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Russie : mesures de rétorsion suite à l'affaire Magnitski

La Douma à Moscou en avril 2012 [Kirill Kudryavtsev / AFP/Archives] La Douma à Moscou en avril 2012 [Kirill Kudryavtsev / AFP/Archives]

La Douma russe a approuvé vendredi en première lecture des mesures de rétorsion à l'encontre de citoyens américains, après l'adoption de sanctions aux Etats-Unis contre des fonctionnaires impliqués dans la mort en prison du juriste Sergueï Magnitski.

La chambre basse du Parlement russe a approuvé ce projet de loi, qui concerne des Américains ayant enfreint les droits de citoyens russes, par 431 voix pour et deux contre. Il n'y a eu aucune abstention.

Ce texte fait suite à l'adoption par le Congrès américain la semaine dernière de sanctions contre les fonctionnaires russes impliqués dans le décès en prison en 2009 de Sergueï Magnitski, avocat fiscaliste qui conseillait le fonds d'investissement britannique Hermitage Capital.

Le projet de loi prévoit notamment d'interdire l'entrée en Russie à des Américains ayant commis ou participé à un crime ou un délit à l'encontre de ressortissants russes se trouvant à l'étranger.

L'interdiction d'entrée concerne également des Américains ayant participé à l'emprisonnement illégal de citoyens russes ou ayant pris des décisions juridiques illégitimes à leur encontre.

Il est aussi prévu de geler leurs actifs et leurs activités en Russie.

Le texte adopté vendredi propose une entrée en vigueur de la loi dès le 1er janvier 2013.

La liste des personnes concernées n'a pas encore été révélée mais les députés ont indiqué qu'elle allait concerner surtout les personnes ayant commis des abus à l'encontre d'enfants russes adoptés aux Etats-Unis.

"Il y a eu une augmentation des cas, où des citoyens russes, se trouvant hors de Russie, ont dû faire face à des actions illégales. C'est particulièrement difficile à ignorer lorsqu'il s'agit d'enfants", a déclaré un député du parti au pouvoir Russie Unie, Vladimir Pliguine.

La législation est d'ailleurs déjà nommée, de manière officieuse dans les médias et par des députés, "le projet de loi Dima Iakovlev", du nom d'un petit garçon russe de deux ans, décédé en 2008 après que son père adoptif américain l'a oublié dans une voiture en plein été.

Le père avait été acquitté par un tribunal de Virginie, un jugement qui avait déclenché le courroux de Moscou.

Durant les débats à la Douma, les députés russes n'ont pas hésité à user d'une rhétorique digne de la Guerre Froide.

"Tout le monde comprend que l'époque où nous jouions le jeu des Etats-Unis est révolue", a ainsi déclaré le député communiste Pavel Dorokhine.

Le juriste Sergueï Magnitski avait été arrêté en 2008 après avoir accusé des fonctionnaires du ministère russe de l'Intérieur d'avoir organisé une gigantesque fraude de 5,4 milliards de roubles (130 millions d'euros) via des remboursements d'impôts.

Il est mort en détention à 37 ans, battu par des gardiens de prison et privé de soins.

Selon la nouvelle loi américaine, qui doit encore être promulguée par le président Barack Obama, les individus considérés comme impliqués dans le décès de M. Magnitski, ainsi que toute personne responsable de graves violations des droits de l'Homme en Russie, se verront refuser des visas pour entrer aux Etats-Unis, et leurs avoirs pourraient y être gelés.

Jeudi, le président russe, Vladimir Poutine, a qualifié d'"acte inamical" l'adoption à Washington de la "liste Magnitski", annonçant que la Russie devait y "réagir de manière appropriée".

Défenseurs des droits de l'Homme et opposants russes ont, eux, salué l'adoption de cette liste.

Mardi, des parlementaires de neuf pays occidentaux ont annoncé à Ottawa qu'ils rejoignaient un groupe baptisé "Justice pour Sergueï Magnitski" pour tenter de punir des responsables russes soupçonnés d'implication dans la mort du juriste.

Le projet de loi a été soutenu vendredi par les quatre partis qui composent la Douma. Mais des médias d'opposition, à l'instar du journal Novaïa Gazeta, l'ont vivement dénoncé.

"La polémique autour de la liste Magnitski a conduit à un ultimatum: si vous ne nous donnez pas accès à notre argent dans (vos) banques, nous ne vous donnerons pas nos orphelins", écrit le journal dans son édition de vendredi, ajoutant que la loi avait dès lors toutes les chances de "devenir la plus honteuse de toute l'histoire de la Douma".

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