie de coronavirus. Mais bien qu'affichant des champs d'expertise très différents, les quatres individus auxquels le journal donne la parole et qui figurent sur la couverture présentent des similitudes aussi frappantes que gênantes.
Le climatologue Jean Jouzel, le commissaire européen Thierry Breton, le politologue Yascha Mounk, et le médecin généticien Axel Kahn invités à s'exprimer sur «l'après» sont tous des hommes blancs, d'un certain âge. La «Une» du Parisien donne donc l'impression que l'invention du monde de demain n'appartiendra qu'à cette catégorie de personne excluant de fait les personnes noires, les femmes et tous les autres individus racisés.
La Une du Parisien de ce dimanche 5 avril 2020
> https://t.co/vMCR4dnFp4 pic.twitter.com/bJuy92sUT2— Le Parisien (@le_Parisien) April 4, 2020
Aussitôt diffusée dimanche, la couverture a provoqué de nombreuses réactions sur Twitter. Des femmes politiques issues de tout bord se sont insurgées.
Des femmes politiques de tout bord s'insurgent
Aurore Bergé de LREM a rappelé que les femmes étaient «sur représentées» et en «1ère ligne du monde d'aujourd'hui». «Alors, non, le monde d'après ne s'écrira pas sans elles», a-t-elle tranché.
En 1ère ligne du monde d'aujourd'hui, les femmes sont sur représentées.
Alors, non, le monde d'après ne s'écrira pas sans elles. pic.twitter.com/9nSvr3mhGa— Aurore Bergé (@auroreberge) April 5, 2020
Ça commence bien «le monde d'après», estime Clémentine Autain (LFI), plus ironique.
Ça commence bien "le monde d'après" @le_Parisien ! Qui ne va quand même pas feminiser, rajeunir et colorer les voix autorisées à donner leur avis sur l'avenir.... pic.twitter.com/URoymJWfxT
— Clémentine Autain (@Clem_Autain) April 5, 2020
Yaël Braun-Pivet (LREM), la Présidente de la Commission des Lois de l'Assemblée Nationale, s'interroge : «Les femmes ont-elles déjà perdu le droit de penser le monde d’après ?».
« N’oubliez pas qu’il suffira d’une crise politique, économique ou religieuse pour que les droits des femmes soient remis en cause ». Les femmes ont-elles déjà perdu le droit de penser le monde d’après ? #simonedebeauvoir #JamaisSansElles #leparisien pic.twitter.com/uTn2puWKdX
— Yaël BRAUN-PIVET (@YaelBRAUNPIVET) April 5, 2020
La députée des Hauts-de-Seine LR, Constance Le Grip, a également rappelé le rôle des femmes dans la crise actuelle. «Dans les hôpitaux,dans les Ehpad,dans les supermarchés,dans les commerces, dans les laboratoires,dans l'enseignement,les femmes sont en 1ère ligne!», a-t-elle écrit sur son compte Twitter.
Cette une du Parisien est totalement à côté de la plaque!!Dans les hôpitaux,dans les Ehpad,dans les supermarchés,dans les commerces, dans les laboratoires,dans l'enseignement,les femmes sont en 1ère ligne!Le "monde d'après" ne se construira pas sans elles! #JamaisSansElles pic.twitter.com/VdmLMj3eFM
— Constance Le Grip (@ConstanceLeGrip) April 5, 2020
«Un monde sans femme c’est votre vision c’est pathétique», a jugé Nathalie Goulet, sénatrice centriste de l'Orne.
Franchement vous n’en avez pas assez du 100% testostérone en plus vous ne vous en rendez même pas compte !!! Un monde sans femme c’est votre vision c’est pathétique pic.twitter.com/yZAkzMSMSR
— Nathalie Goulet (@senateur61) April 5, 2020
Le Parisien admet une «erreur»
Face au déferlement de critiques, le Parisien a fait son mea culpa sur Twitter. Le directeur des rédactions a donné raison aux auteur.e.s des critiques et a admis une erreur.
... Cette erreur est pour nous un rappel à l'ordre et à la vigilance. Elle restera comme une des pierres du "monde d'après" que nous voulons continuer de construire avec vous.
(2/2).— Stéphane Albouy (@StephaneAlbouy) April 5, 2020
«Vous avez été nombreux ce matin à critiquer et relayer la Une de notre journal où "le monde d'après" était exclusivement dessiné par des hommes. Vous avez raison. Il s'agit là d'une maladresse qui n'illustre en rien la ligne éditoriale du Parisien», a écrit le directeur des rédactions du Parisien, Stéphane Albouy sur Twitter.
«Cette erreur est pour nous un rappel à l'ordre et à la vigilance. Elle restera comme une des pierres du "monde d'après" que nous voulons continuer de construire avec vous», a-t-il poursuivi.