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Syrie : guerre larvée entre Soueida la légitimiste et Deraa la rebelle

Des soldats syriens pointent leurs fusils sur Deraa le 23 janvier 2013 [Anwar Amro / AFP] Des soldats syriens pointent leurs fusils sur Deraa le 23 janvier 2013 [Anwar Amro / AFP]

Des habits maculés de sang, des façades de maisons noircies, des murs effondrés, témoignent de l'intensité des combats qui ont opposé dans la montagne druze près de Soueida, dans le sud de la Syrie, l'armée et les habitants aux rebelles venus de Deraa.

A Dahr al Jabal, dans un paysage grandiose à 1.400 m d'altitude, une centaine d'insurgés ont occupé, il y a dix jours, sept villas vides pour se préparer à une attaque de grande envergure contre la ville de Soueida forte de 110.000 habitants.

Mais une brusque chute de neige les a paralysés. Les rudes montagnards druzes, trouvant inhabituel le mouvement autour de ces maisons habitées seulement l'été, ont prévenu les autorités qui ont dépêché quatre membres des services de sécurité aussitôt abattus.

Les deux jours de combats se sont soldés par la mort de huit assaillants dont leur guide, Khaldoun Zeineddine, un officier déserteur druze, qui connaissait la topographie de la région, selon un responsable du gouvernorat.

Selon les militants anti-régime, Khaldoun Zeineddine était le premier officier de sa communauté à avoir quitté l'armée pour rejoindre la rébellion.

Des habits maculés de sang et  façades de maisons noircies le 23 janvier 2013 à Soueida [Anwar Amro / AFP]
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Des habits maculés de sang et façades de maisons noircies le 23 janvier 2013 à Soueida
 

C'est le dernier épisode d'une guerre larvée opposant la province légitimiste, "foyer" de la grande révolte syrienne contre le mandat français de 1925 et 1927, entre la montagne druze et le plateau sunnite du Hauran, et sa voisine rebelle, Deraa, "berceau" de la rébellion actuelle contre le régime où les premières manifestations de masse ont commencé en mars 2011.

Le 19 décembre, près de 300 rebelles ont attaqué un poste de l'armée à Mjeimar, à 16 km au sud-ouest de Soueida. Dans cette plaine de terre rouge ocre, l'officier de l'armée Abou Raed désigne d'énormes blocs de pierres basaltiques noires.

"C'est là qu'est mort Mouhammad Jrad, le beau-frère d'Abou Moussab al-Zarqaoui", le chef d'Al-Qaïda en Irak. "Il tirait avec une mitrailleuse BKC quand nous l'avons abattu avec 20 autres terroristes", dit-il. Ce mot désigne pour le régime les rebelles.

Il ne se passe pas une semaine sans qu'il y ait un incident. Aux enlèvements de fonctionnaires druzes à Deraa en mai et juin, les habitants de Soueida ont répondu par des mesures identiques et aujourd'hui une réelle méfiance s'est installée entre ces deux provinces, même si Soueida accueille 9.000 réfugiés de Deraa.

"Récemment, les rebelles ont de nouveau kidnappé une vingtaine de villageois druzes et désormais nous sommes en état d'alerte dans les 18 villages frontaliers avec la province de Deraa. Nos hommes sont armés et patrouillent jour et nuit pour éviter que cela ne se reproduise", affirme Jihad al-Atrache, dans sa maison à Era.

Jihad al-Atrash [Anwar Amro / AFP]
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Jihad al-Atrash
 

Le petit-fils de "l'émir" Hassan al-Atrache, célèbre pour avoir eu au cours de sa vie neuf femmes dont la célèbre chanteuse Asmahane, a lui-même été enlevé durant trois heures par les jihadistes du Front al-Nosra alors qu'il venait leur demander de rendre un benne à ordure volée.

Dans son uniforme vert olive, cet agriculteur de 56 ans, tient à faire la différence entre les habitants de Deraa "avec lesquels nous entretenons des relations historiques" et "notre crainte d'al-Nosra dont nous sommes prêts à repousser les attaques".

Les deux provinces sont diamétralement opposées sur le conflit actuel. Si Deraa a choisi la rébellion, Soueida est dans l'autre camp. "Malgré la crise que traverse le pays, nous croyons toujours en l'Etat et à la loi. Nous sommes contre la chaos et pour la justice. Nous sommes contre les groupes extrémistes qui veulent violer la sécurité. Nous sommes pour le dialogue national" présenté par Bachar al-Assad, affirme l'un des trois grands chefs religieux druzes, cheikh Hikmat Hajari.

"Ces dix dernière années, nous avions réussi à approfondir nos relations avec la société de Deraa, mais malheureusement plus récemment les dignitaires de notre province voisine avec lesquels nous étions toujours en contact ont été écartés par le chaos sécuritaire et ils ont perdu leur influence", ajoute ce cheikh dans sa maison de Qanawat, où figure un portrait du chef de l'Etat au milieu d'autres photos de dignitaires druzes.

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