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Mali : quand Ansar Dine impose sa loi

Les groupes islamistes contrôlent le nord du Mali.[ROMARIC OLLO HIEN / AFP]

Il y a à peine quelques mois, seuls quelques experts connaissaient leurs noms. Mais depuis le coup d'Etat qui a renversé le 22 mars le président malien Amadou Toumani Touré et le marasme politique qui règne dans le pays, les membres d’Ansar Dine en profitent pour continuer leur progression. 

Ces salafistes - prônant une lecture ultra-rigoriste de l'islam - et leurs alliés d’Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) et du jihad en Afrique de l'Ouest (Mujao), contrôlent désormais le nord du pays. Ils ont même évincé la rébellion touareg (MNLA) qui avait lancé avec eux l'offensive en janvier. Leur objectif : instaurer un état islamique sur tout le territoire. Une menace qui inquiète la communauté internationale.

 

Qui sont les islamistes d’Ansar Dine ?

Ce nom, qui signifie « les défenseurs salafistes de la religion »,  est finalement assez récent. Comme l’explique Mathieu Guidère, auteur de Le printemps islamiste: démocratie et charia (ed. Ellipses), "le groupe a été fondé fin 2011 par Iyad ag Ghali, un vétéran de la cause touareg. Il a participé en 2006 aux accords d’Alger entre le gouvernement de Bamako et la rébellion et est parti en Arabie saoudite en tant que conseiller du gouvernement malien. Là-bas, il s'est radicalisé, a pris contact avec des groupes salafistes" ...  Avant de rentrer au Mali pour fonder Ansar Dine. Aujourd’hui, selon l’expert, le groupe, qui compte Al-Qaïda parmi ses alliés – Aqmi est présent dans la région et recrute dans le même vivier - compterait un millier de combattants. Il serait financé par les enlèvements, le trafic de drogues et d’armes.

 

Comment réagit la population ?

Au départ, explique Mathieu Guidère, «les rebelles salafistes ont été accueillis avec soulagement par les habitants,  dans un pays qui n’avait plus de vraie armée et où les violences et pillages étaient monnaie courante. Mais désormais, les gens sont terrorisés car les membres d’Ansar Dine n’ont qu’un objectif, imposer leur vision ». Ainsi la flagellation publique d’un couple non marié, la destruction ces derniers jours de mausolées de saints musulmans et de la porte sacrée d'une mosquée du XVème siècle à Tombouctou, ont choqué la population, impuissante.

 

Pourquoi détruisent-ils des lieux saints musulmans ?

Les membres d’Ansar Dine l’ont affirmé : la destruction des mausolées avait d’abord un but politique. « Ils n’ont pas apprécié que Bamako demande à l’Unesco l’inscription de ces mausolées sur la liste du patrimoine mondial en péril, étant donné qu’ils estiment que Bamako n’a aucune autorité sur le nord du Mali », explique Mathieu Guidère. Mais la raison de ces destructions est également idéologique. A leurs yeux, "la tombe est un problème dans la mesure où les gens la visitent, peuvent se prosterner devant, alors qu'ils considèrent qu'il n'y a qu'une seule divinité, c'est Dieu, et que toute autre démarche de vénération est une sorte d'hérésie, une façon de se détourner du Dieu unique", note l'anthropologue Jean-Claude Penrad, de l'Ecole des hautes études en sciences sociales.

 

Quel risque pour la communauté internationale ?

Mardi, le Premier ministre français Jean-Marc Ayrault a déclaré que la France était déterminée à «empêcher des groupes comme Aqmi » de constituer  « des bastions du terrorisme international » dans le nord du Mali. Son ministre des Affaires étrangères, Laurent Fabius, avait auparavant dit avoir « bon espoir » de voir une résolution du Conseil de sécurité de l'ONU adoptée rapidement pour soutenir le déploiement d'une force ouest-africaine. Pour Mathieu Guidère, « le risque, c’est qu’on tombe dans la même configuration qu’en Afghanistan, quand Oussama Ben Laden avait profité de l’arrivée au pouvoir des talibans. Au Mali, Aqmi pourrait se développer en coopération avec Ansar Dine. » Lui considère qu’une intervention  extérieure est très risquée, « car les islamistes  ont déjà menacé d’attentats terroristes en guise de représailles ».

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