Philippe Labro est écrivain, cinéaste et journaliste. Chaque vendredi, pour Direct Matin, il commente ce qu'il a vu, vécu et observé pendant la semaine. Un bloc-notes subjectif et libre.
VENDREDI 22 MARS
Nicolas Sarkozy mis en examen, quelques jours seulement après le ministre délégué au Budget, Jérôme Cahuzac, qui a été contraint de démissionner. Aucun rapport entre ces deux événements, ni ces deux hommes, mais – pour l’un, comme pour l’autre – je pense à cette phrase de Me Daniel Soulez-Larivière, que me cite son confrère, Me Georges Kiejman : «Le temps de la justice n’est pas le temps des hommes.» C’est bien le temps que l’un, comme l’autre, vont devoir affronter. Il en résultera, pour l’un (Cahuzac) un retrait – ou pas – de la politique. Pour l’autre (Sarkozy), une volonté sans doute plus accrue de «retour-recours».
A l’occasion de ces deux affaires, on constate – je ne suis pas le seul – une montée de la violence verbale, dans tous les sens, et venue de toutes les directions. La «manif» de dimanche, les imprécations insultantes de Jean-Luc Mélenchon, les dérapages verbaux quasi-quotidiens – il règne, en ce moment, en France, un climat détestable. Oui, détestable. Il vaudrait mieux que l’arbitre siffle la fin de la «récré». Mais il n’y a pas d’arbitre, et il ne s’agit pas d’une «récré».
SAMEDI 23, DIMANCHE 24
Entre le samedi et le dimanche, le 33e Salon du livre, à la Porte de Versailles, à Paris, change radicalement de visage. Samedi, il faisait beau et je suis surpris de constater, sinon une désaffection, du moins un nombre plus restreint des habituels visiteurs. Dimanche, le temps est redevenu gris et froid et voici, dès lors, que l’on peut à peine entrer dans l’immense hall, tellement les stands, les allées, sont submergés, envahis, embouteillés. Une foule courtoise, patiente, armée, neuf fois sur dix, de portables qui photographient et de caméras qui vous filment, forme une longue file d’attente pour obtenir une dédicace.
L’exercice, quand il y a beaucoup de lecteurs, est très délicat. Si vous expédiez votre dédicace au moyen d’une simple signature et d’une formule toute faite (genre : «avec ma sympathie»), vous avez la sensation de n’avoir pas satisfait ce lecteur – ou lectrice – anonyme qui vous a si sereinement attendu. En revanche, si vous entamez un dialogue (aussi court soit-il) avec l’inconnu(e) afin de «personnaliser» la dédicace, vous risquez de mécontenter la longue file qui poireaute. Seule solution : personnaliser, certes, mais en écrivant vite, vite, vite !
LUNDI 25 MARS
A la télé, sur Arte, il est 20h50, je tombe sur The Getaway (Guet-apens) de Sam Peckinpah, avec Steve McQueen et Ali MacGraw, et ne peux pas le lâcher. J’ai dû déjà le voir une dizaine de fois, car j’aime le déroulement du récit, la fusillade finale au fusil à pompe dans un hôtel sinistre près de la frontière mexicaine, les personnages, tous mieux «castés» les uns que les autres, et surtout, Steve McQueen – un de mes acteurs favoris. Roi du sang-froid et de la fausse nonchalance, crédible dans chacun de ses gestes, et dont la voix, l’œil bleu, la dégaine chaloupée du type qui se sait capable de flinguer les crapules qui le pourchassent et éviter les «cops» qui le recherchent, font toujours autant d’effet. McQueen est irremplaçable !
Ce même jour, on apprend que Tiger Woods est redevenu n°1 mondial du golf – après une nouvelle victoire qui le fait enfin revenir des profondeurs de l’enfer dans lesquelles le scandale de sa déchéance sexuelle l’avait plongé. On appelle cela un «come-back», et nombreux étaient ceux – dont moi – qui pensaient qu’il ne se relèverait pas de ce qui avait été une chute terrible dans un pays pourtant sévère vis-à-vis de ses champions devenus des modèles. Et bien, voila le «Tigre Bois» de retour, grâce, entre autres, à la présence apaisante d’une nouvelle compagne – Lindsey Vonn – skieuse émérite. «A very nice story».