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Paris : ces deux arrondissements qui peuvent basculer à gauche

Florence Berthout, la maire sortante du 5e arrondissement, avec Agnès Buzyn, la candidate LREM. [© Christophe ARCHAMBAULT / AFP]
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Alors que le rapport de force semble plutôt figé à Paris, deux arrondissements pourraient changer de bord lors du second tour des municipales : le 5e et le 9e. Dans des configurations opposées, les deux maires LREM connaissent des difficultés, dont pourrait profiter la gauche d'Anne Hidalgo.

«Les municipales profitent généralement aux sortants, mais les situations ici sont très incertaines. Les deux matchs peuvent basculer d'un côté comme de l'autre», anticipe Frédéric Dabi, directeur général adjoint de l'IFOP.

Dans le 5e arrondissement, le seul duel gauche-droite de la capitale pourrait bien tourner en faveur d'Anne Hidalgo. Un sondage récent de l'IFOP pour le Parti Socialiste, que révèle CNEWS, place la candidate PS-EELV en tête au second tour. Marie-Christine Lemardeley recueillerait 51 % des voix, contre 49 % à sa rivale Florence Berthout.

Le 5e arrondissement, ex-bastion de la droite ?

Une enquête à l'écart très faible et à relativiser, mais qui donne un premier indicateur intéressant. Car si la gauche a toujours fait bonne figure dans cet arrondissement, un tel basculement serait une première dans ce fief de la droite – et en particulier de Jean Tibéri – depuis près de quarante ans.

Florence Berthout, la maire sortante LREM, a pourtant réussi à nouer une alliance – la seule dans tout Paris – avec la liste LR de l'arrondissement. De quoi lui assurer, en théorie, une réélection confortable en cumulant ses 28 % au premier tour avec les 17 % d'Anne Biraben (LR). Sur le papier, la gauche est plus faible avec les 25 % de Marie-Christine Lemardeley (PS) et les 11 % de Laurent Audouin (EELV).

Dans l'entourage d'Agnès Buzyn, on considère que cette entente a des chances de porter ses fruits : «avoir fusionné lui donne plus de chance en disputant un duel. Le résultat dépendra de sa capacité de mobilisation. Si les gens qui ont voté pour elle au premier tour le refont, avec les votes des Républicains, ça devrait passer».

Une alliance LREM-LR perturbante

Sauf que cette union LREM-LR sème le trouble, en partie à cause du parcours de Florence Berthout. Celle-ci était auparavant membre des Républicains, et a même été la patronne des élus de la droite à Paris de 2017 à 2019. Avant de rejoindre officiellement la campagne de Benjamin Griveaux en novembre dernier. Les deux formations s'arrachent d'ailleurs la candidate, qui apparaît sur chacun des sites de campagne.

Facteur aggravant, la fusion des deux listes ne se fait pas sans heurts. Après la mise au jour de tweets racistes et homophobes de l'une de ses nouvelles co-listières, Florence Berthout a décidé de l'exclure de sa campagne ce dimanche 7 juin :

«Cette situation pourra lui être reprochée. Il pourrait y avoir des doutes sur la colonne vertébrale, qui risquent d'agacer les électeurs de droite comme d'En Marche», confirme Frédéric Dabi.

Côté Anne Hidalgo, on met logiquement en avant une conjoncture plus positive. «L'arithmétique nous met à égalité, mais pour ce qui fait la réussite d'un deuxième tour, à savoir la capacité de rassemblement, l'avantage est pour nous. La dynamique est en notre faveur», avance Jean-François Martins, l'un des porte-paroles de campagne d'Anne Hidalgo.

Le 9e arrondissement, aller-retour à gauche en vue

Dans le 9e arrondissement, la donne est inversée. Malgré des discussions, la sortante LREM Delphine Bürkli, qui a aussi quitté les Républicains l'an dernier, aura bien face à elle une liste LR. En plus de celle de la gauche unie.

Résultat : Delphine Bürkli, avec ses 36 % au premier tour, risque d'être handicapée par le maintien de Pierre Maurin (LR) et ses 15 %. Car en face, Arnaud Ngatcha (PS), fort de ses 25 %, compte sur le soutien des 9 % de Guillaume Cot (EELV).

«Nous bénéficions davantage du rassemblement car Delphine Bürkli n'a pas de réserve de voix», souligne Jean-François Martins. Le porte-parole d'Anne Hidalgo fait référence à l'éparpillement des voix de centre et de droite entre les deux candidates, qui va les pénaliser face à l'union de la gauche et des verts.

Ce qui n'empêche pas de croire en la stratégie de la candidate LREM chez les macronistes : «dans la difficulté de cette triangulaire, la clarté du positionnement de Delphine Bürkli peut apparaître. Beaucoup de gens préfèrent la stabilité et trouveraient injuste qu'elle soit battue. C'est une maire très investie».

«Même si elle est reconnue pour sa bonne gestion de l'arrondissement, la triangulaire fragilise la maire sortante. Elle n'est pas en situation d'être réélue facilement, comme cela aurait été le cas dans un simple duel», rétorque Frédéric Dabi, le directeur général adjoint de l'IFOP.

Et pour cause, en 2014, Delphine Bürkli (alors LR) avait ravi l'arrondissement à la gauche, qui le tenait depuis 2001. Une victoire de haute lutte, à 150 voix près, dans un... duel face à la socialiste Pauline Véron.

Autre incertitude : la décision des électeurs villanistes au second tour. Les têtes de listes du dissident LREM, qui poursuit son cavalier seul, ont obtenu 7 % des suffrages dans ces deux arrondissements. «Dans nos enquêtes, les électeurs de Cédric Villani privilégient Anne Hidalgo plutôt que Rachida Dati ou Agnès Buzyn. Cela pourrait constituer un report de voix indirect en faveur des candidats de gauche», évoque Frédéric Dabi.

Dans tous les cas, l'issue du scrutin dans ces deux arrondissements, qui élisent un nombre restreint de conseillers de Paris (4 chacun sur 163 au total), ne devrait pas changer le cours de l'élection. Mais elle pourrait constituer un symbole de la vague rose et verte qui s'annonce à Paris, ou au contraire d'une implantation macroniste durable dans la capitale.

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