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Déconfinement : la date du 19 mai est-elle justifiée d'un point de vue sanitaire ?

[BERTRAND GUAY / AFP]

Une date justifiée ? Dans une semaine, le 19 mai prochain, le pays entrera dans la deuxième phase de son déconfinement. Après des semaines de restrictions dues à l'épidémie de Covid-19, les Français pourront renouer avec certaines de leurs habitudes, comme déambuler dans les allées d’un musée ou encore savourer un café en terrasse, et ce, jusqu’à 21h.

Mais ces assouplissements ne sont-ils pas trop prématurés ? Si on regarde les indicateurs épidémiologistes actuels, il n’y a aucune raison de repousser cette échéance, selon Antoine Flahault, directeur de l'Institut de santé globale de l'université de Genève, en Suisse. Pour l’épidémiologiste, «cette phase du déconfinement ne me semble pas être une partie risquée et problématique».

«Les indicateurs sont favorables»

«Les indicateurs sont favorables et s’améliorent de façon continue depuis plusieurs jours. Il y a une décrue avec un taux de reproduction du virus qui est inférieur à 1 de façon assez homogène sur l’ensemble du territoire français», observe-t-il. Plus précisément, il est de 0,79. Cela signifie qu’un malade contamine en moyenne moins d'une personne et que l'épidémie régresse.

L’épidémiologiste Martin Blachier confirme lui-aussi qu’il y a «une accélération de la décroissance. Plus on avance, plus les chiffres diminuent, et fortement, à la fois sur le nombre de cas, de décès, et celui des hospitalisations». En effet, 25.666 personnes sont actuellement hospitalisées, ce qui correspond à une baisse de plus de 11% sur une semaine.

En moyenne, du 4 au 10 mai, 217 décès quotidiens ont été enregistrés (-18,7% en 7 jours), selon les données de Covid Tracker. Quant au nombre de cas positifs, on en compte en moyenne, quotidiennement, sur une semaine glissante, un peu plus de 17.550.

Un risque de contamination faible

«On est quasiment au niveau que l’on avait en janvier dernier», note le spécialiste en santé publique, soulignant que cette décroissance rapide de l’épidémie est «probablement liée à un phénomène saisonnier». L’été, «le risque de contamination est 30 à 40% moins élevé», précise-t-il.

De plus, ajoute Antoine Flahault, «l’ouverture des lieux culturels et des terrasses n’est pas une mesure très dangereuse car dans les musées les gens sont plutôt silencieux, et masqués, tout comme dans les cinémas et les théâtres». A condition qu’elles ne soient pas bâchées, le risque de contamination est également «très faible» sur les terrasses.

Il considère en revanche que la réouverture des activités sportives dans les lieux couverts est risquée. «Les salles de sport sont connues pour être des lieux de transmission en raison des aérosols (particules virales en suspension, ndlr)». Pour limiter les risques, «il est important d’aérer régulièrement ces lieux clos et de les équiper de capteurs de C02.»

«La pandémie n’est pas totalement sous contrôle»

Alors que les bars, les restaurants, les cinémas et les musées, fermés depuis la fin du mois d'octobre, se préparent à rouvrir leurs portes, l’épidémiologiste Yves Buisson, de son côté, se montre plus réservé. Si les indicateurs confirment une tendance à la baisse, «le virus circule toujours et la pandémie n’est pas totalement sous contrôle», rappelle le président du groupe Covid-19 de l'Académie Nationale de Médecine.

«On est encore dans une phase de transition et l’expérience nous montre que rien n’est jamais acquis». Selon Yves Buisson, ces assouplissements «auraient dû être assortis d’un passe sanitaire, prouvant que l’on est immunisé contre le Covid-19 ou que l’on est pas infecté en présentant un test négatif récent».

Désormais, le nombre de malades du Covid-19 recensés dans les services de réanimation est passé sous la barre des 5.000. Au 10 mai, 4.870 personnes y étaient admises, soit une baisse de 13,7% en 7 jours. Toutefois, «ce chiffre reste élevé». Ce niveau est à peine inférieur au pic de la deuxième vague (4.900 à la mi-novembre), et l’épidémie «peut rapidement redémarrer à la faveur d’un variant encore plus transmissible», prévient-il.

Un rebond de l’épidémie après le 19 mai ?

Globalement, «les protocoles sont bien respectés. Mais il suffit que 10% des établissements ne l’appliquent pas correctement pour qu’une reprise de l’épidémie, localisée ou multifocale, soit observée.» Pour rappel, les cafés et les restaurants devront se limiter à la moitié de leurs capacités, et avec des tables de six maximum. Pour les cinémas, les salles de théâtre ainsi que les cirques, la jauge sera limitée à 35% de la salle. 

Les lieux culturels et les terrasses doivent rouvrir, «mais à condition d’utiliser un passe sanitaire», insiste-t-il. Sans compter que cela «inciterait davantage de personnes à prendre rendez-vous dans un centre de vaccination.»

Avec ou sans passe, Martin Blachier considère que «cette prochaine étape est indiscutable» et que, «entre l’accélération de la baisse, l’effet saisonnier, et le type d’établissements qui seront rouverts, le risque de reprise de l’épidémie est assez faible. 

D’après plusieurs simulations, «il n’y aura pas une remontée des courbes». Quelques pays ont déjà rouvert leurs terrasses, comme la Suisse, l’Italie, l’Espagne, rappelle l’épidémiologiste, «et cela n’a pas entraîné un rebond de l’épidémie».

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